Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
A l’évidence, l’étude de l’UFC-Que Choisir qui a dévoilé les neuf milliards d’euros de crédits conso impayés qui engourdissent les bilans des groupes bancaires a mis dans l’embarras les établissements de crédit. L’Association des sociétés financières, qui les représente, a relayé un contre-feu réalisé à la hâte par l’un de ses préposés et c’est peu de dire qu’il n’est pas convaincant !
On ne le dira jamais assez, pour être utile, le crédit conso doit être adapté aux besoins et à la situation des ménages. Dans le cas contraire, c’est une grenade dégoupillée qui peut faire exploser leur budget. C’est pourquoi je m’indigne qu’à l’occasion de cette crise, les établissements de crédit n’aient rien trouvé de mieux que de ressusciter les publicités racoleuses qui présentent ces prêts comme étant quasiment indolores. A rebours de ces promesses, les crédits impayés sont bien réels. Jugez vous-mêmes, ils atteignent plus de 1 000 euros par ménage emprunteur à fin 2019 en France, un niveau dix fois plus élevé qu’en Allemagne.
Pour répondre à notre alerte, l’ASF, visiblement à court d’argument, se félicite que le nombre de dépôts de dossiers de surendettement soit en deçà de son niveau de l’année passée… Pour une profession supposée maîtriser la gestion des risques, une analyse aussi superficielle me sidère ! Faut-il rappeler l’étendue des mesures exceptionnelles qui ont été décidées depuis le premier confinement ? Le Gouvernement a interdit purement et simplement aux prêteurs de faire jouer leur clause de déchéance du terme, qui oblige l’emprunteur défaillant à rembourser immédiatement l’intégralité de son crédit, jusque fin juin. L’ASF passe également sous silence « les moratoires Covid-19 » accordés par ses membres à leurs clients… et dont la plupart sont arrivés à échéance en novembre.
Alors que les impayés ont été mis sous cloche depuis mars, je ne peux me résoudre à la myopie des établissements de crédit. Dès à présent, les emprunteurs doivent s’acquitter des échéances qui ont été reportées. Pire, dans un contexte où 900 000 consommateurs s’apprêtent à perdre leur emploi en 2021, les crédits conso en défaut pourraient, selon nos estimations, dépasser 12 milliards d’euros (+ 40 %) en 2021.
Il est donc urgent d’apporter aux emprunteurs en difficulté des solutions pérennes. Devant tant d’inconséquence de la part des professionnels, j’attends de l’Union européenne qu’elle intervienne pour les contraindre à proposer systématiquement aux emprunteurs une mesure de restructuration (allongement du terme, réduction du taux d’intérêt, etc.), dès le deuxième incident de remboursement.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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