ACTUALITÉ
Pouvoir d’achat

Deux tiers des Français limitent toujours leurs achats

Fin septembre, la hausse des prix sur 1 an affichait seulement 1,1 % selon l’Insee, une première depuis 2020. Pour autant, et malgré le discours officiel, les Français sont à la peine et leur pouvoir d’achat toujours en berne selon les résultats de notre enquête.

À la question « Aujourd’hui, quelle est plutôt votre attitude par rapport aux niveaux des prix à la consommation ? », deux tiers des répondants à notre enquête (1) affirment toujours limiter leurs achats pour faire face à la hausse des tarifs de ces dernières années. Seuls 35 % consomment de nouveau normalement depuis que les prix n’augmentent plus. Parmi les personnes déclarant le plus se restreindre figurent sans surprise les personnes vivant seules et les personnes seules avec enfants qui sont 70 % et 69 % à déclarer limiter leurs achats. Pas étonnant, étant donné le poids du logement dans leur budget. Les couples sans enfant et les couples avec enfants ont, quant à eux, à 40 % et 35 %, repris une consommation normale.

En regardant dans le détail les professions et catégories socio-professionnelles, on s’aperçoit que les retraités sont ceux qui limitent le moins leurs achats ‒ ils sont tout de même 59 % à le faire ‒ tandis que 67 % des actifs et 68 % des étudiants déclarent les limiter. En toute logique, le niveau de revenus joue à plein sur le comportement des répondants. Ceux gagnant moins de 1 000 €/mois se restreignent à une très grande majorité (83 %) tandis que les personnes percevant plus de 4 000 €/mois consomment de nouveau normalement à 60 %. Reste tout de même 40 % d’entre eux à toujours limiter leurs achats. Une part non négligeable.

Un contexte exceptionnel et difficile

Depuis l’été 2021, les prix ont flambé. Un scoop pour personne ; une réalité pour tous. En cause, l’inflation qui a atteint des records que l’on n’avait pas constaté depuis les années 1970 : plus de 6 % entre juillet 2021 et juillet 2022. Encore plus effarant : la hausse cumulée de l’ensemble des prix à la consommation atteint +13,6 % entre janvier 2022 et mai 2024. Résultat, le pouvoir d’achat s’érode mois après mois, le consommateur n’est plus en mesure d’acquérir les biens ou les services qu’il aurait pu acheter auparavant à la même date. « Vous achetez désormais une plaquette de beurre 3,50 € alors que quelques mois plus tôt, elle atterrissait dans votre caddie pour 2 €, illustre Grégory Caret, directeur de l’Observatoire de la consommation (ODLC) de l’UFC-Que Choisir. Ça se remarque et ça marque les consommateurs. Ils se sentent lourdement touchés avec pour conséquences des arbitrages, voire des sacrifices. »

C’est effectivement le constat que faisait l’ODLC après une autre enquête réalisée au printemps dernier. Elle révèle les difficultés mais aussi la clairvoyance des Français : pour 82 % des sondés, les revenus n’ont pas été revalorisés à hauteur de l’inflation. Alors pour s’en sortir, la stratégie est double : s’orienter, s’agissant de l’alimentaire, vers des gammes meilleur marché, d’où le succès des marques de distributeurs, et renoncer à certaines dépenses trop onéreuses ou non essentielles. Exit la viande, le poisson, les sucreries. Mais aussi les loisirs, les gros équipements ou la voiture qui peuvent attendre et tiennent lieu de variable d’ajustement.

Des difficultés durables

L’inflation affiche désormais +1,1 % sur 1 an selon l’Insee, c’est-à-dire le niveau d’avant 2021. La fin de cet épisode inflationniste signifie-t-il que la crise est derrière nous et que la croissance va repartir ? « Non, estime Grégory Caret. Nous constatons plutôt les signes avant-coureurs d’une récession. » La raison est simple : une diminution des prix au supermarché avec un retour au niveau d’avant crise est illusoire. Par ailleurs, certaines baisses de tarifs annoncées lors de la précédente mandature, comme celle de l’énergie, ne pourront pas se réaliser en raison de l’état de nos finances publiques et des tensions géopolitiques. La perte du pouvoir d’achat pourrait donc se traduire par une baisse de la consommation des ménages.

Officiellement, le gouvernement est sur le front et dit vouloir « protéger le pouvoir d’achat des Français, en particulier des plus modestes, des classes moyennes et de celles et ceux qui travaillent », comme il l’indique dans sa présentation du projet de loi de Finances pour 2025 actuellement en discussion au Parlement. Mais, au menu des mesures qui impacteront le plus le pouvoir d’achat des Français, citons en maigre point positif l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation pour éviter à 530 000 foyers d’entrer dans le champ de l’impôt sur le revenu.

À l’opposé, citons la revalorisation des pensions de retraite de base décalée de 6 mois, la diminution de la prise en charge des consultations médicales par l’assurance maladie (prévue dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025) qui pourrait engendrer une nouvelle hausse des complémentaires santé, ou encore la hausse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) qui pourrait conduire les Français à moins voyager non par choix mais de façon subie. Un mieux pour la planète mais au prix d’une probable grande frustration et d’une baisse de moral. L’état de torpeur pourrait malheureusement se poursuivre.


(1) Enquête en ligne réalisée du 4 au 8 octobre 2024 auprès d’un échantillon représentatif de 1 009 personnes.

Rosine Maiolo

Rosine Maiolo

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