Yves Martin
Voitures électriquesDes chiffres à nuancer
La voiture électrique risque de faire partie du paysage automobile de demain avec, au cœur du débat, une autonomie souvent jugée trop juste. Est-ce la raison pour laquelle les constructeurs annoncent des chiffres quelque peu éloignés de la réalité ?
Il n’est pas question de remettre en cause le bien-fondé de la voiture électrique, sous réserve toutefois que la production de courant nécessaire à la recharge des batteries soit, elle aussi, écologique. En revanche, impossible de réfuter le défaut majeur de ce mode de propulsion : une autonomie trop juste. De leur côté, les constructeurs embellissent les choses en annonçant des chiffres peu représentatifs de la réalité. En effet, Citroën prédit « environ » 130 km d’autonomie à sa future C-Zéro (distance équivalente pour ses sœurs jumelles Mitsubishi I-Miev et Peugeot Ion), Bolloré affiche 135 km d’autonomie pour sa Bluecar, Mini annonce 168 km dans des « conditions de conduite normales » et Renault promet 100 km au volant de la Twizy avant de recharger les batteries.
En réalité, lorsque les conditions de circulation ne sont pas optimales, et les cas de conduite « anormale » sont plus que fréquents, la distance maximale à parcourir est d’au moins un tiers inférieure aux valeurs annoncées. Aujourd’hui, seul le constructeur japonais Nissan semble vouloir jouer la transparence et temporise sur son site Internet américain avec une approche qui colle plus à la réalité 1. Ainsi, s’il annonce (comme c’est le cas en France) une autonomie de 160 km pour sa Leaf (livrée dès décembre aux États-Unis et au Japon puis à partir de 2011 en Europe), on apprend que cette valeur correspond à une moyenne. Dans le détail, selon les conditions d’utilisation de la voiture, la distance maximale que l’on peut couvrir passe du simple au double. Un exposé qui met au jour les deux ennemis jurés de la voiture électrique : le froid et les côtes.
Les différents scénarii
L’autonomie d’une voiture électrique dépend de nombreux facteurs comme la vitesse, le type de conduite (sportive ou douce), les conditions climatiques, le profil de la route… Au final, la distance parcourue passe purement et simplement du simple au double. Démonstration.
Conditions idéales de circulation :
Autonomie : 222 km
Vitesse moyenne : 61 km/h
Température : 20 °C
Climatisation : non utilisée
En roulant sur une route plane, à une vitesse moyenne de 61 km/h, la résistance aérodynamique n’est pas trop importante et le déplacement demande un minimum d’énergie. La température extérieure clémente n’impose pas l’utilisation de la climatisation ni du chauffage, ce qui augmente d’autant l’autonomie qui atteint les 222 km.
Trajet urbain fluide
Autonomie : 169 km
Vitesse moyenne : 38 km/h
Température : 22 °C
Climatisation : non utilisée
La vitesse moyenne dans ce scénario est de 38 km/h, ce qui correspond à une circulation urbaine sans embouteillage. La climatisation n’étant pas en service et la vitesse peu élevée, l’autonomie est préservée.
Trajet sur route/autoroute en été
Autonomie : 112 km
Vitesse moyenne : 90 km/h
Température : 35 °C
Climatisation : utilisée
Le besoin en énergie nécessaire pour vaincre la résistance au roulement et refroidir l’habitacle a raison de l’autonomie.
Trajet interurbain en été
Autonomie : 109 km
Vitesse moyenne : 79 km/h
Température : 43 °C
Climatisation : utilisée
Venir d’une zone rurale pour rejoindre le centre-ville par forte chaleur limite l’autonomie.
Trajet urbain en hiver
Autonomie : 100 km
Vitesse moyenne : 24 km/h
Température : –10 °C
Chauffage : utilisé
Bien que la vitesse moyenne soit peu élevée, le besoin en chauffage grève fortement l’autonomie. Il faut toutefois signaler que, dans ces conditions difficiles, il faudra tout de même 4 heures avant de décharger totalement les batteries.
1. Les informations sont disponibles sur le site de Nissan USA à l’adresse : http://www.nissanusa.com/leaf-electric-car/index#/leaf-electric-car/range-disclaimer/index (en anglais)