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Ustensiles de cuisineTéflon, plastiques, silicone, mélamine… quels matériaux privilégier ?

Pour cuire sans attacher, démouler sans se fatiguer, réchauffer vite, etc., les ustensiles de cuisine et la vaisselle d’aujourd’hui sont souvent en matériaux composites. Mais, à la chaleur notamment, ces matériaux peuvent dégager des composés indésirables, nocifs pour la santé.

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Le Téflon dans tous ses états

Il y a soixante ans, le revêtement antiadhésif Téflon a conquis de nombreuses cuisines. Jusqu’à ce que l’un de ses composants, l’acide perfluoro-octanoïque (PFOA), se révèle dangereux : des études, notamment chez les rats, ont révélé un grossissement du foie, ainsi qu’une action cancérogène en cas d’exposition à haute dose ou chronique.

Le PFOA interdit depuis juillet 2020

En cuisine, des résidus de PFOA peuvent être relâchés lorsque l’ustensile est chauffé à plus de 360 °C, ce qui peut arriver si une poêle est laissée vide sur le feu, par exemple. Mais l’exposition via une telle situation est faible, et, en 2009, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a jugé le risque pour la santé du consommateur « négligeable ».

Le PFOA n’en est pas moins suspecté d’être cancérogène, immunotoxique et perturbateur endocrinien. Il est par ailleurs néfaste pour l’environnement. En 2013, l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) l’a inscrit sur sa liste des substances extrêmement préoccupantes. La fabrication et la mise sur le marché du PFOA en tant que substance sont finalement interdites dans l’Union européenne depuis le 4 juillet 2020.

Remplacé, mais par quoi ?

En réalité, les fabricants de revêtements antiadhésifs ont commencé dès 2006 à supprimer le PFOA. Et, de fait, aucune analyse réalisée par Que Choisir ou ses partenaires européens depuis 2011 sur les poêles n’a décelé sa présence.

Le PFOA a été remplacé par d’autres produits chimiques, comme les polymères GenX ou le PFBS (acide perfluorobutane sulfonique) et ses sels… dont l’innocuité pose néanmoins question : l’Echa les a eux aussi inscrits à l’été 2019 sur sa liste des substances extrêmement préoccupantes. Les rapports soutenant ces décisions indiquent en effet que les composés GenX induisent notamment des tumeurs du foie, du pancréas et des testicules chez les rats soumis à une exposition chronique, et qu’ils sont suspectés d’être toxiques pour le foie, les reins, les cellules sanguines et le système immunitaire chez l’homme. Le PFBS et ses sels seraient quant à eux toxiques en particulier pour les reins et la thyroïde.

Faut-il bannir le Téflon de la cuisine ?

Sans s’affoler outre mesure, il n’est pas extravagant d’adopter quelques précautions d’usage…

Les risques d’une exposition aux GenX et PFBS via les casseroles, poêles et autres cocottes ne sont pas encore clairement identifiés. En 2011, des tests Que Choisir sur des poêles à revêtement antiadhésif au PFOA n’avaient décelé aucun transfert de la substance aux aliments, même sur des poêles usées et chauffées longuement – ce qui est plutôt rassurant. Par mesure de précaution, il est toutefois conseillé de ne pas utiliser les récipients de cuisson rayés ou abîmés, qui sont alors susceptibles de laisser s’échapper plus facilement des substances indésirables – PFOA, GenX, aluminium…

On a un temps prôné de remplacer le Téflon par la céramique, moins endurante, mais prétendument moins dangereuse. Or ce revêtement souffre du flou entretenu par les industriels quant à sa composition : s’ils prétendent qu’il s’agit principalement de silice et de liants alcooliques, ils n’ont pas l’obligation de dévoiler la nature de leurs alliages. On ignore donc les potentiels risques pour la santé liés à ceux-ci.

