Camille Gruhier
Premières impressions
Moustache entretenait le suspense depuis des semaines autour de son nouveau vélo électrique, baptisé J. Ce vélo signe un virage pour le fabricant vosgien, qui propose un cadre sans soudure 100 % fabriqué en France. Le J innove aussi par sa conception tout-suspendu articulée autour d’un pivot central qui promet un confort inégalé. Ajoutez à cela ce qui se fait de mieux côté composants (transmission par courroie, changement de vitesse à variation continue, fonctions connectées, etc.) et vous obtiendrez un vélo électrique vendu dans 3 déclinaisons (J On, J All, J Off) à partir de… 5 199 €. Nos premières impressions après quelques jours de prise en main.
Le fabricant de vélos électriques Moustache n’est pas connu pour ses petits prix. C’est d’ailleurs ce qui explique la sous-représentation de cette marque dans notre test de vélos électriques : nous préférons concentrer nos essais sur des vélos accessibles au plus grand nombre. Le fabricant vosgien s’illustre de nouveau avec sa nouvelle gamme de vélos, la gamme J, lancée le 6 septembre et vendue à partir de 5 199 €. C’est très cher.
Mais il s’agit de vélos ultra haut de gamme, qui présentent une conception innovante et révèlent l’un des rares cadres, si ce n’est le seul, 100 % fabriqué en France. « Il est coulé à Vitrolles dans les Bouches-du-Rhône, usiné à Poligny dans le Jura, puis thermolaqué à Schirmeck en Alsace, déroule fièrement Clément Bonneau, le responsable de la communication. L’assemblage des 2 parties du cadre puis le montage du vélo complet se font entièrement dans nos ateliers à Thaon-les-Vosges, juste à côté d’Épinal. » Quant à l’aluminium qui constitue le cadre, il provient de fournisseurs français et italien. Les autres composants, des éléments de transmission aux freins et du moteur aux roues, sont majoritairement asiatiques. Pas le choix pour Moustache ni pour les autres fabricants de vélos, la France ayant perdu quasiment tout savoir-faire industriel dans le domaine.
Moustache J On, J All ou J Off : à chacun son usage
Ce qui explique le prix du vélo, au-delà de sa fabrication française, c’est bien sûr le choix des composants des 3 déclinaisons : le J On, le J All et le J Off. Le premier cible les urbains, le deuxième se veut polyvalent, le dernier est un VTT qui s’adresse aux sportifs. Les différences découlent de choix très techniques liés à l’usage du vélo (débattement de la fourche, taille des roues, type de pneus, présence d’un porte-bagage, etc.). Mais tous disposent de freins à disque hydrauliques et d’une motorisation Bosch Performance Line de dernière génération (couple de 75 Nm) avec afficheur Kiox 500. Nous avons pris en main le J All quelques jours.
Un premier coup d’œil révèle un vélo assez massif, porté par de grandes roues à gros pneus (des Schwalbe Johnny Watts 27,5 x 2,6), piloté via un large guidon. Ce qui frappe aussi, c’est ce cadre surprenant, qui semble défier les lois de la gravité : seuls un pivot central et une suspension assurent l’équilibre de la bête. L’imposant porte-bagage (une option à 200 €) est suspendu lui aussi. Un enfant transporté dans un siège-bébé profitera ainsi du confort de la suspension. Du côté du guidon, les couleurs du spacieux afficheur Kiox 500 attirent tout de suite le regard, entouré à droite par la manette de changement de vitesses, à gauche par la centrale de commande Bosch LED Remote et une petite gâchette mystérieuse... qui va s’avérer très pratique.
Confort
Il s’agit en effet d’une commande venue de l’univers des VTT, où le cycliste adopte des positions très différentes en montée et en descente de pistes, avec pour conséquence la nécessité de moduler la hauteur de la selle. C’est précisément à ça que sert cette manette. En ville ou en balade, varier la hauteur de la selle vous permettra de gagner en stabilité à l’arrêt (en posant les deux pieds à plat au sol) et en agilité lors du pédalage (en optimisant la position avec jambe à peine fléchie lorsque le talon frôle la pédale). Un point de confort incontestable.
Le cadre ouvert du J All, qui permet de monter dessus facilement, en est un autre. Les pneus très larges absorbent quant à eux les irrégularités du sol, bitume ou sentier. Soulignons également le moteur totalement silencieux, particularité de la deuxième génération des Bosch Performance Line (avec le couple, passé de 65 à 75 Nm).
