Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Ce que je lis dans la presse à propos de la décision du Tribunal de grande instance de Paris sur la procédure en clauses abusives à l’encontre de Direct Energie me désole. Alors qu’il y est proclamé le succès judiciaire de Direct Energie, relayé par son PDG, c’est en réalité une victoire à la Pyrrhus !
En effet Direct Energie a modifié son contrat en cours de procédure, c’est-à-dire après l’assignation de l’UFC-Que Choisir en février 2013. Pas moins de 22 clauses que l’UFC critiquait dans son assignation sont concernées par ces modifications… sur 33 en tout ! En somme, près de 70 % des griefs de l’association contenus dans son assignation ont été entendus par Direct Energie. Reprenant une jurisprudence restrictive, le tribunal refuse de se prononcer sur ces clauses modifiées. D’ailleurs, alors que Direct Energie invoquait le caractère abusif de notre action, il est débouté sur ce point, le tribunal relevant bien «que les clauses des conditions générales de vente ont été modifiées en cours d’instance ». Direct Energie se garde bien de souligner que notre action l’a obligé à modifier ses clauses.
Par ailleurs, il faut se souvenir de la récente recommandation de la Commission des clauses abusives sur les contrats de fourniture d’énergie. Elle a considéré notamment que les clauses qui déchargent le fournisseur de facturer sur la consommation réelle au moins une fois par an, même sans faute du client, sont abusives. Pourtant le tribunal, lui, les valide ! De même, alors que le tribunal a considéré que Direct Energie n’était pas tenu de prendre en compte l’index auto-relevé du consommateur pour chaque période de facturation, la Commission, elle, l’estime abusif !
Autant de clauses qui causent de gros préjudices au consommateur. L’index basé sur des estimations fera par la suite l’objet de régularisations, malheureusement souvent pénalisantes. Surtout, cela empêche les consommateurs de pouvoir mieux adapter leurs usages pour consommer moins et mieux : doit-on rappeler que les directives européennes de 2009 imposent aux fournisseurs de facturer les clients sur leur consommation réelle à des intervalles suffisamment courts pour qu’ils maîtrisent mieux leur consommation ?
En tout état de cause le combat n’est pas terminé, ce que la presse n’a pas pris en compte -car oui, il existe plusieurs degrés de juridiction ! Les quelques clauses non modifiées en cours de procédure par Direct Energie, bien que n’ayant pas été considérées comme abusives par le juge de première instance, sont essentielles à la bonne protection des consommateurs… Il n’est donc pas à exclure, loin de là, que l’UFC-Que Choisir interjette appel. Affaire à suivre donc.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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