Les perfluorés : des polluants persistants

Les composés perfluorés (qui couvrent les familles des PFAS, PFOS, PFBS, PFOA…) utilisés dans les revêtements antiadhésifs des ustensiles de cuisine, mais aussi dans les vestes imperméables, les chaussures, les emballages de fast-food, etc., polluent à long terme. Échappés des usines qui les ont produits, ils ont contaminé l’air, le sol et l’eau. Une étude américaine a d’ailleurs révélé que 98 % des Américains avaient des traces de PFOA dans le sang ! Dans l’environnement, comme dans le corps humain, ces composés résistent très bien à la dégradation et s’accumulent dans les plantes, les poissons…

Que penser des autres matériaux ?

Ils ont des atouts indéniables, mais attention au revêtement, à la commodité d’utilisation et… au prix.

L’aluminium et l’Inox (qui contient du nickel) demeurent les matériaux de base des poêles antiadhésives. Leur revêtement antiadhésif empêche la migration des métaux. Il est donc conseillé de ne plus utiliser les vieux récipients en aluminium ou en Inox non ou mal revêtus.

La fonte, matériau bien identifié, résistant et inrayable, a beaucoup d’atouts. Mais elle est très coûteuse (même si son incomparable longévité peut compenser l’investissement), lourde, doit être lavée sans détergent, huilée après chaque utilisation, etc. Les récipients en fonte émaillée sont plus faciles d’entretien.

Le cuivre est une autre alternative, là encore onéreuse. Mais il peut migrer, même à des doses infimes, dans les aliments. C’est pourquoi les casseroles en cuivre sont aujourd’hui recouvertes le plus souvent d’étain ou encore d’acier inoxydable. En cas de rayures, vous pouvez faire restaurer la couche d’étain ou remplacer la casserole.

Le fer et l’acier, assez sûrs et prisés des professionnels, doivent être culottés et, comme la fonte, ne supportent que l’eau. Ils sont incompatibles avec les préparations acides (tomate, citron, vin…), qui risquent d’altérer le culottage.

Plastiques et silicone : attention à la chaleur

Moules en silicone et accessoires en polyamide ont envahi nos cuisines : légers et faciles d’entretien, ils séduisent. Mais attention à les utiliser comme il faut.

Gare aux cuillères, spatules et fouets !

Dans les années 2010, on s’inquiétait de la présence d’amines aromatiques primaires (AAP), extrêmement nocives pour la santé (neurotoxicité et hématotoxicité majeures, notamment), dans certains ustensiles en Nylon de couleur noire. Fin 2011, les douanes avaient saisi plus de 55 000 ustensiles libérant des AAP interdites. Des tests Que Choisir de 2013 étaient cependant plutôt rassurants.

En septembre 2019, c’est le BfR, l’équivalent allemand de l’Anses, qui a mis en garde contre les cuillères, spatules et autres fouets en polyamide (dont fait partir le Nylon). L’institut estime que le seuil toxicologique acceptable d’ingestion des oligomères de ces polyamides est de 5 mg/kg de nourriture. Or 10 des 33 ustensiles testés par le BfR en ont relâché davantage à 70 °C.

Si vous utilisez des spatules et autres cuillères en plastique, le principe de précaution recommande de ne pas prolonger le contact des aliments avec de tels ustensiles, a fortiori à haute température (au-dessus de 70 °C). Ne les laissez donc pas chauffer dans les casseroles, marmites et poêles pendant que vos plats cuisent. Et privilégiez le bois.

Des moules à surveiller

Souples, antiadhésifs, les moules en silicone sont indiscutablement pratiques. Mais les laboratoires les ont à l’œil…

Le silicone n’est pas un plastique. C’est un polymère issu du silicium, un minerai entrant dans la composition de la silice (d’où est issu le verre). Pour qu’il acquière sa texture particulière, il faut un catalyseur : du peroxyde (bon marché) ou du platine (plus coûteux). Or :

  • le silicone peroxydé laisse migrer des composés chimiques vers les aliments à partir de 160 °C. Il est d’ailleurs interdit en Allemagne et en Suisse. En France, aucun étiquetage ne le distingue, mais il existe un moyen de le reconnaître : quand vous pincez le moule, si une marque blanche apparaît, c’est du peroxyde ;
  • le silicone au platine, lui, demeure inerte jusqu’à 250-300 °C et ne dégage aucune odeur à la cuisson (autre moyen de le distinguer).

