Audrey Vaugrente
Rappel de médicaments à base de valsartanDes ruptures de stock à craindre
Certaines pharmacies commencent à faire face à des ruptures de stock de médicaments à base de valsartan. En cause, le rappel mondial de plusieurs lots après la découverte d'une impureté au cours de la fabrication de ce traitement indiqué notamment dans l'hypertension.
Le rappel de médicaments à base de valsartan prend des proportions mondiales. Depuis le mois de juillet, neuf fabricants de génériques ont retiré de nombreuses boîtes à cause d'un défaut de production. Indiqué notamment dans l'hypertension artérielle, le valsartan figure parmi les molécules les plus prescrites en France. Certaines pharmacies commencent à avoir des difficultés à remplacer les lots rappelés.
« À partir du mois de septembre, certaines pharmacies ne seront peut-être plus en mesure de vous délivrer votre médicament à base de valsartan », avertit l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans un point d'information. Face à cette situation tendue, les autorités sanitaires s'organisent et adressent des consignes précises aux médecins et officines.
Prescriptions et renouvellements limités
Le valsartan est utilisé contre trois pathologies : l'hypertension artérielle, l'insuffisance cardiaque et après un infarctus du myocarde. Ces indications sont restreintes tant que les tensions d'approvisionnement se poursuivent. De fait, l'ANSM demande aux professionnels de santé d'éviter d'établir de nouvelles prescriptions et de limiter les renouvellements à trois situations spécifiques :
- en cas d'insuffisance cardiaque qui n'est pas contrôlée par deux médicaments de la même famille (candesartan, losartan) ;
- après un infarctus du myocarde ;
- en cas d'hypertension artérielle stabilisée par une thérapie associant du valsartan à d'autres catégories d'anti-hypertenseurs (bétabloquants, diurétiques thiazidiques, etc.).
Dans ces cas particuliers, la prescription doit être maintenue car essentielle à l'équilibre de la maladie.
Les autres patients sous valsartan pourraient, en revanche, se voir proposer une modification de traitement au cours d'une consultation de renouvellement. Plusieurs médicaments de la même famille sont disponibles. D'autres classes, au moins aussi efficaces, peuvent également être suggérées à cette occasion – comme les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IEC). Un changement de posologie et de fréquence des prises est alors possible.
Cette situation peut aussi se produire à l'officine, si celle-ci est confrontée à une rupture de stock lorsque vous rapportez votre boîte concernée par le rappel. En l'absence de boîtes à disposition, le pharmacien titulaire est invité à contacter votre médecin pour convenir de la substitution appropriée.
Ne surtout pas arrêter le traitement
Ces tensions grandissantes sont dues à la découverte, en juin dernier, d'une impureté apparue au cours de la fabrication du médicament en Chine. Le principe actif (valsartan) est contaminé par de la NDMA (N-nitrosodiméthylamine). Cette anomalie serait liée à un changement du mode de production décidé par la société Zhejiang Huahai Pharmaceutical. Celle-ci produit le principe actif pour 9 laboratoires génériques (Cristers, Biogaran, Sandoz, etc.). D'après les évaluations préliminaires menées par l'Agence européenne des médicaments (EMA), les seuils de NDMA présents dans les comprimés ne présentent pas de danger immédiat pour les patients (lire encadré ci-dessous).
En attendant un retour en pharmacie, l'arrêt brutal du traitement est vivement déconseillé. Loin d'épargner la santé, ce geste peut s'avérer risqué et provoquer une poussée d'hypertension, une décompensation cardiaque ou encore des accidents neurologiques. Un numéro vert est à la disposition des patients qui s'interrogent sur le rappel : 0 800 97 14 03. Il est ouvert du lundi au vendredi de 9 h à 19 h.
Zoom sur la NDMA, l'impureté à l'origine du rappel
La NDMA (N-nitrosodiméthylamine) est un contaminant au nom peu connu mais assez courant. On la trouve notamment dans notre alimentation, à de très faibles taux. Selon l'Administration américaine des denrées alimentaires et médicamenteuses (FDA), 450 grammes de bacon abritent, par exemple, 0,3 microgrammes de NDMA. Soluble dans l'eau, elle fait l'objet d'inquiétudes car elle a été déclarée « cancérogène probable » pour l'homme par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Cette conclusion s'appuie, toutefois, sur des études menées sur l'animal et notamment le rat. Dans le valsartan, cette substance a été repérée dans de faibles proportions, équivalant « à 19,2 microgrammes dans 320 mg de valsartan », précise l'ANSM. Ce sont ces résultats qui ont servi à l'évaluation des risques, menée par l'Agence européenne des médicaments (EMA).
Conclusion : dans le pire des scénarios, il y aurait un cas de cancer supplémentaire si 5 000 personnes avaient pris chaque jour un comprimé de 320 mg – soit la posologie maximale – pendant sept ans. Pour rappel, 400 000 nouveaux cas de cancer se sont déclarés en 2017 en France.