ENQUÊTE

Diagnostics techniques immobiliersBilan peu flatteur

Chers et obligatoires, les diagnostics techniques immobiliers compliquent la vente d'un bien mais devraient en contrepartie améliorer l'information du consommateur. Dans la pratique, ils ne sont pas fiables, nos tests le démontrent.

Depuis le 1er novembre 2007, les différents diagnostics techniques immobiliers obligatoires en cas de vente sont regroupés dans un document unique, le dossier de diagnostic technique (DDT). Ce dernier doit être annexé à toute promesse de vente et à toute vente d'un logement, mais aussi être fourni par le propriétaire au locataire d'un local d'habitation ou d'un local à usage mixte d'habitation et professionnel (bilan énergétique, plomb et état des risques technologiques et naturels). Il doit également, et cela aussi c'est récent, être rédigé par un professionnel aux compétences certifiées par un organisme accrédité (type Afnor Certification, Bureau Veritas certification, etc.) et ayant souscrit une assurance couvrant sa responsabilité.

Dans un souci de protection du consommateur, le DDT en matière de vente porte une appréciation sur la présence de matériaux contenant de l'amiante, sur le risque d'exposition au plomb, sur la présence de termites lorsque le logement se trouve en zone infestée, sur les risques naturels et technologiques, sur les niveaux de performances énergétiques (quantité d'énergie consommée et impact en termes d'émissions de gaz à effet de serre) et, nouveauté, sur la fiabilité des installations de gaz raccordées au réseau. Le contrôle de l'installation électrique deviendra quant à lui obligatoire dans quelques mois (après maints reports, il entrera en application au 1er janvier 2009), tout comme, à partir du 1er janvier 2013, le contrôle des installations d'assainissement non collectif (fosses septiques et autres), quand le logement n'est pas raccordé à l'égout.

Le coût d'établissement du DDT est à la charge du vendeur. Pour une vente, n'hésitez surtout pas à interroger plusieurs professionnels afin de comparer leurs prix, tout en vous assurant qu'ils remplissent bien les conditions (certification, assurance et indépendance) prévues par la loi. Le technicien doit s'en justifier par la remise d'une attestation. Et mieux vaut vérifier : un propriétaire qui ferait appel à un diagnostiqueur non certifié pourrait voir sa res- ponsabilité pénale engagée en cas de litige.

Le matériel ne fait pas le pro

Les diagnostics établis avant le 1er novembre 2007 (donc par un professionnel non certifié) peuvent encore être utilisés jusqu'à leur date limite de validité, qui doit être spécifiée. Si vous êtes acheteur, vous avez tout intérêt à obtenir le plus tôt possible l'information la plus complète, afin de ne pas vous tromper sur les caractéristiques du bien que vous visez. Ces diagnostics devraient permettre d'avoir une idée plus précise sur l'investissement, ses qualités et ses défauts. Mais qu'en est-il sur le terrain ? Pour le savoir, nous avons commandité, de façon anonyme, une vingtaine de diagnostics immobiliers dans trois régions différentes, et nous sommes allés écouter les tables rondes organisées par la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (Fidi) lors des états généraux qui se sont déroulés fin janvier, à Paris. Pour l'occasion, le troisième étage du palais des Congrès de la porte Maillot ressemblait plus à un salon de l'électronique ! Des caméras infrarouges pour visualiser la thermographie d'une habitation côtoyaient le dernier cri en matière de détecteur radioactif de plomb dans les peintures ou de diagnostic gaz... Bref, toute la panoplie du parfait diagnostiqueur. Sauf que depuis l'entrée en vigueur de la législation, en novembre dernier, le matériel ne suffit plus à faire le professionnel. La certification devrait donc écarter la majorité des brebis galeuses qui entachaient l'image de cette jeune profession par des pratiques pour le moins indélicates. Les opérateurs doivent désormais décrocher leur « permis de travailler » auprès d'organismes certificateurs agréés. Ces accréditations - une par métier, donc une pour évaluer la performance énergétique, une pour la recherche de plomb, une autre pour l'amiante, etc. - sont d'ailleurs plutôt difficiles à décrocher d'après le sondage effectué auprès de ceux qui ont tenté les examens.

