Camille Gruhier
TéléchargementOrange opportuniste
L'Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet) n'a toujours pas envoyé ses premiers courriers de mise en garde mais, fondée ou pas, la crainte des internautes est installée. Orange en profite pour proposer un logiciel de sécurisation facturé 2 euros par mois. Lequel ne protège, en fait, pas de grand-chose.
En autorisant les ayants droit à collecter les adresses IP des internautes, il y a quelques jours, la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés) a donné le coup d'envoi à l'Hadopi. Ne manque que la publication au « Journal officiel » des derniers décrets pour que l'Autorité envoie aux internautes ses premiers courriels de mise en garde contre les téléchargements illégaux. C'est dans ce climat de tension, où chacun, même innocent, se sent présumé coupable, qu'Orange a lancé en toute discrétion une offre de « Contrôle du téléchargement ». Pour 2 euros par mois, l'opérateur propose à ses clients de protéger un à trois ordinateurs en bloquant l'accès aux logiciels d'échange de fichier P2P les plus courants. Orange est maître de la liste, qu'il refuse d'ailleurs de communiquer.
D'autres méthodes de téléchargement
Seulement voilà, derrière ses airs protecteurs et son tarif trop attrayant pour être refusé sans scrupules, ce logiciel ne sert pas à grand-chose. D'abord parce qu'il n'évite pas les téléchargements illégaux : bloquer les solutions P2P n'arrêtera pas les pirates qui téléchargent par d'autres canaux et d'autres méthodes (Rapidshare, VPN, streaming...), désormais largement répandus. C'est un peu comme chercher à couper l'accès à l'Arc de Triomphe en ne fermant que l'avenue des Champs-Élysées ! Ensuite, la loi « antipirates » ne punit pas le téléchargement illégal stricto sensu. Les internautes interpellés seront en fait pris pour défaut de sécurisation de leur connexion Internet. Or le logiciel de sécurisation d'Orange ne garantit rien : en cas de litige, il sera difficile de se retourner contre l'opérateur ou Nordnet (l'éditeur de la solution). Les conditions générales d'utilisation le stipulent : « France Télécom ne saurait être responsable de l'utilisation faite par le Client de l'option "Contrôle du téléchargement" ». Enfin, cerise sur le gâteau : le logiciel d'Orange ne permet pas de sécuriser sa connexion wi-fi. Celle-ci peut donc être détournée par un internaute mal intentionné qui téléchargera illégalement, depuis son propre ordinateur (non protégé par Orange, donc), via les réseaux P2P ou via Rapidshare, VPN, streaming... au nom de l'abonné.
Mise à jour du jeudi 17 juin 2010
Orange annonce sur son site Internet la suspension de la commercialisation de l'option de contrôle du téléchargement. Pour l'instant nous ne savons pas s'il s'agit d'une suspension provisoire ou définitive.