Pilotage
Côté pilotage, l’excellente visibilité de l’afficheur Kiox 500 est un plus. Quatre modes d’assistance sont proposés, qui arborent chacun une couleur différente, répétée sur la commande LED Remote : impossible d’oublier le mode sélectionné ! L’afficheur présente plusieurs écrans, qui renseignent sur le niveau de la batterie, les kilomètres parcourus lors du dernier trajet et au total, les temps de parcours, etc. Un peu comme dans une voiture, le système intelligent vous avertira par ailleurs si votre pédalage est inadapté au mode d’assistance choisi. Il faudra alors changer de vitesse en pivotant la commande de droite, qui actionne un moyeu de vitesses à variation continue : contrairement à des vitesses classiques, les vitesses sont progressives, sans rupture, comme s’il y en avait un nombre infini entre la première et la dernière. Ce type de transmission est très confortable et ne nécessite quasiment aucun entretien. Et la courroie en carbone préférée par Moustache à une chaîne efface tout risque de dérailler.
Batterie
Le cadre innovant du J All accueille un emplacement pour la batterie. Moustache propose deux versions, l’une de 500 Wh, l’autre de 625 Wh, pour 200 € de plus. On peut raisonnablement espérer une bonne, voire une très bonne autonomie. D’après nos tests, réalisés par des panélistes de 75 à 80 kg sur un parcours varié avec l’assistance maximale, les vélos équipés d’une batterie de 500 Wh offrent généralement entre 60 et 80 km d’autonomie.
Signe que ce vélo haut de gamme cible les utilisateurs dont les temps de trajet sont longs (d’où l’importance donnée au confort), Moustache propose d’ajouter 250 Wh d’autonomie avec une batterie additionnelle (Bosch PowerMore) à fixer sur le cadre. Comptez 450 € supplémentaires (disponible à partir de novembre 2023). Concernant la batterie principale, parfaitement intégrée, on regrette quand même que le cache nous reste dans les mains quand on doit l’extraire du cadre pour la recharger. De plus, ce cache n’est pas protégé, donc facile à voler. D’autres fabricants l’ont fixé à la batterie pour les solidariser, ce qui est plus confortable à l’usage.
Application mobile
L’équipement Bosch (commande LED Remote et afficheur Kiox) connectent le Moustache J à l’application mobile eBike Flow. État de la batterie, autonomie restante, distance parcourue, suivi de l’activité… Cette appli reprend les classiques des habituelles applis liées aux vélos connectés. Elle permet aussi de personnaliser chaque mode d’assistance et surtout d’apporter au vélo toutes les mises à jour disponibles, qu’il s’agisse de nouvelles fonctions ou de mises à jour opérationnelles pour le moteur ou la batterie. Sans connexion, ces opérations doivent être régulièrement réalisées par un professionnel, qui les facture entre 20 et 30 €.
L’appli Flow intègre aussi une protection antivol avec les fonctions eBike Lock et eBike Alarm. La première permet de bloquer le démarrage du moteur (on le déverrouille via l’application) grâce à un tracker GPS intégré au cadre ; la seconde permet de géolocaliser le vélo et sonne en cas de vol. Mais pour en profiter, il est indispensable de souscrire au service Flow+, gratuit pendant 12 mois puis facturé 4,99 €/mois ou 39,99 €/an.
Un porte-smartphone vendu en option (50 €) permet de remplacer l’afficheur Kiox par son smartphone, qui offre alors une navigation confortable, donne les données du trajet et toutes les statistiques en temps réel.
Le Moustache J All en résumé
Grâce à son amortisseur central et à sa conception centrée autour d’un pivot, le Moustache J All avale les trous, les bosses, les pavés et les dos d’âne sans sourciller. En fait, ce vélo est d’un confort hallucinant, qui séduira forcément les utilisateurs dont les temps de trajet sont longs. Son niveau d’équipement (vitesses continues intégrées au moyeu, courroie carbone) laisse présager un entretien réduit. Le système de freinage (circuit hydraulique, plaquettes, disques) sera le seul à faire vérifier régulièrement. Même les mises à jour logicielles de moteur et de la batterie sont automatiques ! Ce vélo électrique très perfectionné et innovant est incontestablement une réussite. Mais à 5 199 € sans les différentes options, il est hors de portée de nombreux budgets. Les deux autres versions sont vendues encore plus cher : le J Off (VTT) démarre à 5 699 € et le J On (urbain) à 5 999 €.