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TéléviseursDes promos en toc dans les prospectus

Les grands événements sportifs génèrent traditionnellement un pic de vente de téléviseurs. Cette période est donc très importante pour les distributeurs, qui affichent de belles promotions dans leurs catalogues publicitaires. Nous avons profité de la Coupe du monde de foot, qui se déroule actuellement, pour décortiquer les offres proposées dans les catalogues de trois enseignes spécialisées (But, Conforama et Boulanger) et cinq grandes surfaces (Auchan, Leclerc, Carrefour, Géant et Hyper U). Résultat : les promotions sont, pour la grande majorité d’entre elles, purement fantaisistes. Démonstration.

Feuilleter les catalogues promotionnels dont débordent nos boîtes aux lettres met des étoiles plein les yeux. 200 € de réduction par-ci, 800 € de réduction par-là… Les promotions affichées sur le prix des téléviseurs peuvent être spectaculaires. Problème : ces réductions sont rarement réelles. Pour le démontrer, nous avons analysé les promotions affichées sur des dizaines de téléviseurs dans les catalogues de huit enseignes (voir encadré « Comment nous avons procédé »). La période de validité de ces offres était variable (du début du mois de mai à la fin du mois de juin, voir encadré), mais toutes englobaient le 14 juin, jour de l’ouverture de la Coupe du monde de foot en Russie. Le résultat est sans appel : seules 7 promotions sur 37 analysées sont de vraies bonnes affaires.

Lors de notre analyse, nous avons rencontré plusieurs cas de figure. Le premier est très clair : le tarif de référence, c’est-à-dire le prix barré, n’a jamais été pratiqué par l’enseigne ni par un autre commerçant. Il s’agit donc purement et simplement d’une fausse promotion. Dans le deuxième cas de figure, le tarif de référence a effectivement été pratiqué, parfois très ponctuellement, mais on trouvait alors déjà le même produit bien moins cher ailleurs. Il s’agit bien alors d’une fausse bonne affaire. Voici quelques-uns des exemples que nous avons repérés.

Thomson 65UC6586 chez But

  • Prix de référence : 1 199 €
  • Réduction : 300 €
  • Prix promotionnel : 899 €

 Dans son catalogue valable du 2 mai au 18 juin, But proposait, entre autres téléviseurs, le Thomson 65UC6586, un modèle connecté, 4K au design incurvé, au prix de 899 € au lieu de 1 199 €, soit une promotion de 300 €. Mais le distributeur n’a jamais pratiqué ce tarif au cours des 60 jours précédant le début de l’offre. Pire, le téléviseur n’était même pas vendu du tout dans ses magasins : cette référence n’apparaît dans notre outil d’analyse des prix du marché qu’au début du mois de mai. C’est-à-dire spécifiquement pour répondre à la demande générée par le catalogue… Le distributeur assure que « le prix de référence annoncé dans le dépliant est bien le prix rentré dans les systèmes d’information But ». Et qu’il a bien été pratiqué dans le mois précédant l’opération. Nous avons pourtant recensé plusieurs téléviseurs dans ce cas. Ainsi en va-t-il du Panasonic TX32E200E, du Aya A39FHD3918, du Polaroïd TVB55R4P ou encore du Polaroïd TVB55R4P. Mais nous avons rencontré ce type de fausses promotions chez tous les distributeurs dont nous avons analysé le catalogue.

Samsung UE55MU7045 chez Conforama

  • Prix de référence : 1 199 €
  • Réduction : 200 €
  • Prix promotionnel : 999 €

Nous avons débusqué plusieurs promotions douteuses chez Conforama, présentées dans son catalogue valable du 22 mai au 18 juin. Deux fausses promotions, d’abord : le distributeur proposait le Toshiba 43L3733DG et le TCL U55P6006 avec une réduction de 100 € par rapport à leur prix de référence (399 et 499 € respectivement), mais l’enseigne n’a pas vendu les téléviseurs à ces tarifs au cours des 60 jours précédant la promotion.

Nous avons également repéré ce qui s’apparenterait plutôt à une fausse bonne affaire. La promotion concerne cette fois le Samsung UE55MU7045, présenté à 1 199 € avec une réduction de 200 €. Conforama a effectivement vendu cet écran au prix de 1 199 € avant la période de promotion (du 11 au 21 mai précisément), mais il le vendait moins cher quelques jours avant ! Ainsi, le même téléviseur coûtait 1 113,71 € au début du mois de mai, et 999 € (soit le prix prétendument réduit…) dès le 20 avril.

