Téléphonie mobileLes réseaux mobiles les plus performants
Grâce à son application pour smartphones Queldébit et aux données qu’elle récolte, l’UFC-Que Choisir dispose d’un nouvel outil pour évaluer la qualité de chaque réseau mobile (débits, latence, vitesse d’affichage des pages web, qualité de diffusion des vidéos en streaming…). Voici les principaux enseignements que nous pouvons tirer de la première salve de résultats.
Orange qui confirme sa position « de leader pour la 11e année consécutive », SFR et Bouygues Telecom qui revendiquent chacun la place de « 2e meilleur réseau mobile de France », Free Mobile qui voit une « validation de sa stratégie »… Les quatre grands opérateurs ont, une fois de plus, interprété à leur sauce les résultats de l’enquête annuelle d’évaluation de la qualité des services mobiles (navigation web, lecture de vidéo, transfert de données, SMS et appels vocaux) de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), publiés le 19 novembre dernier. Pour la 22e édition de cette étude, le gendarme des télécommunications notait une progression générale de la qualité des réseaux mobiles, notamment des débits, et ce dans toutes les zones (rurales, intermédiaires et denses). Parallèlement, elle mettait en lumière des différences de qualité. Quant à la 5G, qui faisait pour la première fois l’objet de mesures, l’Arcep indiquait qu’elle apportait de meilleurs débits, mais pas chez tous les opérateurs et pas forcément dans les proportions promises par ces derniers. Alors, qui gagne ? Quel opérateur a vraiment le meilleur réseau ? Le service que fournit chacun d’entre eux est-il à la hauteur de ce qu’en attendent les abonnés ?
Pour se faire sa propre idée, l’UFC-Que Choisir a lancé, en juin dernier, son application baptisée Queldébit. Alors que l’Arcep, pour établir son classement, effectue des milliers de mesures dans tous les coins du pays, notre nouvel outil nous a offert la possibilité de récolter, en seulement quelques mois, de précieuses données sur les connexions mobiles des Français. Débits, latence, vitesse d’affichage des pages web, qualité de diffusion des vidéos en streaming… toutes ces informations, issues de milliers de tests de débit, nous permettent d’avoir une idée assez précise des performances de chaque opérateur. Forts de ces premiers résultats (et ce ne sont pas les derniers !), nous vous livrons les deux principaux enseignements à retenir.
De réelles différences entre les réseaux
Le premier constat, c’est que les quatre réseaux mobiles disponibles en France n’offrent vraiment pas les mêmes performances. Globalement, celui d’Orange se situe nettement au-dessus de la moyenne. L’opérateur historique fournit les meilleurs débits montants et descendants (réception et émission de données). Ses abonnés, tout comme ceux de Sosh, sont donc censés pouvoir récupérer leurs e-mails, télécharger des applications ou encore poster des photos sur les réseaux sociaux via la 4G plus rapidement que les autres. Et ce n’est pas tout. Avec Orange, les vidéos se lancent plus vite et les pages web s’affichent plus promptement. Ces bons résultats ne nous ont pas réellement surpris. Il faut dire qu’avec ses près de 20 millions de clients en téléphonie mobile, l’opérateur dispose d’une force de frappe inégalable. Grâce à cet avantage décisif, il a pu déployer un grand nombre d’antennes sur l’ensemble du territoire et s’octroyer les fréquences les plus efficaces lors des enchères organisées par l’Arcep.
Les concurrents de ce leader incontesté se disputent les autres places du podium, mais en fonction des critères, l’ordre varie. Si l’on tient compte du débit descendant, SFR monte sur la deuxième marche alors que Free devance Bouygues Telecom d’un cheveu. S’agissant du temps de chargement des pages web, cette fois, c’est Bouygues qui distance SFR et Free. Bref, si Orange occupe solidement la tête du classement, ses trois challengers se tiennent dans un mouchoir de poche. Pour autant, ces éléments doivent être pris avec une certaine précaution. D’une part, il s’agit de moyennes nationales : en fonction de l’endroit où l’on se trouve, Orange peut très bien être dépassé par un concurrent. D’autre part, les écarts entre les réseaux demeurent globalement assez faibles. L’impact réel devrait finalement rester relativement limité, voire imperceptible.
La fracture numérique s’agrandit
L’autre grand enseignement de cette première vague de résultats, c’est qu’un fossé sépare les villes et les campagnes en matière de performances. Alors que le débit descendant moyen dont bénéficient les clients Orange résidant en zones urbaines s’élève à 79 Mb/s (mégabits par seconde), il n’est que de 41 Mb/s en zones rurales. Quant au débit montant, il passe de 16 à 9 Mb/s. Les pages internet mettent également plus de temps à se charger dans les campagnes. Si, à en croire l’Arcep, l’écart n’est pas si grand, c’est que l’autorité de régulation mesure le pourcentage de pages s’affichant en moins de 10 secondes. Selon nos propres résultats, chez Orange, c’est le cas de 89 % des pages web en zones rurales et de 96 % en zones urbaines, soit une différence de 9 points. Sauf que 10 secondes pour qu’une page web monte, c’est long ! Nous avons donc aussi relevé les pages apparaissant à l’écran en moins de 3 secondes, afin de mieux coller aux attentes des consommateurs. Avec un résultat de 87 % en zones urbaines et de seulement 71 % en zones rurales, soit 16 points d’écart, le fossé se creuse. Cette tendance est la même chez tous les opérateurs ou presque. Seul Free offre des performances similaires, voire supérieures dans les territoires ruraux. Un phénomène qui est certainement dû à un parc d’abonnés nettement plus urbain que celui de ses concurrents, d’où des « embouteillages » dans les villes.
