Anne-Sophie Stamane
Reste à chargeLes plus pauvres trop exposés
Dans une récente analyse, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) identifie les défauts du système français de couverture maladie, susceptibles de mettre en grande difficulté les foyers les plus précaires.
Peut mieux faire. C’est la conclusion de la publication de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur « l’accessibilité financière des soins et services de santé » en France (1). D’abord les bons points, qui pourraient servir d’exemples à suivre pour des pays moins bien organisés : le dispositif d’affections de longue durée (ALD), qui déleste automatiquement du gros des dépenses, y compris à l’hôpital, en cas de maladies graves et coûteuses comme le cancer ; l’Aide médicale d’État qui couvre les soins des sans-papiers dépourvus de ressources après trois mois de séjour sur le territoire ; et la protection universelle maladie (Puma), accessible sans conditions. Autant de mécanismes de protection efficaces répertoriés par l’OMS… Mais qui ne suffisent pas à prévenir totalement les situations financières compliquées.
« Restes à charge catastrophiques »
Car il existe des failles exposant les foyers les plus fragiles à des restes à charge susceptibles de compromettre leurs conditions de vie, dits « restes à charge catastrophiques ». Ils sont un facteur identifié de renoncement aux soins. L’OMS pointe d’abord le rôle des dépassements d’honoraires médicaux, qui n’épargnent quasiment personne : même les bénéficiaires d’une ALD y sont confrontés à un moment ou à un autre. Seule la complémentaire santé solidaire (qui englobe l’ancienne CMU-C) interdit aux professionnels de santé d’en réclamer. Mais les démarches administratives pour l’obtenir entravent son accès aux populations éligibles. Et les usagers qui n’en relèvent pas, tout en se situant juste au-dessus des critères d’attribution, se voient appliquer des dépassements sans distinction. Leur complémentaire santé, le cas échéant, est rarement suffisante pour les couvrir correctement.
Les participations financières peu lisibles comme le ticket modérateur et les franchises sur les consultations médicales et les boîtes de médicaments contribuent également aux difficultés, d’autant qu’elles sont largement généralisées.
Recommandations
L’OMS formule des recommandations pour combler les brèches. La première a le mérite d’être simple : il s’agirait ni plus ni moins que de dispenser les bénéficiaires de la CSS et des ALD de toute participation financière, dépassements compris, de sorte que la complémentaire santé ne serait plus nécessaire. En dehors de ces situations, il faudrait, deuxièmement, déterminer un plafond annuel fixe pour les multiples participations. Enfin, poser une limite aux dépassements d’honoraires, améliorer la transparence des tarifs et généraliser le tiers payant lèverait l’incertitude sur ce qui reste à payer, et faciliterait les éventuels arbitrages sur les dépenses à engager.
(1) « Les soins et services de santé sont-ils financièrement accessibles ? De nouvelles bases factuelles sur la protection financière en France », Damien Bricard, Organisation mondiale de la santé, région européenne.