BILLET DE LA PRÉSIDENTE

Nutri-ScoreLa Ministre de l’Agriculture doit officialiser sans tarder le nouveau mode de calcul

Que c’est dur d’avoir à porter deux casquettes en même temps ! On ne sait jamais comment les faire tenir sur la tête. Laquelle faut-il mettre au-dessus ? Ou en dessous ? Annie Genevard, notre Ministre de l’Agriculture, a tranché. Entre la casquette de VRP des filières et celle de défenseure des consommateurs, elle a choisi sans hésiter le couvre-chef des industriels. Il y a quelques jours en effet, s’exprimant devant les sénateurs, la Ministre n’a pas hésité à aligner une série de contre-vérités sur le Nutri-Score au prétexte que celui-ci noterait mal certains aliments. Petit passage en revue de ces fake news :

Par exemple, le Nutri-Score serait un échec puisqu’il n’a été choisi que par sept pays sur 27 en Europe ? Sept pays certes, mais non des moindres : avec l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, le Luxembourg et les Pays-Bas, le Nutri-Score permet déjà d’informer de manière fiable et immédiate la moitié de la population de l’Union européenne. Quand on sait que la Suisse l’a également adopté et que la Finlande et l’Autriche s’y apprêtent, plutôt que d’échec, on peut vraiment parler de succès.

Le Nutri-Score serait injuste avec nos bons produits du terroir ? Encore faux ! L’étude réalisée en 2022 par l’UFC-Que Choisir sur 588 aliments traditionnels, montre que les deux tiers reçoivent des Nutri-Score favorables. Et si, certains sont mal notés, à l’instar de « nos magnifiques salaisons françaises » citées par la Ministre, ce n’est pas en raison d’un complot de nutritionnistes véganes. C’est tout simplement parce qu’ils sont particulièrement gras (22 % de graisses saturées dans le Comté cher à Madame Genevard, soit deux fois plus que dans un saucisson) ou très salés (5 % de sel dans le jambon cru, un taux à faire blêmir les cardiologues).

Mais au-delà du ridicule de ces contre-vérités faisant office de poncifs, le véritable scandale c’est l’aveu décomplexé de la Ministre de son refus de signer l’arrêté officialisant le nouveau mode de calcul du Nutri-Score. Ce nouvel algorithme, déjà mis en œuvre depuis plus d’un an par tous les autres pays ayant adopté le Nutri-Score, permet en effet de mieux distinguer l’intérêt nutritionnel des aliments transformés. Car ne nous leurrons pas, ce qui tracasse la Ministre ce ne sont pas quelques icônes du terroir qui pèsent bien peu dans notre PIB, mais les gros tonnages de produits parfaitement industriels dont les notes seront dégradées si la France adopte le nouveau calcul. Les plus grands noms de l’industrie laitière, tels que Savencia et Lactalis ont en effet clairement manifesté leur opposition au Nutri-Score. Quant à Danone, il l’a tout simplement retiré de ces boissons lactées pour éviter le nouveau score (certaines seraient passées de « B » à « D ») et ne le garde que pour les produits bien notés. La transparence nutritionnelle c’est seulement quand ça l’arrange…

Provocation ou inconscience, la Ministre s’exprimait ainsi au lendemain de la journée mondiale contre l’obésité où des chiffres alarmants ont été publiés. Un Français sur deux est en surpoids ou obèse et ces proportions continuent à progresser année après année dans toutes les classes d’âge, notamment chez les jeunes. Alors que les produits transformés représentent une part toujours plus grande dans notre alimentation, les consommateurs ont plus que jamais besoin d’un outil fiable pour identifier les aliments les plus sains. Madame Genevard, je vous rappelle que vous êtes également en charge de la protection des consommateurs et de la qualité de leur alimentation. C’est à ce titre que je vous demande de signer sans délai et sans modification, l’arrêté officialisant le nouveau Nutri-Score. Il n’est pas compréhensible ni admissible que le pays ayant fondé le Nutri-Score, soit le seul à ne pas avoir adopté le nouvel algorithme.

Marie-Amandine Stévenin

Marie-Amandine Stévenin

Présidente de l'UFC-Que Choisir

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