Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Il est des feuilletons interminables. Je pense d’abord aux Feux de l’Amour, à Plus Belle la vie, mais surtout à l’Effectivité du droit au changement d’assurance emprunteur. Et il faut croire que nos élus sont accros à une situation délétère et figée...
Alors qu’ils avaient l’occasion d’en écrire l’épilogue, en confirmant le droit à la résiliation à tout moment de ces contrats (adopté à l’Assemblée nationale quelques semaines auparavant), ils ont choisi de livrer un énième et navrant rebondissement à cette histoire, choisissant de préserver la rente des bancassureurs plutôt que de défendre la situation financière des ménages... Si les consommateurs sont las de ce feuilleton, soyez assurés que notre détermination à y apporter un point final, elle, reste intacte !
Cinq lois et six avis du Comité consultatif du secteur financier se sont empilés pour tenter de rendre enfin effective la concurrence, depuis que l’UFC-Que Choisir a dénoncé, pour la première fois, le scandale des marges exorbitantes de l’assurance emprunteur. En vain. Jugez vous-même, elle demeure toujours deux fois plus rentable que l’assurance habitation et même trois plus que l’assurance auto. Un signe qui ne trompe pas.
A cet égard, la Loi ASAP (Accélération et simplification de l’action publique) est donc une nouvelle occasion manquée pour les consommateurs. Les parlementaires ont, fièrement, instauré une simple information annuelle sur le droit à la résiliation. Il faudrait faire preuve d’une naïveté inouïe (ou d’une terrible mauvaise foi, c’est selon) pour croire que cette mesure réussira là où les précédentes ont échoué. En effet, née de tractations que les marchands de tapis ne renieraient pas, elle est déjà bien mal calibrée. D’une part, les assureurs qui devront s’y plier ne disposent matériellement pas de la date de souscription du contrat de crédit. D’autre part, le moment de l’envoi de l’information est laissé à la discrétion des professionnels… qui n’ont, bien sûr, aucun intérêt à l’envoyer en temps utile.
Comme vous le comprenez, cette nouvelle mesure ne fera pas sauter le cadenas de l’assurance emprunteur. Pour cela, la résiliation à tout moment, que l’UFC-Que Choisir promeut et défend ardemment, est l’antidote idoine. En effet, elle rend vaines les manœuvres des banques (réponses tardives, injustifiées, refus non fondés, etc.) visant à décourager voire tout simplement à retarder d’une année supplémentaire le changement de contrat… amputant au passage, en moyenne, 800 euros d’économies potentielles à l’emprunteur[1]. Son adoption dans le cadre de la Loi ASAP aurait eu le mérite de promouvoir un cadre clair et simple. Connu des consommateurs, il leur aurait permis de s’affranchir des manœuvres des professionnels en pouvant bien plus aisément réaliser, eux-mêmes, les démarches pour changer de contrat. La suite au prochain épisode… avec un « happy-end », cette fois ?
[1] Simulation réalisée pour un emprunteur de 35 ans ayant souscrit un crédit immobilier de 350 000 euros sur 22 ans. Le changement du contrat est opéré au 25ème mois de remboursement du crédit.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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