Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Alors que l’inflation met sous tension le budget des ménages, Bruno Le Maire a annoncé en grande pompe ce mardi avoir obtenu de la Fédération bancaire française (FBF) l’instauration d’un « bouclier sur les frais bancaires ». Cet accord constitue pourtant un cautionnement de leurs pratiques de tarification outrancières, bien en deçà d’un plafonnement légal et global pour tous des frais d’incidents que l’UFC-Que Choisir appelle de ses vœux et qui est désormais soutenu par des parlementaires de tous bords.
Dans un contexte où la cherté des frais bancaires alimente la dégradation du pouvoir d’achat, les annonces du Ministre de l’Économie pourraient prêter à sourire… si les difficultés des ménages à boucler leurs fins de mois n’allaient pas en s’aggravant. Jugez vous-même.
L’engagement négocié par le Ministre avec la profession bancaire prévoit un gel des tarifs les plus courants (cotisation carte bancaire, frais d’incidents bancaires, etc.) dans le cadre d’une hausse globale des frais limitée à 2 % en 2023. Comment s’en satisfaire alors que cette annonce vient, en réalité, sanctuariser les marges exorbitantes (86 % en moyenne) qu’elle pratique sur les 13 millions de consommateurs dont le solde du compte tombe dans le rouge au moins une fois par an ? À titre illustratif, rappelons que les frais de rejet de prélèvement (refus de la banque d’honorer pour le client une facture d’électricité, par exemple) coûtent pas moins de 20 euros par opération, un montant 17 fois plus élevé qu’en Allemagne.
Si cela n’était pas suffisant, le Ministre feint de se satisfaire d’annonces minimalistes à l’intention des plus fragiles. En effet, l’accord prévoit une baisse de 2 euros par mois des cotisations des 690 000 consommateurs équipés de l’offre spécifique dédiée à cette population, un montant très modeste en comparaison avec les 118 euros de frais d’incidents dont ils s’acquittent chaque année… et une obole quand on sait que les profits des cinq principaux groupes bancaires de l’Hexagone ont atteint plus de 30 milliards d’euros en 2021. En outre, cette négociation ne revient pas davantage sur l’inacceptable liberté laissée aux banques de définir de manière discrétionnaire les publics qu’elles jugent « fragiles » avec à la clé de nombreux clients qui se voient privés d’un plafonnement de leur frais.
L’accord négocié à Bercy a donc tout d’une mascarade. Face à l’urgence de la crise de l’inflation, je compte sur l’action déterminée des parlementaires pour faire entendre raison à l’exécutif. Alors qu’ils ont obtenu à l’occasion de la loi pouvoir d’achat la suppression des doublons de rejet de prélèvement qui grèvent indûment le budget des consommateurs de 400 millions d’euros par an, j’attends d’eux qu’ils maintiennent la pression. À cet égard, je ne peux que me réjouir qu’à l’Assemblée nationale et au Sénat, le plafonnement global des frais d’incidents bancaires pour tous, une mesure demandée de longue date par l’UFC-Que Choisir, soit désormais soutenu par des représentants de la majorité et des oppositions.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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