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SécheresseUn plan eau pour s’adapter

En mars, 80 % des nappes souterraines affichaient un niveau bas ou très bas, alors qu’elles auraient dû se recharger durant l’automne et l’hiver : la situation est préoccupante. Le président de la République a présenté un « plan eau » placé sous le signe de la sobriété. Décryptage des principales mesures.

Ce « plan eau » demande un effort à tous les secteurs, avec un objectif de -10 % de prélèvements d’ici 2030. On ne peut s’empêcher de remarquer qu’à l’automne dernier, cet objectif était fixé pour 2025 dans le cadre du chantier de planification écologique enclenché « pour adapter la gestion de l’eau au changement climatique actuel et à venir ». Ce plan de sobriété et d’efficacité dans la durée se veut sans doute plus réaliste. Il doit être décliné dans tous les secteurs d’ici l’été, en intégrant des mesures qui s’adressent à chacun.

Parmi les principaux axes du plan eau présentés, citons :

  • le budget des Agences de l’eau : de 2,2 milliards actuellement, il sera augmenté de 475 millions par an. Il faut espérer que cette somme ne sera pas ponctionnée sur les usagers domestiques, qui financent déjà 80 % de leur budget, aux antipodes du principe du pollueur-payeur ;
  • la réduction des fuites sur les réseaux d’eau potable, avec la résorption des 170 « points noirs » identifiés en zone rurale, où 1 litre sur 2 part dans la nature avant d’être distribué : 180 millions d’euros supplémentaires y seront affectés ;
  • la généralisation de la tarification progressive du prix de l’eau, avec un montant proche du prix coûtant pour les premiers mètres cubes et un tarif très élevé pour les gros consommateurs afin de les inciter à la sobriété. Reste à la moduler en fonction de la composition des foyers, ce que les collectivités locales ont parfois du mal à faire, oscillant entre le « chèque eau » pour les familles nombreuses, tarif basé sur le quotient familial de la CAF, et une tarification dépendant uniquement du nombre de mètres cubes consommés par le ménage, indépendamment du nombre d’occupants de l’habitation ;
  • la réutilisation des eaux usées traitées, pour passer de moins de 1 % actuellement à 10 % en 2030. Elle doit s’accélérer grâce à la levée des obstacles réglementaires existants. Mais si cet enjeu est crucial sur le littoral, les eaux usées traitées des collectivités locales étant rejetées en mer, il n’en va pas de même dans les terres où elles alimentent les cours d’eau ou s’infiltrent pour recharger les nappes. Heureusement, le gouvernement prévoit un appel à projets à destination des collectivités littorales ;
  • un « Écowatt de l’eau » va être disponible avant l’été, sur le modèle du dispositif appliqué à l’électricité. Tous les usagers, quelle que soit leur catégorie, auront accès aux restrictions en vigueur localement et aux écogestes nécessaires pour réduire leur consommation. Au vu de la réduction de la consommation d’électricité cet hiver, on peut espérer un réel effet sur la ressource en eau ;
  • l’industrie n’est pas épargnée, avec au moins 50 gros sites ciblés pour leur fort potentiel d’économies d’eau, et le nucléaire va devoir fonctionner beaucoup plus en circuit fermé ;
  • même si l’enjeu agricole est identifié, avec la formule « il va falloir réinventer des modèles agricoles », les mesures visant l’agriculture sont particulièrement indigentes au regard de la part de ce secteur dans les consommations d’eau – jusqu’à 90 % l’été. Certes, les futures retenues seront conditionnées à des économies d’eau et à une réduction de l’usage des pesticides, il faut aussi planter plus de haies et d’arbres pour stocker l’eau, avoir plus d’agriculture bio sur les aires d’alimentation de captage… C’est bien, mais tout à fait dérisoire face aux pratiques agricoles qui continuent à consommer énormément d’eau.
Élisabeth Chesnais

Élisabeth Chesnais

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