Audrey Vaugrente
Rappel de valsartanLe fabricant chinois mis en défaut par l’Europe
L’Agence européenne du médicament (EMA) a interdit au fabricant du valsartan en Chine de fournir ses pays membres. À l’origine d’impuretés, il n’aurait pas respecté le protocole de contrôle du produit. Deux autres producteurs sont sous surveillance.
Après le large rappel de médicaments à base de valsartan, c’est l’heure des sanctions. Le fabricant à l’origine des impuretés détectées dans ce traitement anti-hypertenseur, Zhejiang Huahai, s’est vu interdire la distribution de ce principe actif en Europe. Prise par l’Agence européenne du médicament (EMA), cette décision s’explique par le manque de vigilance de l’entreprise.
L’EMA coordonne une enquête d’ampleur depuis juillet dernier. C’est à cette date que la présence de deux substances potentiellement cancérogènes (NDMA et NDEA) dans le valsartan a été signalée. Ce principe actif sert de base à de nombreux génériques. Au total, c’est la moitié du marché français qui a été affecté.
Sous surveillance rapprochée
La formation de NDMA et de NDEA serait due à un changement dans le procédé de synthèse du valsartan, survenu en 2012. Un long délai s’est donc écoulé entre cette modification et l’alerte européenne. C’est pourquoi une enquête a été lancée. Pourquoi a-t-il fallu 6 ans pour détecter ces impuretés ? Zhejiang Huahai a-t-il respecté les bonnes pratiques de fabrication que lui impose l’Europe ?
L’EMA a obtenu une partie des réponses (1). S’il a fallu autant de temps pour lancer le rappel, ce serait en partie parce que le fabricant n’a pas suivi l’ensemble de la procédure. L’enquête a révélé 9 manquements « majeurs » vis-à-vis des bonnes pratiques de fabrication, dont certaines concernent le contrôle et la recherche d’impuretés.
Conséquence logique, le fabricant Zhejiang Huahai n’est plus autorisé à approvisionner le marché européen en valsartan. Mais les sanctions ne s’arrêtent pas là. L’EMA va vérifier attentivement que les mesures de correction exigées sont déployées. Elle place aussi l’entreprise sous surveillance accrue pour toutes les autres substances actives qu’elle produit.
Deux labos indiens également concernés
Le fabricant chinois n’est pas le seul à faire l’objet d’une attention particulière. L’Allemagne a détecté de la NDEA dans un médicament de la même famille que le valsartan (losartan). La recherche d’impuretés a donc été étendue à quatre « sartans » (candesartan, irbesartan, olmesartan, losartan). Le procédé de synthèse est similaire, la formation de ces substances est donc possible.
De fait, deux fabricants indiens ont été pointés du doigt. De la NDEA a été repérée dans du losartan produit par Hetero Labs et de l’irbesartan fabriqué par Aurobindo Pharma. Mais cette fois, les conclusions sont plutôt rassurantes. Les seuils observés sont extrêmement faibles. Par ailleurs, aucun rappel n’est nécessaire en France. Seul l’irbesartan distribué par le laboratoire Arrow est concerné, et les derniers lots ont été délivrés en août dernier.
Pour l’heure, le risque pour les patients est jugé faible. Il sera réévalué, à la lumière de ces découvertes. Mais selon une évaluation préliminaire, on pourrait s’attendre à un cas de cancer supplémentaire pour 5 000 patients prenant chaque jour la dose la plus élevée de médicament contenant l’impureté pendant 7 ans (2). Une étude réalisée auprès des patients danois a livré une estimation encore plus positive. À court terme, il n’y aurait pas de risque augmenté de développer un cancer.