ENQUÊTE

TéléphoneAdieu le 12, vive les 118

La bataille pour la succession du 12 s'annonce sans merci, pas toujours au bénéfice des consommateurs.

Après des décennies de bons et loyaux services, le 12 s'apprête à tirer sa révérence. Désormais, chaque service de renseignements téléphoniques sera accessible par un numéro à six chiffres commençant par 118. Telle est la conséquence d'une directive européenne de 1996 imposant la libéralisation de ce secteur jusque-là monopole de l'opérateur historique, France Télécom.

À partir du 2 novembre, plus d'une dizaine de numéros 118 devraient voir le jour. Certains services existent déjà et ne feront que transiter vers la nouvelle numérotation. D'autres seront créés de toutes pièces par des éditeurs d'annuaires ou des spécialistes étrangers des renseignements téléphoniques alléchés par les quelque 400 millions d'appels enregistrés chaque année.

Désormais, le consommateur aura le choix. Mais encore faudra-t-il faire le bon. Car les prestations proposées risquent de varier fortement d'un éditeur à l'autre. Bien sûr, quel que soit le numéro composé, il sera possible de rechercher un numéro à partir d'un nom ou d'une adresse. La plupart des services seront capables de retrouver un correspondant à partir de son numéro de téléphone (annuaire inversé) ou de sa profession (comme les PagesJaunes, actuellement). Ils pourront aussi envoyer un SMS de confirmation et proposer de vous mettre directement en relation avec le correspondant demandé. Mais certaines sociétés comptent bien mettre en place rapidement des services plus innovants. «En 2006, assure Charles Tonlorenzi, le directeur général de Télégate France (118000), nous devrions être capables d'indiquer à un correspondant un hôtel proche d'où il se trouve, équipé d'un parking et acceptant les paiements par American Express.» La plupart de ses concurrents devraient en faire autant. Sur son site Internet, Numéro France (118218), promet en outre de fournir les horaires des événements culturels et des séances de cinéma. «Bientôt, nous pourrons envoyer sur le mobile du client un plan qui lui permettra de se rendre à l'endroit demandé», assure Guillaume de Maussion, le directeur d'Allô Bottin (118007). Quant à Guy Birenbaum, de l'Annuaire universel (118012), il espère bien résoudre des problèmes de tarification pour pouvoir à terme orienter en temps réel un client qui cherche son chemin.

calendrier

Les étapes à venir

2 novembre 2005

Les numéros en 118 dédiés aux services de renseignements téléphoniques sont opérationnels.

3 avril 2006

Le 12 et les autres services de renseignements (612, 712, 222, 3200...) cessent de fonctionner. Les personnes composant ces numéros après cette date seront averties de la migration des services de renseignements vers les numéros en 118.

3 avril 2007

Le 12 et les autres services de renseignements cessent définitivement d'être attribués.

Qualité variée

Mais encore faut-il que la qualité suive. Or, d'un service à l'autre, des écarts seront inévitables. D'une part, en fonction du nombre de téléopérateurs disponibles à l'autre bout de la ligne, de leur formation et de la qualité des outils de recherche mis à leur disposition, la durée de l'attente, le temps de traitement et la qualité de l'accueil risquent de varier sensiblement. D'autre part, pour faire des économies, certaines sociétés pourraient être tentées de faire appel à des centres d'appel basés à l'étranger. Si, a priori, le procédé n'a rien de choquant, le risque est plus important qu'un téléopérateur fasse épeler le nom d'une marque très connue en France ou demande de préciser dans quelle ville se trouvent les Champs-Élysées. Des remarques qui font plutôt mauvais genre !

Autre problème de taille : l'exactitude des renseignements fournis. La recherche par corps de métiers, par exemple, nécessite impérativement un gros travail d'enrichissement des bases de données. «Un garage Renault peut très bien être inscrit au nom de la SARL Dupont. Si nous voulons le retrouver, il faut entrer cette information dans notre base», explique Charles Tonlorenzi. Il faut aussi que les bases elles-mêmes soient les plus complètes possibles. Or, c'est loin d'être toujours le cas. «Contrairement à ce que certains disent, on ne pourra donner les prix et les moyens de paiement que d'une partie des restaurants, prévient par exemple Guy Birenbaum. Pour la simple raison qu'à ce jour, il n'existe aucune base recensant ce genre d'informations pour tous les établissements.»

Un marché à prendre

Enfin, la dernière inquiétude concerne les prix qui seront appliqués. «Il y aura de tout», prévient d'ores et déjà Charles Tonlorenzi. Certains pratiqueront une tarification surtaxée à la minute. C'est le cas de Télégate France, qui devrait faire payer chaque minute 0,96 euro (facturation à la seconde après une première minute indivisible et gratuité du temps d'attente). D'autres se pencheront plutôt vers un prix forfaitaire. C'est l'option choisie entre autres par l'Annuaire universel, qui envisage de facturer chaque appel 0,56 euro (envoi du SMS de confirmation et mise en relation compris). D'autres encore combineront un coût fixe à l'appel puis une tarification à la minute. Des prix auxquels il faudra ajouter une surtaxe que l'opérateur de téléphonie mobile sollicité se met dans la poche.

Et les prestataires ne comptent pas en rester là et espèrent bien faire grimper la facture grâce à la facturation des services annexes. Un itinéraire, le bulletin météo ou des informations sur la pharmacie la plus proche, et voilà quelques centimes d'euro en plus dans l'escarcelle. À condition de ne pas dépasser certaines limites. Proposer les horaires des séances de cinéma, c'est bien, sauf si le prix à la minute est plus élevé que sur les services similaires déjà existants. Idem pour la réservation d'une table de restaurant. Génial quand tout va bien, mais que se passera-t-il quand l'établissement affichera complet ou que les menus auront changé entre temps ?

Mais avant d'en arriver là, les sociétés vont devoir prouver aux consommateurs que leur service est meilleur que les autres. Des campagnes de publicité d'envergure nationale dans les journaux et à la télévision sont prévues. L'objectif est de frapper vite et fort pour prendre un maximum de parts de marché en un minimum de temps. Car, si l'on en croit Bruno Massiet du Biest, du Numéro France, «en avril, les jeux seront faits».

attribution

La foire aux bons numéros

Pas de jaloux. Pour éviter toute discrimination, l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes - ex-ART) a décidé d'attribuer les numéros 118XYZ par tirage au sort. Chacune leur tour, le 14 juin dernier, les sociétés dont le nom sortait du chapeau devaient indiquer le numéro qu'elles souhaitaient se voir attribuer. Objectif : obtenir un numéro simple à retenir afin de le faire entrer plus facilement dans la tête des consommateurs. Sorti en deuxième position, le PDG du Numéro France n'est pas mécontent de son choix : «Différentes études nous ont montré que le 118218 était particulièrement facile à mémoriser», assure-t-il. France Télécom a eu moins de chance. Tiré au sort en dix-septième position, l'opérateur historique a dû se contenter du 118712. Quant à Télégate France, l'un des acteurs les plus ambitieux, il est arrivé bon dernier et a hérité du 118555. Pour obtenir un numéro à la hauteur de l'enjeu, ce prétendant a trouvé la solution: il a racheté l'annuaire Scoot... et son numéro, le 118000.

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