SFAMRemboursements : on est loin du compte
Quatre mois après la clôture de la procédure d’indemnisation mise en place par la SFAM et la DGCCRF, on ne connaît toujours pas le nombre de victimes dédommagées ni le montant des remboursements. On sait en revanche que les problèmes perdurent.
Attention
Suite au jugement d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, rendu le 24 avril 2024, contre la SFAM, le contenu de cet article n’est plus à jour. Une actualisation de nos différents outils pratiques relatifs à ce dossier est en cours.
Elles avaient jusqu’au 31 août 2019 pour se faire connaître. Les victimes de la Société française d’assurance mobile (SFAM) n’avaient, en théorie, qu’à envoyer un e-mail ou à remplir un formulaire en ligne pour obtenir le remboursement des sommes qu’elles estimaient prélevées indûment. La procédure, imaginée par la SFAM et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dans le cadre d’un accord transactionnel signé en juin 2019 sous l’égide du parquet de Paris, était censée leur permettre de récupérer rapidement leur argent. Tout le monde y avait droit, aussi bien ceux qui n’avaient pas eu conscience de signer un contrat d’assurance que ceux qui n’étaient pas parvenus à résilier le leur à temps ou avaient constaté des prélèvements plus importants que prévus. De fait, cette procédure inédite a répondu aux demandes de certaines personnes. Ainsi Geoffrey a reçu les 200 € attendus et Anne-Lise, les 1 795 € qu’elle réclamait. Quant à Jacques, il a eu la bonne surprise de voir arriver sur son compte le virement espéré, assorti des 30 € de bienvenue promis lors de la souscription.
On sent comme de l’embarras
Mais combien de victimes ont réellement recouvré l’argent versé ? Et quel est le montant de l’enveloppe restituée par le courtier d’assurances ? Impossible de le savoir. Quatre mois après la date de clôture de la procédure, ni la DGCCRF, qui a mené l’enquête, ni la SFAM n’ont communiqué ces données, malgré nos demandes répétées et la promesse de les fournir. Quant à Sadri Fegaier, l’emblématique patron de l’entreprise, il se fait discret, se contentant d’affirmer par la voix de son avocat que « tous les engagements prévus dans l’accord ont été tenus ». Si la DGCCRF reste, elle aussi, réservée sur le sujet, c’est peut-être qu’elle s’est rendu compte que son opération « remboursement » n’avait pas atteint tous les objectifs qu’elle s’était fixés. En effet, les victimes de la SFAM sont loin d’avoir toutes été dédommagées.
À certaines, la société a refusé tout ou partie de l’indemnisation, parfois pour d’obscures raisons. Bruno n’a, par exemple, touché que 3 100 € sur les 4 500 € réclamés, sans autre explication. Manuel, lui, a dû se contenter de 1 015 € au lieu de 2 400 €. À d’autres, le courtier a demandé des justificatifs ou des éclaircissements supplémentaires qu’ils avaient pourtant déjà fournis. Mais surtout, comme le craignait l’UFC-Que Choisir, nombreux sont ceux qui n’ont découvert la situation qu’après la clôture de la procédure. C’est le cas d’André, qui ne s’est aperçu que début novembre 2019 que l’assureur lui avait ponctionné, dès avril 2016, pas moins de 30,99 € par mois à la suite de l’achat d’une enceinte Bluetooth à la Fnac de Beauvais (60). Claire, elle, a constaté récemment qu’en plus des 15,99 € d’assurance liés à l’acquisition d’un iPhone, la SFAM procédait à deux autres prélèvements sur son compte, respectivement de 8,99 € et 19,99 €, depuis plusieurs mois. « Ils m’ont expliqué que ces montants correspondaient à un contrat Privilège que l’on m’aurait proposé par e-mail, et que je n’aurais pas refusé dans les 48 heures. Or, je ne me souviens pas d’avoir reçu un tel message », assure-t-elle, comme d’autres.
