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Tampons périodiquesUn documentaire qui oublie l’essentiel

Que les tampons soient dépourvus de toute substance toxique et transparents sur leur composition, c’est la moindre des choses. Mais quand les femmes auront gagné ce combat, elles ne seront probablement pas à l’abri du syndrome du choc toxique. C’est le port prolongé qui semble en cause. Et cela vaut aussi pour les coupes menstruelles. Des enseignements qu’un récent documentaire n’a pas pris la peine de préciser.

C’est une belle occasion manquée. Le mardi 25 avril, France 5 diffusait un documentaire intitulé « Tampon, notre ennemi intime » (1). En cause, la composition des tampons périodiques, accusée d’être à l’origine de deux pathologies : le syndrome du choc toxique et l’endométriose (voir encadré). De fait, une opacité intolérable règne sur la composition de ces protections bien qu’elles soient en contact étroit et prolongé avec les muqueuses. Alors que le moindre savon doit détailler ses ingrédients, l’étiquetage de ces produits, qui n’appartiennent pas à une catégorie encadrée par une réglementation spécifique (comme les cosmétiques), reste désespérément muet. Les femmes ont beau réclamer la transparence, notamment via une pétition qui a déjà recueilli près de 300 000 signatures (2), rien ne bouge, ni du côté des fabricants, ni du côté du législateur. Une surdité incompréhensible qui attise légitimement l’inquiétude.

Pour autant, ce documentaire fait fausse route en établissant de manière aussi insistante un lien entre les deux pathologies et la composition chimique des tampons. Ayant publié un article et un test sur les tampons l’année dernière, et n’étant pas parvenus à la même conclusion, nous avons recontacté deux des chercheurs interrogés par notre consœur. Le professeur Gérard Lina d’abord. Ce médecin qui, au Centre de référence des staphylocoques à Lyon, recense les déclarations de cas de syndrome du choc toxique (SCT), tient à apporter d’emblée une précision : « Il ne faut pas confondre les cas déclarés et les cas tout court. Nous avons bien enregistré une augmentation : on passe de 2 à 5 déclarations par an au début des années 2000 à une dizaine en 2005-2009 et 17 l’an dernier. Mais comme ce n’est pas une maladie à déclaration obligatoire, il n’est pas possible de dire si cela reflète une hausse réelle des cas ou si les médecins les déclarent davantage, tout simplement parce que notre centre est désormais mieux connu. Ou encore parce que la maladie est mieux diagnostiquée car elle a été très médiatisée récemment. » Sur le lien entre composition chimique des tampons et syndrome du choc toxique, là encore, son discours diffère de celui du documentaire : « C’est une hypothèse parmi d’autres, mais les autres ont été passées sous silence. La flore vaginale des femmes concernées pourrait être en cause, de même que le mode d’utilisation des tampons, indépendamment de leur composition. »

Concernant l’endométriose aussi, Dominique Lison, le chercheur belge présenté comme soupçonnant une culpabilité des dioxines parfois retrouvées dans les tampons, est formel : « Nous avons cherché à savoir s’il y avait un lien entre cette maladie et l’utilisation de tampons et n’en avons pas trouvé. Il est bien exact que nous avons mis en évidence un lien entre risque d’endométriose et taux de dioxines dans le sang, mais les traces de ces substances toxiques retrouvées dans certains tampons sont infimes par rapport à ce que peut nous apporter l’alimentation. »

Ces approximations sont d’autant plus gênantes qu’à aucun moment n’est évoquée l’hypothèse régulièrement avancée par les chercheurs, en particulier pour le syndrome du choc toxique : une cause mécanique. La directrice du Centre de référence des staphylocoques, Anne Tristan, nous le rappelait l’an dernier : « Le facteur que l’on retrouve systématiquement, c’est le port prolongé. Même si les tampons étaient 100 % coton, cela ne changerait rien. L’atmosphère confinée, le fait que le vagin soit totalement “bouché” et que les tissus, très vascularisés, ne soient pas oxygénés, favorise la production de la toxine par la bactérie. »

Si on peut donner un conseil aux femmes, c’est de ne jamais dépasser 4 heures de port. Cela aussi bien pour les tampons que pour la coupe menstruelle, le nouveau dispositif en vogue depuis quelques années. Plusieurs cas de syndrome du choc toxique ont été décrits avec le port d’une coupe. Et, contrairement à ce qu’a prétendu le gynécologue invité en plateau après la diffusion du documentaire, la durée d’utilisation des protections n’est pas fonction de l’abondance du flux de chaque femme ! Le repère de 4 heures maximum vaut pour toutes. C’est le message à faire passer en priorité si on cherche avant tout à informer les femmes.

Syndrome du choc toxique et endométriose

Nous avons alerté les femmes sur le syndrome du choc toxique et l’importance, pour l’éviter, de changer fréquemment de tampon, dès… 1992 ! Cette maladie est provoquée par une toxine produite par une bactérie, le staphylocoque doré. Elle se caractérise par une forte fièvre, des symptômes de type gastroentérite, une éruption cutanée fugace (donc pas toujours remarquée) et une sensation de malaise général. Ses conséquences peuvent être graves.

L’endométriose est une maladie gynécologique qui touche une femme sur dix. Liée à la présence de tissu semblable à la muqueuse utérine en dehors de l’utérus, elle se caractérise par des douleurs invalidantes et peut conduire à l’infertilité. Ses causes, probablement multiples, sont mal connues.

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