Élisabeth Chesnais
RoundupCancérogène ou pas ?
D’un côté, le Centre international de recherche sur le cancer qui classe le glyphosate, principe actif du célèbre désherbant Roundup (Monsanto), en « cancérogène probable pour l’homme ». De l’autre, l’Autorité européenne de sécurité des aliments qui vient de juger le risque « improbable ». Qui croire ?
En mars 2015, au nom de l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé dont il dépend, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) classait le glyphosate dans la catégorie « cancérogène probable pour l’homme ». La nouvelle avait fait l’effet d’une douche froide, tant les publicités pour le Roundup de Monsanto avaient banalisé son usage.
Comme le soulignait à ce moment Que Choisir, ce classement constituait une bonne raison supplémentaire de renoncer au désherbage polluant, tant le dossier environnemental du glyphosate était déjà chargé.
Mais l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) vient à son tour d’évaluer le glyphosate au nom de l’Union européenne, et l’Agence juge « improbable que le glyphosate présente un danger cancérogène pour l’homme ». Une conclusion diamétralement opposée qui pose question.
Concernant l’évaluation du Circ, tout est clair et transparent. Il s’agit du classement officiel de l’OMS qui fait autorité dans le monde entier. L’évaluation des dangers se base exclusivement sur les études validées et publiées dans des revues à comités de lecture, et les critères d’évaluation sont publiés. Cette procédure permet de vérifier que les éléments de preuve et les conclusions sont scientifiquement valides.
Pour l’avis que l’Autorité européenne de sécurité des aliments vient de rendre, il en va tout autrement. Le communiqué officiel publié par l’Efsa elle-même précise en effet que l’essentiel de son évaluation s’est basée sur des études non publiées. Autrement dit sur des études fournies par les industriels producteurs de glyphosate et couvertes par le secret industriel. On est aux antipodes des travaux scientifiques indépendants soumis à la validation avant publication, tout autant que des preuves vérifiables.
Par ailleurs, contrairement au Centre international de recherche sur le cancer, l’Efsa n’a pas évalué les études humaines. L’autorité européenne a écarté les études portant sur les formulations commerciales, Roundup en tête, du fait qu’elles relèvent de chaque État membre sur le plan réglementaire.
Ce n’est pas la première fois que l’évaluation européenne laisse Que Choisir perplexe. On peut, entre autres, citer le bisphénol A, qui ne présente pas de risque pour les consommateurs selon l’Efsa, ou encore le formaldéhyde, classé cancérogène certain pour l’homme par l’OMS depuis 2004, mais seulement « suspecté » au niveau européen en dépit d’une demande de la France de le passer en cancérogène certain.