Anne-Sophie Stamane
Une victime définitivement déboutée
Depuis 8 ans, la famille de Jack X. se battait pour faire reconnaître par la justice la responsabilité d’un vaccin contre l’hépatite B dans la sclérose en plaques qu’il avait déclarée. La Cour de cassation vient de trancher définitivement en défaveur du patient.
Le vaccin contre l’hépatite B a-t-il provoqué la sclérose en plaques (SEP) qu’a déclarée, en août 1999, soit 1 mois après sa dernière injection, Jack X., aujourd’hui décédé ? La Cour de cassation vient de trancher en rejetant le pourvoi de la famille et en confirmant l’arrêt rendu le 7 mars 2014 par la cour d’appel de Paris, qui ne voyait pas de lien suffisant entre la vaccination et la SEP. Ce rejet vient clore définitivement le parcours judiciaire que cet homme et sa famille ont entamé en 2009.
En juin dernier, pourtant, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), saisie d’une question préjudicielle sur ce cas précis, avait rendu un arrêt laissant un espoir de voir le vaccin reconnu comme la cause de son état de santé. Elle avait en effet autorisé les juges nationaux à se passer de preuves scientifiques irréfutables et à se baser sur un faisceau « d’indices graves, précis et concordants » pour statuer sur la causalité, celle-ci pouvant suffire à conclure au défaut du vaccin, et donc à la responsabilité du laboratoire.
Toutefois, si l’arrêt de la CJUE n’a pas suffi dans ce dossier pour renverser la décision initiale du juge de la cour d’appel de Paris, son raisonnement reste valable pour d’autres situations. Il pourra donc être invoqué devant les tribunaux, laissant ainsi l’opportunité aux juges d’assouplir leur interprétation d’un droit européen qui, tel qu’il est écrit et appliqué jusque-là, reste très défavorable aux victimes d’effets indésirables de médicaments ou de vaccins. En clair, le rôle du vaccin contre l’hépatite B dans la SEP n’est toujours pas tranché, ni dans un sens, ni dans l’autre. Faute de preuves scientifiques, les juges pourront bel et bien examiner les circonstances de survenue de la maladie.
8 ans de combat
Le dossier Jack X. commence en septembre 2009 par une décision du tribunal de grande instance de Nanterre, qui estime que le vaccin est bien la cause de la SEP et que le laboratoire Sanofi doit être tenu pour responsable de son état de santé. Mais en 2011, la cour d’appel de Versailles infirme le jugement. Elle exonère le laboratoire Sanofi de toute responsabilité, tout en reconnaissant un lien de causalité entre le vaccin et la maladie. La famille de la victime, entre-temps décédée, se pourvoit en cassation. En septembre 2012, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Paris. Celle-ci juge en mars 2014 que l’imputabilité du vaccin n’est pas suffisamment étayée. La famille se pourvoit de nouveau en cassation. Cette fois, la Cour renvoie le cas devant la CJUE, demandant si des présomptions graves, précises et concordantes peuvent suffire à prouver le défaut du vaccin. En juin 2017, la CJUE répond favorablement. Pour autant, la Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel de Paris.