ACTUALITÉ
Recharge et passage à flux libre

Les bons comptes des concessionnaires d’autoroutes

Les sociétés concessionnaires ont été sous le feu des projecteurs cet été après qu’une étude de l’État ait dévoilé la marge bénéficiaire effectuée sur les recharges des véhicules électriques. Parallèlement, le passage au flux libre de l’A14 a de nouveau généré de l’incompréhension. Explications.

Il n’y a pas de petits profits. Selon le rapport de l’Autorité de régulation des transports (ART) publié en juillet dernier, « plus de 18 % » du prix de la recharge d’un véhicule électrique est « finalement reversé à la société concessionnaire d’autoroute (SCA) en échange du droit, pour le titulaire du contrat, d’exploiter son installation sur le domaine autoroutier, contre seulement 4 % en moyenne pour les autres biens vendus sur une aire de service. Cela s’explique par les méthodes de notation utilisées pour sélectionner les candidats : elles tendent à privilégier ceux qui reversent les rémunérations les plus importantes aux SCA au détriment de ceux qui s’engagent à pratiquer des prix bas. »

Les sociétés concessionnaires n’ont pas tardé à réagir : « Non, la recharge électrique sur autoroute n’est pas un nouveau pactole », s’est défendu le président de Vinci Autoroutes Pierre Coppey sur un réseau social, tandis que ses concurrents d’APRR ont aussi saisi la balle au bond : « Sur le réseau APRR-AREA, le niveau de la redevance totale due au titre de la mise à disposition du système autoroutier à des fins commerciales est de l’ordre de 5 % », a indiqué le groupe, avant de préciser que « les prix de la recharge électrique, à puissance comparable, sont strictement équivalents sur autoroute et hors autoroute ».

Au moins 20 % d’écart

Le sénateur centriste Vincent Delahaye avait justement demandé un peu plus tôt dans l’année aux sociétés concessionnaires quels étaient les tarifs de recharge pratiqués sur leurs réseaux. Selon son rapport paru le 2 juillet, le montant moyen de la recharge pour les voitures électriques est de 0,60 € du kWh HT sur le réseau Sanef, de 0,46 € à 0,69 € sur le réseau APRR et de 0,54 € sur les chaussées gérées par Vinci. Des prix « équivalents » à ceux pratiqués en ville ? L’Avere, l’association qui promeut la mobilité électrique en France, semble avoir une autre lecture des choses. Selon son étude récurrente sur les prix de la recharge publique, au 1er semestre 2024, le prix moyen des recharges rapides comme ultra-rapides étaient de 0,46 € le kWh TTC en France. Soit peu ou prou ce qu’ont indiqué les sociétés d’autoroutes au sénateur, mais hors taxes ! La différence tarifaire serait donc au minimum de 20 %, soit équivalente au montant de la TVA.

Péage à flux libre vecteur d’anxiété

Divers médias ont, en outre, récemment relayé les plaintes de vacanciers qui ont eu le sentiment d’avoir été piégés à leur retour de vacances. Un courrier les attendait pour les informer d’une somme à payer. Ces automobilistes avaient tous utilisé l’A14, soit l’autoroute passée à flux libre en juin dernier, et n’avaient sans doute pas compris qu’absence de barrière de péage ne signifie pas pour autant circulation gratuite : « Malgré la signalisation réglementaire et malgré les campagnes de communication que nous avions pu réaliser, nous observons aujourd’hui un meilleur taux de paiement qu’il y a trois mois, il y a une vraie amélioration dans la compréhension », consent le directeur de l’exploitation et de l’expérience client du groupe Sanef Vincent Fanguet, qui ne souhaite toutefois pas dévoiler l’évolution chiffrée du taux d’impayés.

Lors de la mise en flux libre de l’A79 par la société Aliae en 2023, le même problème avait déjà été observé : les gens ne savent pas ou ne comprennent pas comment s’acquitter du péage ! Ce sont 180 000 impayés qui auraient été cumulés en l’espace d’un an. « Complexité du paiement, manque de communication, toutes les conditions sont réunies pour que cette ambigüité s’installe », s’était offusquée la Ligue de défense des conducteurs en février 2024.

Avec la mise en flux libre de l’A13 entre Paris et Caen en décembre prochain, il va donc s’agir de faire en sorte que tout le monde comprenne bien le système. « Nous avons trois étapes dans le parcours de paiement, reprend Vincent Fanguet, on doit payer son trajet sous 72 h. Si l’on constate qu’il n’y a pas eu de paiement, nous envoyons un courrier. S’il s’agit d’un premier retard, nous laissons 10 jours supplémentaires pour payer le prix du péage sans majoration. Au-delà de ce délai, la première majoration est de 10 €, ensuite de 90 €. Si l’on persiste dans le non-paiement, alors cela devient une vraie amende infligée par le Trésor public, qui est de 375 €. Mais à ce jour, aucun dossier n’a été transmis aux tribunaux de police, donc personne n’a reçu 375 € d’amende sur l’A14 », tient à souligner le directeur de l’exploitation de la Sanef.

Arnaud Murati

Arnaud Murati

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