Arnaud Murati
Plaques d’immatriculationLa fraude à la doublette ne cesse d’augmenter
Les automobilistes les plus indélicats n’hésitent pas à recopier les plaques d’immatriculation d’autres voitures pour échapper aux contraventions. Mais outre le phénomène des doublettes, d’autres astuces ont aussi le vent en poupe. Voici comment réagir en cas d’usurpation de vos plaques.
Dans les petites annonces, nombreux sont les propriétaires de véhicules qui floutent leur immatriculation, voire qui mettent devant un vieux chiffon ou une serpillère… Grotesque ? Malheureusement non, si l’on en croit le bilan 2023 des infractions routières publié par le ministère de l’Intérieur. Les cas de « circulation d'un véhicule muni d'une plaque portant un numéro d'immatriculation attribué à un autre véhicule » ne cessent de croître. Le phénomène a encore progressé de 4,8 % entre 2022 et 2023, pour 23 072 cas recensés. Et sur 6 ans (2017 à 2023), il est possible de parler d’explosion des fraudes : +45,8 % ! Circuler avec un numéro d’immatriculation attribué à une autre personne est un délit passible de 7 ans de prison. Outre ce délit, certaines infractions toujours liées aux plaques d’immatriculation ont elles aussi le vent en poupe : les « plaques illisibles » ont été en hausse de 2,7 % en 2023 (37 879 cas), de même que les « plaques non conformes », qui ont occasionné 34 397 PV l’an dernier, soit un emballement de 30,8 % sur 1 an !
Une proposition de loi qui a failli aboutir
Tandis que certains essaient d’échapper aux radars automatiques par tous les moyens, une proposition de loi aurait dû descendre dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale pour y être débattue au printemps dernier. Celle-ci comportait un article unique : elle proposait que toute personne qui fait réaliser une plaque d’immatriculation fournisse nécessairement pièce d’identité et certificat d’immatriculation. Tout simplement. Mais avec la dissolution de l’Assemblée, le député Luc Geismar, auteur de la proposition, a perdu son siège, et sa proposition de loi a directement rejoint les oubliettes : « J’aimerais bien que l’un de mes collègues reprenne le flambeau, explique aujourd’hui l’ex-élu de Loire-Atlantique, mais il faut trouver quelqu’un qui sache incarner cette proposition. Sur ce dossier de la sécurisation des plaques d’immatriculation, il va falloir avancer avec le ministère de l’Intérieur mais d’abord, il faut arrêter l’hémorragie face à l’urgence… »
L’État semble cependant conscient du problème. À la question écrite d’un député portant sur ce phénomène de la doublette, le ministère de l’Intérieur a précisé les points suivants en avril dernier : « IA flash permet, par le recours à l’intelligence artificielle, d’effectuer une comparaison marque/modèle entre la photo d’infraction et les infos contenues dans le système d’immatriculation des véhicules […]. Ainsi, pour les dossiers identifiés comme des usurpations d’immatriculation, l’avis n’est pas envoyé au propriétaire et le dossier est transmis aux services enquêteurs. » La Cour des comptes abonde, et affirme même que le système d’intelligence artificielle « est à l’origine de près d’une détection de fraude avérée aux cartes grises sur cinq ».
Comment procéder en cas de doublette
L’intelligence artificielle ne parvient toutefois pas à régler tous les problèmes. Les victimes d’usurpation de leur numéro d’immatriculation ne doivent surtout pas payer l’amende lorsqu’elle arrive à leur domicile. Il va s’agir de la contester. Dans un premier temps, il faut déposer plainte, contre X. Cela peut se faire en ligne, puis au commissariat. Le véhicule est alors enregistré comme volé. Une fois le récépissé de plainte en possession, il convient, si le PV émane d’un radar automatique, de demander la photo au Centre de constatation des infractions routières (Cacir). Une fois en possession de la photo et du récépissé de la plainte, l’État enjoint l’automobiliste malheureux à fournir tout document qui tendrait à prouver qu’il ne pouvait se trouver au volant de sa voiture au moment où le délit a été relevé : témoignages, billets de train, attestation de l’employeur, etc. Armé de tous ces documents, l’automobiliste victime d’une doublette peut alors contester son amende (dans les 45 jours qui suivent son envoi) et surtout établir ensuite une nouvelle carte grise, qui lui donnera un nouveau numéro d’immatriculation. À noter que toute la procédure est gratuite, à l’exception des frais d’acheminement (2,76 €) ainsi que la réalisation et la pose des nouvelles plaques, qui demeurent à la charge du plaignant.