Prix de l’immobilierC’est le moment d’attendre
Relayée par le quotidien Le Parisien du 30 janvier, une étude du courtier en crédit Empruntis incite les candidats propriétaires à acheter maintenant, avant que les taux ne montent. Vraiment ?
Courtier en crédit, la société Empruntis a un intérêt évident à relancer la machine des achats immobiliers, particulièrement grippée depuis quelques mois. Et elle le fait avec un argument qui semble solide. Si les prix baissent mais que les taux d’intérêt montent, scénario probable pour 2014, l’acheteur peut être perdant. Repris par Le Parisien (dont la une du 30 janvier est barrée par un énorme « C’est le moment d’acheter »), Empruntis prend comme exemple un emprunt de 150 000 € sur 20 ans à 3,5 %. Coût total du crédit, 58 800 €. Imaginons que le prix du bien baisse de 3 %, mais que les taux d’intérêt remontent à 4 %. Coût du crédit : 66 024 €. Conclusion de Maël Bernier, porte-parole d’Empruntis, « les particuliers ne devraient pas attendre, car l’impact d’une hausse des taux, même faible, annulerait purement et simplement cette baisse des prix des biens immobiliers et aurait même un impact négatif sur le pouvoir d’achat des candidats à l’acquisition ».
En fait, la démonstration d’Empruntis oublie plusieurs éléments, à commencer par le coût de l’assurance emprunteur, qui dépend du montant de l’achat. Si les prix baissent, l’assurance baisse aussi. Plus important encore, la durée moyenne de détention d’un bien n’est pas du tout de 20 ans, ni même de 15 ans. Elle est de 8 ans.
Un acheteur qui paye son bien trop cher s’expose à une moins-value. Taux d’intérêt faible ou pas, c’est une situation qui peut être embarrassante, dans la mesure où nombre de propriétaires revendent parce qu’ils déménagent ou qu’ils achètent plus grand.
Il y a enfin l’ampleur des baisses à venir. 3 % en moyenne pour 2014, tel est le scénario d’Empruntis, mais avec des pointes possibles à - 7 % à Paris et Lyon, voire - 10 % à Marseille, souligne le courtier… Dans une telle situation, bien évidemment, il faut attendre, même au risque que les taux remontent un peu. Interrogée, Maël Bernier souligne qu’elle ne « travaille pas au Parisien » et qu’elle n’est « pas responsable du titre ».
D’autant plus que la baisse des prix de l’immobilier pourrait s’étaler sur plusieurs années, le niveau actuel étant historiquement haut. Après le pic de 1991, le marché a entamé une longue glissade qui a duré 6 ans, avec des baisses de l’ordre de 40 % à Paris et de 15 à 20 % dans les métropoles régionales. Cela n’avait d’ailleurs pas empêché nos confrères du Nouvel Observateur de titrer « Comment profiter de la baisse » en… novembre 1991.