Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Face à l’ampleur du nombre de consommateurs lésés par des pratiques commerciales sournoises et contestables de certains influenceurs (publicité masquée, promotion de produits dangereux, etc.), l’UFC-Que Choisir plaidait pour une véritable régulation du secteur… Après avoir assisté à une opération, essentiellement de communication, du Gouvernement sur le sujet, je ne peux que saluer le fait que les députés aient adopté de véritables mesures d’encadrement…
En effet, après une série de réunions de type « grand-messe » avec l’ensemble des acteurs, les annonces de Bruno Le Maire au sujet des influenceurs nous laissaient vraiment sur notre faim… En effet, le Ministre s’en remettait très largement à l’autorégulation. L’annonce d’un « Guide de bonne conduite » relevait ainsi plus d’un moniteur de colonie de vacances que d’un ministre… Le « Certificat de l’influence responsable » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), qui n’est, en dépit de son nom, pas une autorité de l’État mais une association de l’industrie de la publicité, n’est en aucun cas un gage d’efficacité. Regardons de plus près ce label. En 2022, seulement 55 % des publications des 500 influenceurs certifiés affichaient correctement le caractère publicitaire du contenu… Soit un résultat équivalent à celui des acteurs non certifiés (53 % des contenus publiés). Un beau certificat mité non ? De même, l’annonce de la création au sein de la DGCCRF, dont les effectifs sont en constante diminution depuis 15 ans, d’une « brigade de l’influence commerciale » est une goutte d’eau dans le désert… 15 agents pour contrôler les pratiques des 150 000 influenceurs recensés ! C’est dire l’écart entre les annonces du Gouvernement et les besoins et fortes attentes des consommateurs.
Heureusement, l’Assemblée nationale a, elle, adopté, en première lecture, une proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Plusieurs dispositions du texte sont vraiment particulièrement bienvenues comme l’interdiction de la promotion par les influenceurs de certains services (comme la chirurgie esthétique ou de certains produits financiers), l’obligation d’apposer tout au long d’un contenu une mention soulignant le caractère publicitaire du message, même si la teneur explicite du message reste à vérifier, la loi visant « une mention claire, lisible et identifiable » sans plus de précisions…
La proposition de loi rappelle par ailleurs que les règles existantes concernant la publicité s’appliquent au marketing d’influence, ce qui est une évidence vu que celui-ci a bel et bien toujours été rien d’autre que de la publicité. Quant aux mesures visant à engager les plateformes en ligne via la mise en place d’un système de signaleurs de confiance, il s’agit d’une simple redite du cadre posé par l’Union européenne dans son règlement sur les services numériques (dit règlement « DSA »).
Il n’en reste pas moins que les députés sont allés bien plus loin que les pistes gouvernementales en répondant à l’attente des consommateurs, d’un véritable encadrement, notamment pour protéger le plus jeune public. Souhaitons que les Sénateurs renforcent encore davantage le texte.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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