Formation incomplète

Les chiffres officiels cités par la Fidi le confirment : seuls 25 % des opérateurs possèdent l'intégralité des cinq certificats. Sur 6 500 personnes, c'est maigre. S'il semble logique que tous ne se sentent pas obligés de satisfaire au cahier des charges de la chasse aux termites (tout le territoire n'est, heureusement, pas infesté), il est surprenant de constater qu'à peine plus de la moitié des opérateurs (55 %) est qualifiée pour le diagnostic gaz, 74 % pour le plomb, 85 % pour l'amiante et 89 % pour le bilan énergétique. Interrogé, le directeur général de Dekra Certification, Jean-Pierre Levet, a une réponse rassurante : « Avec les fausses rumeurs qui ont couru quant à la non-entrée en vigueur de la certification, beaucoup d'entreprises n'ont pas anticipé la formation de leur personnel. Et la certification n'a vraiment débuté qu'en juin 2007. Ensuite, les professionnels ont pris conscience de l'urgence avec l'échéance du décret du 1er novembre et nous avons connu un véritable embouteillage de candidats. Or, obtenir une certification en deux jours est impossible. » Ajoutons que, pour les prestataires de services concernés, la certification a un coût, compris entre 5 000 et 7 000 euros par opérateur évalué. « La dépense globale pour la profession est de 30 millions d'euros, soit 10 % du chiffre d'affaires annuel, c'est lourd », déclare Jean-Jacques Ollivier, administrateur de la Fidi.

Le règne de l'approximation

Depuis la certification, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes à entendre l'auto-satisfecit des principaux acteurs réunis à Paris. Le tableau n'est pourtant pas aussi idyllique.

Après avoir fait intervenir une vingtaine de diagnostiqueurs sur nos trois logements (Besançon, Clermont-Ferrand et La Rochelle), nous avons sollicité les experts de l'Afnor Certification (née de la fusion, en 2004, de l'Association française pour l'assurance de la qualité et de l'association française de normalisation) pour effectuer les diagnostics de référence.

Force est de constater que les résultats sont très divergents selon les professionnels. « Ne serait-ce que pour établir un dossier de performances énergétiques dans une maison individuelle, un cabinet rigoureux devrait passer une demi-journée. Or, dans la pratique, les statistiques tendent à prouver qu'ils sont capables d'en réaliser plus de neuf par jour. Comment espérer un travail sérieux lorsqu'on a affaire à des gens partagés entre leurs exigences techniques et leurs obligations de rendement ? », s'insurge l'expert de l'Afnor qui a opéré en péri- phérie de Besançon. Autrement dit, estimons-nous heureux d'obtenir à prix d'or mais assez vite le document nécessaire à la signature d'une vente immobilière, mais n'attendons pas d'y lire des informations pertinentes !

La législation dans le détail

Quels sont les biens concernés par les diagnostics ?

Les conditions diffèrent.

Superficie : si le bien est un lot de copropriété et uniquement en cas de vente.

Performances énergétiques : tout bâti est concerné.

Amiante : si le permis de construire est antérieur au 01/07/97 et seulement en cas de vente.

Plomb : si le permis de construire est antérieur au 01/01/1949.

Termites : si le bien figure dans les zones délimitées par arrêté préfectoral (contacter la préfecture ou la mairie) et uniquement en cas de vente.

Risques naturels et technologiques : si le bien figure dans les zones délimitées par arrêté préfectoral.

Gaz : si l'installation a plus de 15 ans.

Quelle validité ?

La durée de validité des diagnostics varie.

Superficie : validité permanente.

Performances énergétiques : 10 ans. Amiante : validité permanente.

Plomb : un an si traces (6 ans pour une location), illimité si aucune trace détectée.

Termites : 6 mois.

Risques naturels et technologiques : 6 mois.

Gaz : 3 ans.

Michel Ebran

Michel Ebran

Carole Matricon-Delbé

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Les associations locales de l’UFC-Que Choisir

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