LG 65B7 chez Boulanger

  • Prix de référence : 3 490 €
  • Réduction : 800 €
  • Prix promotionnel : 2 690 €

À 2 690 € au lieu de 3 490 €, le LG 65B7 ne se refuse pas ! La belle affaire… Au même moment, ce téléviseur est vendu encore moins cher, 2 309 € précisément, chez Amazon. Ubaldi et CDiscount le proposent aussi au prix de 2 519 €. Ajoutez à cela que certes, Boulanger a bien vendu cet écran au prix de 3 490 € durant plusieurs semaines avant la période de validité du catalogue (14 mai - 26 juin), ce qui l’autorise à barrer ce prix de référence. Mais ce téléviseur était déjà vendu moins cher chez plusieurs enseignes concurrentes (de 2 500 à 2 759 € chez CDiscount, de 2 489 à 2 469 € chez Amazon, et même 3 049 € chez Darty). Plusieurs téléviseurs présentés dans le catalogue de Boulanger sont dans ce cas (notamment le Sony KD55XE9005 et le Philips 50pus6162).

Des « prix bataillés » sur Internet

Nous avons bien sûr contacté les enseignes concernées. Certaines n’ont pas jugé utile de nous répondre. Les autres assurent qu’elles sont droites dans leurs bottes. Il faut dire que la réglementation sur les prix barrés, en vigueur depuis 2015, leur laisse une grande marge de manœuvre (lire encadré). « Les modalités d’une annonce de réduction de prix relèvent de la libre appréciation du vendeur, la seule condition de validité étant que l’annonce ne constitue pas une pratique commerciale déloyale », rappelle Carrefour, qui « tient à la disposition des autorités (DGCCRF) l’ensemble des justificatifs attestant de la réalité et de la loyauté des prix de référence ». Conforama, de son côté, nous a simplement indiqué que « le prix de référence mentionné dans ses catalogues était le prix auquel le produit a été vendu à l’ensemble de sa clientèle au cours des 14 jours au moins précédant la promotion ». Quant à Hyper U, l’enseigne admet qu’elle base ses prix de référence sur ceux pratiqués sur le marché, y compris chez les concurrents, et non dans ses seuls rayons. Reste que les prix réduits se révèlent supérieurs à ceux que l’on peut trouver sur Internet... L’enseigne explique qu’elle ne peut pas rivaliser avec ces « prix bataillés » et n’en tient pas compte pour fixer ses prix de référence.

Des prospectus qui coûtent cher

Bien que cette analyse de prospectus soit concentrée sur les téléviseurs, elle ne présage rien de bon pour l’intérêt réel des promotions présentées dans les catalogues sur toutes les autres familles de produits : mieux vaut ne pas leur accorder une confiance aveugle, voire cesser, tout simplement, de les consulter. D’autant que ces prospectus, dont nos boîtes aux lettres sont pleines à ras bord, coûtent cher aux consommateurs. Non seulement les enseignes répercutent leurs coûts dans le prix des produits, mais il faut aussi tenir compte des coûts de collecte et de traitement des déchets qu’ils occasionnent, et dont le contribuable s’acquitte à travers la taxe d’ordures ménagères (726 840 tonnes de prospectus en 2016). Une enquête de l’UFC-Que Choisir prouve l’efficacité des autocollants « Stop Pub » apposés sur les boîtes aux lettres. Pour vous en procurer, rendez-vous dans l’association locale UFC-Que Choisir la plus proche de chez vous !

Nos autocollants Stop Pub sont disponibles auprès des associations locales de l’UFC-Que Choisir.

Que dit la loi ?

Depuis mars 2015, les prix barrés n’ont plus grande signification. En transposant dans la loi française une directive européenne de 2005, le ministère de l’Économie a beaucoup assoupli les obligations des distributeurs, au détriment de la protection des consommateurs. Jusqu’à cette date, l’enseigne devait avoir pratiqué le prix barré dans ses boutiques ou sur son site Internet au cours du mois précédant le début de la publicité. La réglementation applicable depuis 2015 prévoit simplement que l’annonce de réduction doit préciser le prix réduit annoncé et le prix de référence déterminé par l’annonceur, et que l’enseigne doit pouvoir prouver la réalité du prix de référence. Aucune précision sur le type de preuve ni sur la durée de vente au prix de référence… Rien n’oblige non plus le distributeur à avoir pratiqué lui-même ce prix de référence ! 

Comment nous avons procédé

Nous avons analysé 37 promotions pour des télévisions mises en avant dans les prospectus Spécial Coupe du Monde de 5 chaînes de grandes surfaces alimentaires (Auchan, Carrefour, Géant-Casino, Hyper U, Leclerc) et 3 enseignes de grandes surfaces spécialisées (Boulanger, But, Conforama). Les prix ont été comparés à ceux relevés pendant les 8 semaines précédant la période de validité des catalogues sur 24 des principaux sites marchands.

Période de validité des catalogues analysés

But

02/05/2018

18/06/2018

Conforama

22/05/2018

18/06/2018

Boulanger

14/05/2018

26/06/2018

Auchan

30/05/2018

16/06/2018

Leclerc

05/06/2018

16/06/2018

Carrefour

12/06/2018

25/06/2018

Géant

05/06/2018

17/06/2018

Hyper U

05/06/2018

16/06/2018

Camille Gruhier

Camille Gruhier

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