Cette disparité entre téléphonie des villes et téléphonie des champs n’est malheureusement pas près de disparaître, bien au contraire. Certes, comme l’affirme l’autorité des télécoms, les débits moyens augmentent partout en France. Néanmoins, force est de constater qu’ils ont tendance à grimper plus vite dans les régions urbaines que dans les espaces ruraux, ce qui aggrave un peu plus la fracture numérique entre les territoires. De fait, malgré les efforts fournis par les opérateurs pour couvrir la totalité de l’Hexagone en 3G ou en 4G, encore trop de Français vivent dans des zones blanches où ils ne captent aucun signal.
Et quand une zone est dite « couverte », cela ne signifie pas que le réseau est disponible partout, ni que le débit délivré s’avère suffisant pour profiter pleinement de son téléphone. Il est encore très fréquent que des habitants n’aient pas la possibilité de faire jouer la concurrence entre opérateurs, voire qu’ils n’aient d’autre choix que d’aller au fond du jardin pour envoyer un SMS ou passer un coup de fil. Quant à surfer sur Internet sur leur smartphone, comme cela se fait naturellement en ville, beaucoup n’y pensent même pas bien que leur forfait mensuel leur coûte le même prix qu’ailleurs. Le problème, c’est que les opérateurs ont beau se vanter de déployer la 4G dans les campagnes, ils continuent à consacrer la très grande majorité de leurs investissements à l’amélioration de leur service dans les régions denses. Ils agissent ainsi afin de faire face à l’accroissement de la population et à l’explosion des usages gourmands en bande passante, tels que la vidéo ou la visioconférence. S’ils veulent ne serait-ce que maintenir leur qualité de service, ils n’ont d’autre choix que d’accroître les capacités des antennes existantes et d’en ajouter de nouvelles. C’est à ce prix qu’ils pourront toujours se targuer de proposer le meilleur réseau mobile.
Les résultats de nos mesures (1)
Réception de données (débits descendants moyens)
Le réseau Orange propose clairement les meilleurs débits descendants. Avec un forfait Orange ou Sosh, vous avez plus de chance qu’un message arrive vite et qu’un téléchargement s’effectue rapidement. SFR, en deuxième position, est loin derrière. Free et Bouygues se tiennent dans un mouchoir de poche.
Émission de données (débits montants moyens)
En matière de débits montants, les écarts sont plus faibles, mais Orange reste en tête, devant Bouygues Telecom cette fois. SFR grille la politesse à Free Mobile. Le débit montant influe notamment sur la vitesse d’envoi des pièces jointes, de publication de photos ou de vidéos sur les réseaux sociaux, etc.
Villes et campagnes (part des débits descendants supérieurs à 8 Mb/s)
Zones urbaines
Zones rurales
8 Mégabits par seconde voilà le débit au-delà duquel une connexion mobile est considérée comme « bonne ». Nos données montrent qu’on a nettement plus de chances de bénéficier de ce débit dans les zones denses que dans les campagnes, sauf peut-être avec Free.
Bon à savoir Queldébit fait appel à la technologie dite du « monothread » et prend en compte non pas les données les plus élevées, mais la moyenne des résultats obtenus pendant le test, cela afin de se rapprocher au plus près de l’expérience du client. Par ailleurs, sachez que chacun de ces tests consomme un peu de data (en moyenne, pour la phase complète, 30 Mo en 3G, 90 Mo en 4G et 150 Mo en 5G). Ils sont donc à réserver aux abonnés ayant un forfait intégrant une enveloppe de data.
(1) Source : Queldébit. Application désormais indisponible (février 2024).
La 5G n’apporte pas encore grand-chose
Un an et demi après son lancement, la 5G peine toujours à décoller. Elle permet pourtant bel et bien de bénéficier de meilleures performances. Selon Queldébit, connecté à une antenne 5G, on dispose d’un débit descendant de 225 Mb/s, en moyenne, contre 44 Mb/s depuis une antenne 4G. Bref, il est multiplié par cinq ! Toutefois, pour profiter de la 5G, il faut se trouver dans une zone couverte par ce réseau. Pour l’instant, seules quelques agglomérations et villes moyennes sont concernées, et encore, pas en totalité. Conséquence : vous aurez beau détenir un smartphone compatible et avoir souscrit un forfait adéquat, dans la plupart des cas, vous devrez vous contenter de la 4G. Et quand vous aurez la chance d’être connecté à une antenne 5G, le résultat variera fortement en fonction de l’endroit où vous vous situerez. Nos relevés indiquent en effet qu’en zones rurales, le débit en 5G plafonne à seulement 48,9 Mb/s en moyenne, soit plus ou moins le même qu’en 4G. Qui plus est, nos mesures montrent que la proportion de pages web chargées en moins de 3 secondes est identique en 4G et en 5G. Ceci s’explique par le fait que les performances de la 5G varient selon les zones et les fréquences utilisées par les opérateurs. Or, en général, là où la 5G est bonne, la 4G l’est aussi. On reste encore loin de la révolution promise.Antoine Autier