Audrey Vaugrente
Fortes chaleursAttention aux plus fragiles
De plus en plus fréquentes, les températures caniculaires peuvent devenir mortelles pour des personnes vulnérables. En effet, plusieurs facteurs de risque s’entrecroisent, accentuant les inégalités.
La chaleur tue. La France en a brutalement pris conscience lors de la canicule de 2003, qui a provoqué 15 000 décès environ. Mais l’ensemble de la période estivale est à prendre au sérieux. « Sur la dernière décennie, les deux tiers de la surmortalité estivale sont survenus en dehors des vagues de chaleur », souligne Erwan Cordeau, de l’Institut Paris Région. Nous ne sommes pas tous exposés au même risque face à la chaleur. Pour l’évaluer, les experts considèrent 3 critères, qui interagissent : la chaleur, les facteurs de risque individuels et la capacité à y faire face. La chaleur épuise l’organisme. Mais ce sont souvent d’autres facteurs qui en aggravent l’impact. Ainsi, s’il fait très chaud mais que l’on est en bonne santé et capable d’aller dans un lieu frais, le risque restera faible. À température égale, une personne souffrant de diabète et confinée chez elle sera bien plus fragile.
Les plus exposés
Trois catégories de personnes sont plus vulnérables aux dangers de la chaleur : les enfants (avant 4 ans), les femmes enceintes et les plus âgés (après 65 ans). Le corps étant moins capable de réguler sa température, ils sont plus à risque d’épuisement lié à la chaleur ou de coup de chaleur, mais aussi de déshydratation. Les jeunes enfants et les seniors ressentent également moins la sensation de soif. Pour les seniors, ce risque est encore augmenté s’ils souffrent de perte d’autonomie, de solitude ou d’éloignement géographique, ou de comorbidités. On ne répétera jamais assez l’importance d’une hydratation en quantité suffisante et régulière, avec des sources variées (eau, infusions, aliments riches en eau…).
Aggravation avec les maladies
Certaines maladies chroniques sont susceptibles d’être aggravées par la chaleur. C’est le cas des pathologies cardiovasculaires, respiratoires ou rénales – ces fonctions étant davantage sollicitées en cas de fortes chaleurs. D’autres pathologies dégradent la capacité de l’organisme à s’adapter aux températures. Le diabète, par exemple, diminue la thermorégulation et la transpiration. L’obésité augmente la rétention de chaleur dans le corps. Enfin, des médicaments peuvent majorer les effets de la chaleur, empêcher le corps de s’y adapter ou aggraver la déshydratation. Parmi eux, les diurétiques sont les plus connus, mais de nombreux psychotropes et médicaments anticholinergiques (contre les allergies, l’incontinence urinaire…) ou les bêtabloquants comportent des risques. Faire le point avec le médecin afin de connaître ces risques et les moyens de les limiter peut être utile.
Cumul de risques dans les milieux défavorisés
Souvent oubliées, les personnes défavorisées sur le plan socio-économique sont particulièrement vulnérables aux fortes chaleurs : logement précaire, voire inexistant, isolement social ou géographique, faible accès aux espaces verts, absence de climatisation… « Leur état de santé est moins bon, leur logement mal isolé, et ils ont moins de capacités à se soustraire à la chaleur », résume Sabine Host, de l’Observatoire régional de santé. Alors qu’elles cumulent les facteurs de risque, ces personnes ont moins de marges de manœuvre. Le risque est donc à son maximum.
Pollution à l’ozone, une tueuse silencieuse
En été, un risque sanitaire supplémentaire émerge : la pollution à l’ozone. Lorsqu’il fait à la fois beau et chaud, les composés organiques volatils (COV) et les oxydes d’azote (NOx) se combinent et se transforment en ozone. « Il attaque le système respiratoire en diminuant la fonction pulmonaire et en augmentant l’inflammation dans les poumons, et aggrave le risque de survenue ou d’aggravation de l’asthme ou de la BPCO », analyse Antoine Trouche, d’Airparif. Dans les grandes villes, l’exposition à ce polluant a augmenté, malgré la baisse d’émissions de COV et de NOx. Le réchauffement climatique en est la cause directe.