par Arnaud Murati
Réparation de voitures électriquesDes alternatives crédibles aux constructeurs

Batteries défectueuses, convertisseurs capricieux, chargeurs hors service… Sur le marché de la réparation des voitures électriques et hybrides, les constructeurs imposent des devis souvent exorbitants. Mais des alternatives se développent : ateliers spécialisés, garages indépendants, grands réseaux, démolisseurs. Ces nouvelles filières permettent de réparer ou maintenir sa voiture électrique à moindre coût.
En résumé
- Les constructeurs présentent des factures exorbitantes pour la réparation des voitures électriques et hybrides.
- Des alternatives se développent, incluant des ateliers spécialisés (comme Revolte), des réseaux de centres autos (Bosch, Nexdrive, Norauto) et des démolisseurs proposant des pièces d’occasion (batteries notamment) à des prix plus abordables. Ces nouvelles filières permettent de diviser la facture par deux voire plus.
Une mini-zone industrielle, un « R » sur la devanture, et pas la moindre voiture électrique en vue : le nouvel atelier de Revolte situé à Thiais, dans le Val-de-Marne, se veut plus que discret. À l’intérieur en revanche, les équipes ne chôment pas. Les trois ponts affichent complet : Nissan Leaf, Renault Zoe, Peugeot Ion, toutes sont en cours de diagnostic ou de réparation. Au fond de l’atelier, un imposant Range Rover hybride attend son tour, de même qu’un Porsche Cayenne, hybride lui aussi. Revolte accueille tout le monde, pourvu que le véhicule soit muni d’une batterie servant à la traction : « Les constructeurs ne refusent pas les clients qui ont un problème, sourit Rémy Lê, directeur général de Revolte, mais ils leur soumettent des devis, disons… » Et de prendre des exemples parmi les véhicules qui l’entourent. La Peugeot Ion et son souci de batterie ? Le constructeur aurait édité un devis à 18 000 € pour solutionner le problème, sachant que la voiture vaut à peine 5 000 € sur le marché de l’occasion. Revolte connaît déjà la manière de réparer l’auto, la facture devrait perdre un zéro pour se situer aux alentours de 1 800 €. Le Range Rover hybride de 2014 ? Les représentants de la marque anglaise auraient annoncé un coût de 32 000 € pour le réparer. Revolte en fera tout autant, mais pour 8 500 € à 9 000 € au maximum… « Sur ce véhicule, notre expertise est unique, c’est un secret que l’on garde précieusement, continue Rémy Lê. Quasiment toutes les pannes sont récurrentes, c’est-à-dire que lorsque l’on est parvenu à la solution sur un véhicule, en général, on tient la clé du problème. » Revolte a ainsi déjà passé des centaines d’heures sur d’autres Range Rover hybrides précédemment, jusqu’à comprendre ce qui n’allait pas. L’enseigne applique la même méthode avec tous les véhicules qu’elle voit défiler dans ses ateliers : « Pour peu que l’on ait du temps, on peut tout faire. Mais comme nous apprenons, la phase de diagnostic peut durer plusieurs jours à plusieurs semaines », prévient le directeur général de Revolte.

Les centres autos en embuscade
À ce jour, l’enseigne Revolte ne possède que 3 adresses à Nantes, Rennes et Paris. Des « garages branchés » partenaires de Revolte existent eux aussi, ils sont une vingtaine à travers la France. Face à ces indépendants qui avancent désormais à grands pas, les réseaux de centres autos traditionnels fourbissent leurs armes. Le réseau Bosch Car Service, tout d’abord : depuis mars 2024, certains membres du réseau affichent le panneau « Electric Service ». Ils étaient 141 à la fin 2024, ils seront 300 d’ici à la fin de cette année. Pneus, freins, mais aussi des prestations plus techniques qui concernent des pannes de chargeur, de réducteur, de convertisseur AC/DC, de moteurs… Les points Electric Service entendent résoudre l’ensemble des soucis vus sur les voitures électriques ou hybrides. Nexdrive, un label du réseau Alliance Automotive Group, identifie aussi les professionnels appartenant à ce réseau en capacité d’effectuer des prestations de maintenance sur des voitures électriques : ils sont une cinquantaine à détenir ce panneau depuis le début de l’année 2025.

