ENQUÊTE

InvendusAmazon détruit ses stocks

Pour se débarrasser des invendus des commerçants de sa « marketplace », Amazon les détruit.

Avec près de 20 % de parts de marché (source Kantar/LSA, juin 2018), Amazon écrase le e-commerce en France. D’un côté, le géant fidélise les clients avec un service irréprochable : procédure de commande simplifiée à l’extrême, livraison rapide, prise en charge des frais d’expédition en cas de retour d’un produit, programme de fidélité Amazon Prime pour 49 € par an (livraison gratuite en 1 jour ouvré, ventes flash, prêts d’ebooks, vidéos et musique illimitées). De l’autre côté, Amazon s’est rendu incontournable pour les vendeurs de sa marketplace (voir encadré). Pour pouvoir vendre leurs produits sur Amazon, les commerçants ont deux solutions. Soit ils expédient eux-mêmes la marchandise, stockée et emballée par leurs soins, à chaque fois qu’une commande est passée (offre de base). Soit ils souscrivent au service « Expédié par Amazon ». « Les produits deviennent éligibles au programme Amazon Prime, c’est-à-dire que les vendeurs peuvent toucher nos clients les plus fidèles. Nous nous chargeons aussi de l’emballage et de l’expédition du produit vendu », explique Elise Beuriot, responsable de la marketplace d’Amazon pour la France. À cette fin, le vendeur stocke sa marchandise dans les entrepôts d’Amazon. Le groupe en possède cinq en France, d’autres en Allemagne, en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni pour servir le marché européen.

0,10 € par unité détruite

Évidemment, cela a un coût. Amazon répercute les frais, notamment de stockage, sur les vendeurs de la marketplace (entre 26 et 36 € par mois et par mètre cube). Et en bon logisticien, le géant du e-commerce procède à des inventaires. Ainsi, deux fois par an, le 15 février et le 15 août, il propose aux vendeurs dont les stocks ne bougent pas de leur renvoyer leur marchandise (à leur frais) ou de procéder à la destruction de leur stock. Coût : 10 centimes d’euro par unité supprimée. « C’est moins cher que de rapatrier les produits », témoigne l’un des vendeurs de la marketplace. Amazon facture en effet 0,25 € par unité retournée. Cette solution peut avoir du sens économiquement, elle reste incompréhensible à l’heure de l’éveil des consciences écologiques. Difficile de savoir quels volumes, quels types de produits font l’objet d’un tel gâchis, ni même comment Amazon s’y prend pour les détruire. Le e-commerçant n’a pas répondu à nos questions sur le sujet. Il se contente de signaler que des jouets, chaussures, vêtements ou encore produits d’hygiène invendus sont donnés à des associations comme Dons Solidaires. S’agit-il des stocks des vendeurs de sa marketplace ? Impossible à savoir.

Récemment, l’association Les Amis de la Terre s’est inquiétée de la situation. « Amazon détruit des invendus, mais aussi des produits qui lui ont été retournés par les clients. C’est révoltant, mais il est difficile d’agir car cette pratique n’est pas illégale », déplore Alma Dufour, chargée de campagne Extraction et surconsommation au sein de l’association. Les pouvoirs publics nationaux et européens misent pourtant sur l’allongement de la durée de vie des produits pour nourrir une politique de développement durable. Une politique dont, manifestement, il faudrait revoir les bases.

Zoom sur les marketplaces

Amazon, mais aussi la Fnac, CDiscount ou Darty : sur Internet, ces enseignes sont des vendeurs, mais aussi des « marketplaces » (places de marché). Elles permettent à des vendeurs tiers de commercialiser des produits sur leur site. En contrepartie, Amazon et les autres prélèvent une commission sur les transactions.

Pour vous y retrouver

Repérez la mention sur la page de l’article qui vous intéresse.

  • « Vendu et expédié par Amazon » : Amazon est le vendeur.
  • « Vendu par ... et expédié par Amazon » : vous êtes sur la marketplace et le vendeur a souscrit à l’offre « Expédié par Amazon », qui gère la commande, l’emballage, l’expédition et le SAV.
  • « Vendu par ... » : vous êtes sur la marketplace et le vendeur gère lui-même ses stocks et la relation client. 
Camille Gruhier

Camille Gruhier

Lire aussi

Soutenez-nous, rejoignez-nous

La force d'une association tient à ses adhérents ! Aujourd'hui plus que jamais, nous comptons sur votre soutien. Nous soutenir

image nous soutenir

Newsletter

Recevez gratuitement notre newsletter hebdomadaire ! Actus, tests, enquêtes réalisés par des experts. En savoir plus

image newsletter