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Publicité pour enfantsLa France mauvaise élève

Les pays européens n’ont toujours pas pris de mesures efficaces pour protéger les enfants des publicités pour des produits alimentaires de mauvaise qualité nutritionnelle, déplore l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La France ne fait pas partie des quelques bons élèves.

Dans son dernier rapport(1), publié le 15 octobre 2018, l’OMS tire encore une fois la sonnette d’alarme : « les enfants continuent à être exposés à des messages commerciaux vantant les aliments riches en graisses, en sel et en sucre » (dénommés HFSS(2)), alors même que l’obésité infantile est un problème majeur de santé publique, déplore-t-elle. Les enfants sont particulièrement réceptifs aux messages véhiculés par ces publicités, mais les adolescents en subissent également l’impact, quoique moins fortement.

Malgré ses précédents rapports et un ensemble de recommandations approuvées en 2010 en assemblée générale, l’agence onusienne constate que les pays européens « traînent à appliquer [ses] recommandations ». En Europe, 29 des 53 pays ont déclaré avoir mis en place des mesures, mais elles ne sont pas vraiment efficaces, constate encore l’OMS.

En France, la régulation n’est pas efficace

L’Hexagone ne fait pas preuve de diligence sur ce sujet, sans doute freiné par le poids de l’industrie agroalimentaire dans l’économie française (plus de 2 % du PIB et un solde du commerce extérieur positif). « Malgré quelques dispositions législatives, la France n’a pas spécifiquement encadré par la loi le marketing sur les aliments HFSS », critique l’OMS. Seule obligation, depuis 2004, l’insertion de messages de santé dans les publicités d’aliments HFSS.

S’y ajoute depuis 2009 une charte volontaire d’engagement des industriels à avoir « des pratiques de marketing responsables »… Mais, basée sur l’autorégulation, elle n’est pas efficace. « Il est clair que la charte ne vise pas à réduire l’exposition des enfants à la commercialisation des produits alimentaires HFSS », reproche l’OMS.

Des « fausses promesses », alors que « le harcèlement nutritionnel des enfants s’est aggravé », concluait déjà l’UFC-Que Choisir en 2010, suite à une étude destinée à évaluer la réalité des engagements de l’industrie agroalimentaire vis-à-vis de l’obésité infantile.

Un petit pas sur les chaînes de télévision publiques

En décembre 2016, un petit pas supplémentaire a été fait, avec l’adoption d’une loi stipulant l’interdiction de publicité, sur les chaînes publiques de télévision, pendant les programmes destinés aux enfants de moins de 12 ans. « Malgré sa portée limitée, ce texte est important », reconnaît l’OMS. Sauf qu’en termes d’audience pour le public infantile, les chaînes publiques n’arrivent qu’en 5e position, au mieux… Cette loi est entrée en application au 1er janvier 2018.

Un autre article, voté simultanément, stipulait que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) devait remettre chaque année un rapport au Parlement faisant le bilan des publicités ciblant les enfants, sur les chaînes publiques et privées. L’un des objectifs du législateur était d’apprécier l’efficacité de l’autorégulation. À ce jour, aucun rapport n’est encore parvenu aux élus…

Un cadre réglementaire est nécessaire

Aucune avancée réelle n’ayant eu lieu depuis 2010, les demandes qu’avait formulées l’UFC-Que Choisir restent – malheureusement – d’actualité. Elles prévoyaient notamment :

  • l’encadrement strict des publicités télévisées pour les produits les plus gras ou sucrés aux heures de grande écoute des enfants ;
  • la validation par le Programme national nutrition santé de programmes télévisés informatifs, afin d’aider les parents à identifier l’intérêt nutritionnel des produits alimentaires transformés ;
  • la gratuité de diffusion pour les communications sur l’équilibre nutritionnel émanant de l’Institut national pour la prévention et l’éducation sanitaire.

Les propositions de l’OMS

L’OMS formule ses critiques sur les politiques menées jusqu’à présent, et énumère des pistes à mettre en œuvre :

  • la plupart des mesures existantes ciblent uniquement la publicité radio, alors que les enfants sont aussi exposés via les supports numériques, les présentoirs de produits, les emballages et les parrainages par des grandes marques… Les pays doivent donc envisager une réglementation englobant non seulement la publicité, mais toutes les autres communications commerciales ;
  • en général, les réglementations se limitent aux programmes pour enfants et portent principalement sur la publicité. Échappent à tout contrôle un large éventail de programmes, de médias et de techniques de marketing auxquels sont exposés les enfants. Les pays doivent mettre en place des politiques visant à limiter l’exposition réelle des enfants ;
  • les réglementations ciblent généralement les tranches d’âge jusqu’à 12 ou 13 ans, alors que les adolescents aussi subissent les effets négatifs du marketing. Le champ d’application des lois doit être élargi pour protéger tous les enfants ;
  • les pays n’ont pas toujours adopté des systèmes efficaces de catégorisation des aliments pour déterminer lesquels ne doivent pas faire l’objet de publicité auprès des enfants. Ils doivent recourir à des systèmes existants, ou en concevoir de nouveaux, pour le profilage des nutriments sur la base de données scientifiques. Ces systèmes doivent définir efficacement les aliments peu sains en fonction de leur qualité nutritionnelle ;
  • les pays de l’Union européenne ont échoué à réglementer efficacement le marketing de façon transfrontalière. Ils doivent coopérer et harmoniser leurs réglementations pour éviter un affaiblissement des mesures nationales, en particulier contre le problème de la publicité dans les médias numériques.

(1) Rédigé avec l’université de Liverpool et l’Open University (Royaume-Uni).
(2) High in saturated fats, trans fats, free sugars and/or salt (à haute teneur en acides gras saturés, acides gras trans, sucres et/ou sel).

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