Norauto n’est pas en reste. L’enseigne nordiste ne communique pourtant pas sur sa capacité à réparer les autos de dernière génération. Mais des prestations de révision et d’entretien sont bel et bien proposées pour les hybrides et électriques. « L’entretien est un vrai sujet qui tend à se complexifier », pointe Anthony Ferro Milon, leader de l’offre atelier chez Norauto. Ainsi, selon ses dires, rien que pour vidanger des circuits de refroidissement ou de climatisation sur une voiture électrique, il convient de se fournir de l’outillage spécifique auprès des constructeurs. Entretenir revient donc de plus en plus à faire de la maintenance, et Norauto a évidemment franchi le pas : « Nous avons commencé à engager un certain nombre de prestations sur les véhicules hybrides. Cela fait environ un an que nous faisons déjà des remplacements de packs batteries dans nos centres, bien sûr pas encore dans 100 % de notre réseau. Nous en avons fait deux le mois dernier, sur des Toyota Prius et Auris, à Agen et à Perpignan », explique-t-il encore. La première batterie a ainsi été changée, la seconde réparée au niveau de ses modules. La facture se serait élevée à 2 100 € pour le changement de l’accumulateur, alors que le constructeur aurait avancé un montant plus de deux fois supérieur !

« Demain, nous aimerions que la réparation des packs batteries se fasse en interne chez Norauto, peut-être via des ateliers fantômes », fait savoir Anthony Ferro Milon. L’idée serait d’éventuellement créer des ateliers Norauto qui n’accueillent pas de public et qui se consacreraient uniquement à la réparation. En attendant que tout ceci se concrétise, Norauto continue d’apprendre : « Le centre d’Agen, c’est désormais une opération par mois environ grâce au bouche à oreille. Un client est ainsi venu nous voir avec un Kangoo ZE qui a un problème de charge et de convertisseur. Nous sommes en train d’apporter une solution alternative à celle du constructeur et à sa facture de près de 10 000 €. Le client est, du coup, prêt à attendre un peu ! »
Des batteries à -50 % en occasion
Alors que les réseaux d’entretien et de maintenance sont en train de structurer leur offre, d’autres sont déjà sortis du bois. Les démolisseurs automobiles, aussi appelés casseurs, ne veulent pas louper le coche de la voiture électrique. L’enseigne Surplus Autos par exemple, à Gaillac, propose déjà des batteries de traction de seconde main : de 350 € à 10 990 € pour la plus chère, toutes issues de voitures récentes et accidentées. Les batteries sont garanties 2 ans et expédiées sous 24 heures, de même que les moteurs et autres éléments. Back2car, son concurrent, propose le même type de prestation : « Toutes nos batteries sont révisées. Si à la suite de cette vérification nous décelons un défaut sur un module ou un composant, nous allons soit procéder à la réparation, soit nous passons à une remise à neuf complète de la batterie », fait savoir Aurélie Charlet, chef de produit de la gamme des produits remanufacturés. La batterie juste révisée est ainsi affichée à environ 50 % de son prix constructeur. Une batterie réparée vaut pour sa part 40 % de moins qu’une batterie neuve, tandis qu’un élément remis à neuf est proposé à un prix inférieur de 30 % à celui du constructeur. Idem pour les moteurs et autres pièces propres aux électriques et hybrides !

Parvenir à faire baisser le prix des réparations sur les voitures électriques devient une urgence, car pour la maintenance des voitures hybrides et électriques, un nouveau taux horaire de main-d’œuvre est de surcroît en train d’émerger. Il s’agit du « T4 », certains professionnels l’appliquent déjà. Ainsi ce garage indépendant de la région Centre : il facture désormais 96 € de l’heure pour intervenir sur une voiture de dernière génération, soit 17,6 % plus cher que le taux de main-d’œuvre T3 qui était jusqu’alors le plus onéreux.
Arnaud Murati