
Fabrice Pouliquen
Face aux inquiétudes légitimes concernant les substances indésirables contenues dans les poêles antiadhésives en Téflon, les poêles en acier, fonte, Inox et cuivre reviennent sur le devant de la scène. Sont-elles une alternative fiable ? Poids, chauffe, adhérence… Nous avons testé 20 modèles de ces poêles.
En acier, en fonte, en Inox ou encore en cuivre… Ces poêles traditionnelles avaient pris un coup de vieux avec l’arrivée des antiadhésives, principalement en Téflon, qui ont fini par dominer le marché. Mais ces dernières contiennent pour beaucoup des PFAS, ces substances préoccupantes appelées « polluants éternels » et à la toxicité imprévisible. En mars 2024, nous en avions retrouvé dans le revêtement des 8 poêles en Téflon analysées, certes à des teneurs inférieures à la réglementation.
Tout de même, pour celles et ceux qui veulent se tenir au maximum éloignés de ces PFAS, des alternatives existent, en matériaux bruts. Nous avons testé 20 de ces poêles de cuisson, essentiellement de marques spécialisées dans les ustensiles de cuisine (Beka, Mauviel, Arthur Martin, Tefal, le Creuset…) mais aussi de distributeurs (Ikea, Auchan).
Elles se répartissent dans les 4 familles citées plus haut : acier, fonte, Inox et une alliant revêtement extérieur en cuivre et intérieur et fond de poêle Inox. Nous avons écarté les 100 % cuivre, ce matériau n’étant pas magnétique et donc incompatible avec les plaques à induction, de plus en plus répandues en cuisine.
Dans chacune de ces 4 catégories, les meilleurs modèles dépassent la note de 15/20. Une seule poêle décroche à notre classement en obtenant une appréciation globale moyenne : celle en fonte émaillée de Staub, pourtant parmi les plus chères (159 €). Elle nous a notamment déçus par sa lente montée en température (plus de 6 minutes pour atteindre 200 °C).
Toutes les autres obtiennent une bonne appréciation et s’avèrent fiables et efficaces… avec leurs forces et leurs faiblesses. En effet, disons-le tout de suite, aucune ne parvient totalement à faire oublier l’atout majeur des antiadhésives : leur adaptabilité à tous les types de cuisson.
Les poêles en acier ou en fonte, par exemple, retiennent très bien la chaleur et sont parfaites pour les cuissons longues et les plats à saisir (griller une pièce de viande par exemple). En revanche, elles sont très lourdes. Autour des 2 kg bien souvent et on grimpe même à 3,1 kg pour la Vardagen en fonte d’Ikea. Pas simple alors de sauter les pommes de terre ou de retourner des crêpes. En outre, les poignées de ces modèles en acier et en fonte ont cette fâcheuse tendance à devenir brûlantes, ce qui complique encore leur manipulation. Seules les Beka – la Nomad avec sa poignée en bois et la Stark en Inox ‒ restent froides (très bonne appréciation sur ce critère de la sécurité thermique). Pour les autres, il vous faudra investir dans des maniques.
Autre inconvénient : l’acier et la fonte n’apprécient guère les aliments acides (tomate, citron, vin blanc…). Ils altèrent le culottage, voire abîment le fond de la poêle. C’est le même problème avec le cuivre. Excellent conducteur thermique, ce matériau réagit instantanément aux variations de température. En clair : les poêles en cuivre chauffent rapidement et refroidissent aussi vite, permettant ainsi une excellente maîtrise des cuissons. Mais le cuivre s’oxyde au contact d’aliments acides et salés laissés trop longtemps sur le feu. Du vert-de-gris – une fine pellicule verte toxique en cas d’ingestion ‒ peut alors se former dans le fond. Mieux vaut sans doute laisser les 100 % cuivre aux professionnels et se rabattre sur les cuivre-Inox, au passage bien plus abordables. Enfin, la Mauviel M6S est tout de même à 312 € ! On trouve bien moins cher et tout aussi bien noté dans notre sélection.
Des quatre alternatives testées, les poêles en Inox sont les plus polyvalentes. Aucun souci d’oxydation : vous pouvez sans crainte y cuire des aliments acides. Elles sont également légères et montent rapidement en température. Seul bémol : sans culottage, ces modèles accrochent facilement. Il faut alors soit les graisser, soit bien attendre le brunissement de la viande (réaction de Maillard) avant de pouvoir la retourner sans anicroche.
L’avantage, avec ces poêles traditionnelles sans Téflon, est que vous avez tout le temps pour vous y familiariser. Très robustes, elles sont censées se transmettre de génération en génération. Certains modèles testés nous ont tout de même désappointés. La poignée de l’Ikea Vardagen en acier et celle de la 365+ en Inox ont ainsi plié lorsque nous leur avons appliqué une force de 100 newtons (N) qu’elles doivent pourtant réglementairement supporter. Trois références (la Tefal, l’Ikea 365+ et la Lagostina) se sont également légèrement déformées lorsque nous les avons fait tomber d’un plan de travail. Elles restaient tout de même utilisables.
Enfin, trois autres poêles se bombent lorsqu’elles subissent un choc thermique, typiquement en les plongeant chaudes dans de l’eau froide, cas de figure tout de même fréquent. C’est le cas de la Mauviel M6S, de l’Ikea Finmat, et de la De Buyer Affinity. Il faudrait ajouter la Mauviel M Steel dont l’acier tend aussi à se déformer au fil des cuissons. Pas si grave si vous êtes équipé d’une gazinière. En revanche, sur des plaques à induction, c’est plus embêtant.
Avec les poêles traditionnelles qui reviennent à la mode, on redécouvre une technique qui leur est liée : le culottage. Puisque ces ustensiles n’ont pas de revêtement adhésif, il va falloir le créer vous-même. Cette étape est à faire avant la première utilisation pour les poêles en fonte et en acier. Pour celles avec un fond en Inox, le culottage n’est en revanche pas nécessaire.
Le plus souvent, les fabricants fournissent un guide pour culotter leurs modèles. On trouve aussi une kyrielle de tutos en ligne. Le principe reste toujours le même : versez une petite quantité d’huile végétale – n’importe laquelle ‒ dans votre poêle et chauffez jusqu’à ce que cette pellicule fume et brunisse le fond. Laissez refroidir et épongez l’huile. Reproduisez l’opération trois fois. La couleur peut rebuter mais plus le revêtement est noir, moins la poêle accrochera.
Une autre méthode, recommandée par Ikea pour sa poêle en fonte Vardagen, consiste à placer la poêle huilée au four, à 150 °C pendant 1 h. Cette technique a cet avantage de permettre plus facilement des culottages homogènes, c’est-à-dire sur tout l’intérieur de l’ustensile, bords compris.
Quoi qu’il en soit, cette fine pellicule de graisse est à entretenir. Ces poêles sont ainsi à reculotter régulièrement. Évitez aussi de les nettoyer avec des produits abrasifs. Certains vont jusqu’à conseiller de se passer de savon. Il faut alors accepter de cuisiner dans les résidus de graisse de ses précédentes mixtures. Pas très ragoûtant.
Fabrice Pouliquen
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