Fabienne Maleysson
Vols intérieurs courtsUn décret qui ne change rien
Le ministère des Transports communique sur l’interdiction de certains vols intérieurs en cas d’alternative suffisante en train, mais cette mesure, qui ne concerne que trois liaisons, était déjà effective. Explications.
C’était une des mesures de la loi Climat et résilience, adoptée le 22 août 2021 pour lutter contre le dérèglement climatique : les vols intérieurs pour lesquels existe une alternative en train d’une durée inférieure à 2 h 30, sans correspondance et pluriquotidienne devaient être interdits. Mais l’application de la loi était suspendue à la publication d’un décret d’application précisant ce qui devait être considéré comme une alternative satisfaisante. Publié le 23 mai, ce texte ne change rien, concrètement, aux autorisations d’exploitation.
Car Air France, principale compagnie à opérer des vols intérieurs, en avait supprimé trois dès 2020 : ceux reliant Orly à Lyon, Nantes et Bordeaux. C’était une des conditions de l’octroi des aides d’État dans le cadre de la crise du Covid-19. Depuis, elle ne les a pas réactivés.
Nombreuses exceptions
D’autres liaisons auraient pu être concernées par l’interdiction : celle entre Roissy-Charles-de-Gaulle et Lyon et celle entre Lyon et Marseille. Elles continueront pourtant à être exploitées, pour des raisons différentes. La première parce que Roissy est un hub, une plaque tournante. Nombre de passagers s’y rendent pour emprunter une correspondance. Or la loi prévoit une dérogation lorsque les vols en correspondance sont majoritaires. Chez Air France, on explique (sans surprise) que c’est une exception pertinente car les voyageurs provinciaux pourraient être tentés d’emprunter d’autres hubs européens. Par exemple, pour aller de Lyon à New-York, décider de passer par Londres plutôt que Roissy.
Le cas du vol Lyon-Marseille est différent. Justification du ministère des Transports : « Il n'y a pas assez de trains disponibles entre ces deux villes. » La SNCF en propose pourtant un par heure voire davantage. Mais le décret, qui prévoit laconiquement que « les fréquences doivent être suffisantes et les horaires appropriés », laisse une large latitude au gouvernement pour décider des contours de l’alternative ferroviaire acceptable.
2 h 30, 3 h, 4 h ?
D’autres vols intérieurs subsistent (de Roissy à Bordeaux, d’Orly à Toulouse, de Marseille à Toulouse, etc.) tout simplement parce que les trajets en train durent plus de 2 h 30. Il faut ainsi un peu plus de 3 h pour rejoindre Marseille depuis Paris. Interviewé sur France info le 25 mai, Clément Beaune, le ministre délégué aux Transports, n’a pas exclu de faire évoluer la loi en prévoyant par exemple qu’une liaison ferroviaire de 3 h puisse être considérée comme une alternative. La Convention citoyenne pour le climat avait, elle, fixé à 4 h le seuil acceptable.
Le ministre a promis d’aller plus loin, notamment en travaillant à l’amélioration des offres ferroviaires entre les métropoles. Deux fois par an, à chaque nouvelle saison aéronautique (la saison d’été de fin mars à fin octobre et la saison d’hiver le reste de l’année), le gouvernement déterminera quelles sont les liaisons aériennes concernées par l’interdiction.
À rebours de ces bonnes intentions écologiques, la compagnie low cost espagnole Vueling a annoncé l’ouverture d’une liaison Toulouse-Barcelone. Le trajet direct en TGV entre ces deux villes n’est plus proposé depuis fin 2021.