L’assureur continue d’abuser
En outre, il semble bien que l’épisode n’ait pas incité la SFAM à changer radicalement ses pratiques. Certes, ses contrats ne sont plus proposés dans la quasi-totalité des Fnac, mais ils sont toujours vendus dans d’autres enseignes, ou essentiellement par le biais du démarchage téléphonique, avec encore trop souvent l’emploi de méthodes douteuses. Rémi en a d’ailleurs fait les frais. Fin octobre, il reçoit l’appel d’un conseiller de la SFAM lui promettant un smartphone et un mois d’abonnement gratuits en échange de la signature d’un contrat d’assurance à 19,99 € par mois. Après de longues discussions, il finit par accepter l’offre. Cependant, en lisant le contrat que le conseiller lui fait parvenir par e-mail, il déchante : non seulement ses mensualités d’assurance passeront à 24,99 € au bout de trois mois, mais en plus le vendeur lui a également fait souscrire un Pack Privilège+ à 18 € mensuels, un Forfait Avantage à 19,99 € par mois ainsi que diverses options (une extension de garantie, une protection juridique…) pour 18 € supplémentaires chaque mois. « Au total, cette assurance me serait revenue à 881 € la première année, puis à 994 € les suivantes, soit davantage que mes assurances habitation et auto réunies ! », s’indigne Rémi.
Et ce n’est pas tout. En nous plongeant dans les 21 pages de ce contrat, nous avons aussi découvert que le smartphone (reconditionné !) ne lui serait envoyé qu’à sa demande expresse, et qu’il devrait réclamer « entre le 12e et le 14e mois d’adhésion » la prime de fidélité de 150 € qu’on lui a promise. Tout cela, bien sûr, le conseiller ne lui en avait pas soufflé mot… On est loin de la « communication claire et transparente » revendiquée par la SFAM.
Nos conseils
Pour ceux n’ayant pas encore obtenu gain de cause
- Épluchez vos relevés bancaires, car les prélèvements peuvent apparaître sous diverses appellations (Société française d’assurance mobile, SFAM…) et à des dates différentes.
- Résiliez votre abonnement et réclamez le remboursement des sommes prélevées indûment, par lettre recommandée avec AR, à SFAM – 1, rue Camille-Claudel, CS 10141, 26104 Romans-sur-Isère Cedex. Justifiez votre demande et joignez-y les documents nécessaires.
- Si un conseiller de la SFAM vous contacte, exigez de lire la documentation commerciale avant de souscrire une assurance. Ne vous fiez pas aux arguments avancés à l’oral.
- Plus d’informations sur SFAM - Nos astuces pour sortir de la nasse
Démarchage téléphonique
De nouvelles obligations
Sous la pression de l’UFC-Que Choisir et d’autres associations de consommateurs, assureurs et courtiers seront obligés d’adopter de nouvelles pratiques de démarchage par téléphone à compter du 1er juillet 2020 au plus tard. Ils devront :
- s’assurer que le consommateur accepte de poursuivre la conversation une fois la vocation commerciale de l’appel énoncée et le produit présenté – faute de quoi, ils seront tenus de mettre fin à l’entretien et de ne plus rappeler la personne ;
- laisser 24 heures au consommateur pour prendre connaissance de la documentation contractuelle avant de lui faire souscrire le contrat ;
- recueillir son consentement écrit, car la souscription d’un contrat à l’oral (en disant « oui » ou en répétant une phrase, par exemple) ne suffira plus ;
- vérifier que, pour un risque déjà couvert, le client a la possibilité de résilier son précédent engagement ;
- lui adresser un courrier de bienvenue l’informant notamment de son droit de rétractation ;
- autoriser la résiliation par e-mail.
L’UFC-Que Choisir continue, de son côté, d’œuvrer à ce que les victimes de la SFAM soient remboursées. Une plainte est toujours en cours.