Arnaud Murati
Rappel des airbags TakataNouveau décès à La Réunion, nouvelles promesses de l’État
Alors que les centres de contrôle technique s’apprêtent à relayer la campagne de rappel visant toutes les voitures équipées d’un airbag Takata, le ministre des Transports a promis la mise en place d’une « mission d’inspection ». La désorganisation règne toujours au sein de cette affaire tentaculaire.
Un rappel par-ci, une campagne d’affichage par-là… Le scandale des airbags défectueux de la marque Takata (1), suspectée d’avoir déjà entraîné le décès de 17 personnes en France, est encore loin d’être réglée. Pressé par la demande d’un député de Guadeloupe à l’occasion de la traditionnelle séance des questions au gouvernement, le ministre des Transports a précisé le 5 février qu’une « mission d’inspection va voir le jour, renforçant nos prérogatives vis-à-vis des constructeurs ». Alors que l’UFC-Que Choisir réclame une commission d’enquête parlementaire sur ce dossier, le cabinet du ministre Philippe Tabarot explique que ce dernier a « confié une mission d’inspection à l’inspection générale de l’Environnement et du Développement durable ». Le but de cette mission étant « d’identifier les évolutions à envisager dans deux domaines », à savoir dans « le cadre technique et juridique relatif aux airbags », mais aussi dans « les rapports entre l’Administration et les constructeurs dans le cadre des rappels de véhicules ». L’entourage de M. Tabarot ne fait pas mystère qu’il aimerait à l’avenir « renforcer les prérogatives de l’État en matière de surveillance des véhicules ».
Bientôt une nouvelle instruction pénale à La Réunion ?
Car il y a urgence, et ce depuis plusieurs années désormais. Dans la nuit du 30 au 31 janvier dernier, un automobiliste circulant à bord d’une Honda Jazz de 2003 a encore perdu la vie, cette fois-ci sur les routes de l’île de la Réunion. La cause de sa mort semble tout à fait claire, selon des éléments directement recueillis auprès du parquet de Saint-Denis de La Réunion : « Le décès est en lien avec le déclenchement de l’airbag », fait-on savoir depuis le département ultramarin. Ainsi, le parquet pourrait décider prochainement de nommer un juge d’instruction afin de faire toute la lumière sur cette affaire.
Mais en attendant que gouvernement et ministères saisissent ce dossier à bras-le-corps, c’est à la sphère privée qu’a été demandée une contribution pour parvenir à identifier et à réparer un maximum de véhicules. À compter du 15 février 2025, les centres de contrôle technique mentionneront par écrit l’existence du rappel des véhicules équipés d’airbags Takata. Il s’agit, une nouvelle fois dans cette affaire, d’une première en France depuis l’instauration du contrôle technique en 1992 ! Toutes les autos ne seront pas concernées, cependant. Seuls les 17 marques et 130 modèles spécifiquement identifiés par les pouvoirs publics comme équipés d’un airbag litigieux (et pour peu que cette liste soit effectivement exhaustive et mise à jour…) auront droit à une mention spécifique en bas de leur procès-verbal. Hélas, même en cas d’identification d’une voiture dont les airbags qui n’auraient pas encore été remplacés, les centres de contrôle n’auront pas le pouvoir de l’immobiliser : il s’agira d’une mention purement informative, et non de l’instauration d’une nouvelle défaillance dans la nomenclature des défauts. Les stations-service des départements ultramarins sont elles aussi priées de relayer cette campagne de rappel.
Nouvelle campagne de rappel
Autant d’initiatives qui semblent insuffisantes voire tardives aux yeux de l’avocat Charles-Henri Coppet, qui accompagne plusieurs victimes et familles de victimes antillaises d’airbags Takata : « La mention sur le procès-verbal du contrôle technique, nous l’avions demandée voilà deux ans déjà, fait-il observer, cela aurait permis d’éviter des morts ! » L’avocat enrage et signale que « si l’on reste à ce rythme-là, il y aura encore des décès, et ce pendant des années ».
Stellantis vient d’annoncer une nouvelle campagne de rappel pour le nord de l’Europe visant 98 000 véhicules, dont 73 000 rien que pour la France. Preuve que le groupe, n’a sans doute pas fait preuve de toute la célérité et l’anticipation requises dans ce dossier.
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(1) Takata est un fabricant d’airbags disparu en 2017. Ses produits défectueux équipent encore des centaines de milliers de voitures à travers le monde. Sous l’effet de la chaleur et de l’humidité, les airbags se dégradent et ne se déploient pas correctement lorsqu’ils sont sollicités, voire se déclenchent de manière inopinée.