Camille Gruhier
Tarifs App StoreAugmentation inopinée
À la fin du mois d’octobre, Apple a relevé de 10 à 20 % les tarifs pratiqués sur sa boutique d’applications en ligne, l’App Store. Même s’ils vont mécaniquement gagner plus, les éditeurs ne sont pas forcément ravis. N’ayant pas été avertis, ils n’ont pu préparer ni leurs clients, ni leurs supports de communication (tarifs annoncés dans leurs publicités). De plus, cette hausse soudaine crée parfois des situations ubuesques. C’est le cas de la presse : certains tarifs pour des magazines numériques dépassent ceux de leur version papier !
Lorsque Apple a ouvert l’App Store, sa plateforme de téléchargement d’applications, en juillet 2008, c’est avec un dollar en petite forme face à l’euro qu’il a engrangé ses premiers bénéfices. Mais depuis, la devise américaine s’est remusclée et le taux de change est devenu moins favorable au vendeur américain. Pour compenser, Apple a trouvé une solution toute simple : relever tous les prix de sa boutique. Sans qu’aucun partenaire ni client ne soit prévenu, le tarif plancher est ainsi passé le 26 octobre dernier de 0,79 à 0,89 €, et les applications à 2,99 € coûtent désormais 3,59 € (soit 20 % d’augmentation ! Voir tableau, plus bas). En moyenne, l’augmentation dépasse 13 %. Les achats que l’utilisateur peut faire depuis les applications elles-mêmes (« achats in-app »), comme des extensions pour les jeux ou des exemplaires de magazines, sont également concernés.
Interférences commerciales
Une augmentation des prix n’est jamais une bonne nouvelle pour les clients. En revanche, les éditeurs d’applications sont, eux, gagnants : leur rémunération (60 % du prix de vente environ) augmente avec le prix de leur application. Pourtant, ils ne sont pas toujours ravis. « Apple interfère sur la politique commerciale des éditeurs et nous met en porte-à-faux vis-à-vis de nos clients, s’insurge Corinne Denis, présidente du Geste (Groupement des éditeurs de services en ligne). Comment expliquer que les prix aient subitement augmenté de 20 % et que nous n’y sommes pour rien ? » Dans le cas des applications de presse, il arrive que la hausse des prix conduise à une situation ubuesque : la version numérique devient plus chère que le papier ! C’est le cas par exemple d’un numéro hors-série de L’Express consacré aux études, vendu 5,90 € en kiosque et 5,99 € sur l’App Store.
Publicité mensongère
Autre dommage collatéral de cette décision unilatérale : l’information au consommateur. N’étant pas prévenus, les éditeurs (d’applications de presse mais d’autres domaines également) n’ont pas pu mettre à jour les prix qu’ils annoncent dans leurs applications. Le quotidien Libération, par exemple (voir photos ci-dessous), affiche encore un journal à 0,79 € quand, au moment de confirmer, il fallait découvrir que le journal coûtait désormais 0,89 € ! (1) Même constat dans le cas d’un abonnement, affiché 14,99 € (mois) ou 159,99 € (année), facturé en réalité 16,99 € ou 189,99 €. Cela va même plus loin, puisque « certains se sont retrouvés hors-la-loi, leurs publicités papier ou web pour leurs offres digitales annonçant des tarifs qui n’existent plus », poursuit Corinne Denis. Il faudra nécessairement un délai pour que les éditeurs mettent à jour leurs campagnes publicitaires. Quant à la mise à jour des tarifs annoncés au sein même de leurs applications, elle sera peut-être encore plus longue : avant d’apparaître dans l’App Store, chaque « appli » devra repasser le processus de validation mis au point par Apple. « Un parcours du combattant », résume Corinne Denis.
App Store : les augmentations de tarifs
Apple contraint les éditeurs d’applications à caler le prix de leurs applications sur l’un de ses paliers. Voici les plus courants, et l’augmentation subie depuis le 26 octobre 2012.
Ancien tarif | Nouveau tarif | Variation |
0,79 € | 0,89 € | +12,65 % |
1,59 € | 1,79 € | +12,57 % |
2,39 € | 2,69 € | +12,55 % |
2,99 € | 3,59 € | +20 % |
3,99 € | 4,49 € | +12,53 % |
4,99 € | 5,49 € | +10 % |
5,99 € | 6,99 € | +14,3 % |
7,99 € | 8,99 € | +12,51 % |
15,99 € | 17,99 € | +12,50 % |
(1) Au moment où nous écrivions ces lignes (08/11/2012).