Yves Martin
Voitures électriquesLa taxe plane
À l’usage, la voiture électrique, en plus d’être propre, permet de rouler bon marché : environ 100 km pour 1 €. Imbattable, car l’électricité n’est pas taxée comme un « carburant » classique. Mais jusqu’à quand ?
Impossible de parler d’automobile sans évoquer la voiture électrique (voir notre vidéo). Axe de communication des grands constructeurs, système de location en libre-service (Autolib’) bientôt accessible, flotte de véhicules d’entreprises, la voiture électrique est aussi dans tous les projets de la mobilité moderne. C’est en effet elle qui doit sauver la planète, permettre de libérer les centres-villes de ces « pollueurs » de moteurs thermiques, qu’ils soient à essence ou, pire, diesel. À tel point que, selon les estimations, elle devrait représenter pas moins de 1,5 million de modèles en France d’ici 2020. La planète va y gagner. L’automobiliste peut-être aussi. Car, si on oublie son prix d’achat encore exorbitant, la voiture électrique permet de rouler une centaine de kilomètres avec un seul euro (sur une base d’environ 8 centimes le kilowattheure en heures creuses). On roule donc propre et pas cher.
De la TIPP à la TICPE
Mais voilà qu’un problème se soulève avec le manque à gagner pour les finances de l’État. En effet, ces 1,5 million de voitures électriques remplaceront autant de modèles traditionnels qui avalent du carburant liquide et qui rapportent pas moins de 1,2 milliard d’euros à l’État tout les ans grâce à la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP)1. Cette taxe qui, comme son nom l’indique, est actuellement prélevée sur chaque goutte de carburant qui entre dans les réservoirs. Mais, là où le bât blesse, c’est que l’électricité n’est pas un produit pétrolier. Le gouvernement a donc discrètement changé cette TIPP en une nouvelle TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques). Il est donc désormais, légalement parlant, possible de taxer tout type d’énergie servant à faire avancer une voiture. Y compris l’électricité. Reste à connaître la consommation exacte de chaque modèle. Qu’à cela ne tienne. Un groupe de travail franco-allemand, sous l’égide du BNA (Bureau de normalisation automobile) et de l’UTE (Union technique de l’électricité), travaille à mettre au point une prise de courant spécifique pour recharger les voitures électriques. Elle serait dédiée uniquement à la recharge des voitures électriques (ou des hybrides rechargeables), de par sa forme spécifique et la puissance de courant qu’elle délivrerait.
Nouvelle source de revenus
Cette nouvelle prise serait même « intelligente » et capable de communiquer avec le système électrique de la voiture, pour en connaître l’état de charge (donc le besoin exact en énergie et en temps de charge) et le réseau de distribution de courant. Associez à cela un nouveau compteur communiquant (comme le Linky d’EDF, en cours d’installation) et le tour est joué : il est possible de connaître la quantité exacte d’électricité qui a été nécessaire à la recharge des batteries. Et donc d’appliquer un tarif adapté et de le taxer. Si, aujourd’hui, rien n’est encore clairement défini, il y a fort à parier que le gouvernement ne fera pas, ou ne désirera pas faire, l’impasse sur cette nouvelle source de revenus. Cela sera bien évidemment au détriment de la voiture électrique qui, déjà chère à l’achat, deviendra alors chère à l’usage.
1. Selon l’étude « Le budget 2010 de l’automobiliste français » réalisé par l’Automobile Club (lire notre actu), le total des taxes liées à l’automobiles a rapporté 60 milliards d’euros à l’État en 2010, dont plus de la moitié grâce à la seule TIPP (33 milliards).