Sous le plastique, l’amiante…

Colorées et plus légères, les Thermos en plastique ont bien des atouts pour séduire les consommateurs, notamment les plus jeunes. Un seul petit défaut : les séparateurs de la double paroi de verre intérieure peuvent contenir des fibres d’amiante. Si le flacon se brise, il y a risque d’inhalation de ces fibres, classées cancérogènes. Plusieurs produits ont ainsi été retirés du marché européen, mais attention aux achats sur Internet en provenance directe d’Asie…

En 2005, une enquête de la DGCCRF montrait que 29 % des ustensiles et récipients en silicone testés dépassaient la teneur limite autorisée (0,5 %) en matière organique volatile libre (MOVL), un ensemble de molécules chimiques peu recommandables pour la santé. Si d’autres tests, notamment de Que Choisir en 2013 et de la DGCCRF en 2016, attestaient une nette amélioration, par mesure de précaution, privilégiez le 100 % silicone platine et vérifiez la présence du « certificat de conformité à l’aptitude au contact des aliments ». Par ailleurs, la DGCCRF ayant relevé une migration plus importante à la première cuisson, il est conseillé de procéder à une première utilisation à vide, avec un peu d’huile.

Le bambou : pas si sûr…

C’est la matière en vogue, notamment concernant la vaisselle jetable, de pique-nique ou destinée aux plus jeunes. Mais, si « bambou » sonne naturel, le processus de fabrication pose problème : la fibre de bambou est réduite en poudre avant d’être agglomérée au sein des objets (assiettes, couverts…) grâce à l’ajout de mélamine-formaldéhyde. Le procédé n’étant visiblement pas toujours maîtrisé, les risques ont conduit la DGCCRF à lancer, rien qu’entre 2019 et 2020, plus d’une dizaine de rappels de produits, surtout de puériculture, présentant un « risque chimique » en raison d’une « migration de composants » sur les aliments.

Les contenants en plastique, à manier avec précaution

Pour réchauffer des aliments au micro-ondes, le contenant le plus sûr reste le verre. Le plastique peut également être utilisé, sous réserve que le contenant soit bien destiné à cet usage. Dans le cas contraire, la chaleur risque de faire migrer des composés indésirables du plastique vers la nourriture. La lecture des étiquettes et le logo « micro-ondes » sont le meilleur moyen de s’assurer que le contenant est compatible.

Un œil sur la vaisselle en mélamine

Légère, incassable (ou presque), permettant toutes les fantaisies colorées, la mélamine est un matériau très employé pour la vaisselle (assiettes, bols, mugs, coupelles, couverts…). Malheureusement, elle n’est pas aussi « inerte » qu’elle devrait l’être.

Le processus de fabrication de la mélamine intègre du formaldéhyde, substance problématique et cancérogène par inhalation. Si celui-ci est moins préoccupant par ingestion, le seuil réglementaire de migration est fixé à 15 mg/kg d’aliment.

En 2013, des tests Que Choisir sur 24 ustensiles s’étaient révélés rassurants. En revanche, une étude espagnole de 2016 sur 18 articles a conclu au dépassement de la limite dans 56 % des cas.

Un conseil : la migration étant nettement plus faible en dessous de 70 °C, veillez à ne pas chauffer les ustensiles en mélamine au-delà de cette température (donc pas au micro-ondes, notamment).

Par ailleurs, en raison de son attrait coloré et brillant, la mélamine est couramment employée pour la vaisselle destinée aux enfants, voire aux bébés. Pour les raisons évoquées, mieux vaut l’éviter à ce jeune public.


 

→ Ce texte est issu de notre livre Décrypter les produits du quotidien



 

Nolwenn Le Jannic

Nolwenn Le Jannic

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