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PFASVers une explosion du montant de la redevance due par les industriels ?

La loi du 28 février contre les PFAS instaure, entre autres, une nouvelle taxe à l’encontre des industriels qui rejettent ces polluants éternels dans l’environnement. Et la facture pourrait être bien plus élevée que prévu.

De cette loi contre les PFAS, votée par les députés le 20 février et promulguée huit jours plus tard, on retient surtout qu’elle interdit les articles contenant l’un de ces polluants éternels à partir de 2026 dans les secteurs des cosmétiques, des vêtements, des chaussures et farts pour ski. Mais ce n’est pas tout. Un autre article phare de cette loi est l’instauration d’un principe « pollueur-payeur » aux installations industrielles les plus émettrices de PFAS dans l’eau. Autrement dit, dès la publication du décret gouvernemental, celles-ci devront s’acquitter d’une nouvelle redevance à payer aux agences de l’eau et aux collectivités territoriales chargées de la production et de la distribution d’eau potable sur leur territoire. Et ainsi les aider à supporter le coût croissant de cette dépollution auxquelles elles devront faire face.

100 € les 100 g

Le taux de la redevance a été fixé à 100 € pour 100 g de PFAS rejetés dans l’eau, expliquait Le Monde le 10 mars dans un article publié sur son site (1). Sur cette base et en estimant ces rejets de PFAS dans l’eau à quelques dizaines de kilos par plusieurs sites producteurs de polluants éternels, le ministère de la Transition écologique avait estimé à 2,4 millions d’euros par an le produit de cette redevance. Ce pourrait être bien plus, souligne le quotidien en rapportant les résultats d’une campagne de surveillance des rejets industriels dans l’eau lancée depuis plusieurs mois par le ministère de la Transition écologique. Ainsi, pour le seul site de l’entreprise BASF à Saint-Aubin-lès-Elbeuf (Seine-Maritime), où elle produit du Fipronil, un insecticide interdit en France depuis 2004 mais qu’elle exporte hors UE, l’entreprise rejette, par jour, 177 kg de TFA, un PFAS particulièrement inquiétant.

64,5 millions d’euros par an pour un seul site ?

Dès lors, en appliquant ce taux de 100 € les 100 g, BASF devra payer 177 000 € par jour, soit 64,5 millions d’euros par an. Un montant 25 fois supérieur à l’estimation initiale du produit de la redevance. Et on n’est pas à l’abri de nouvelles surprises similaires alors que sur les 3 000 installations classées pour l’environnement (ICPE), 700 restent encore à inspecter dans le cadre de cette campagne de surveillance des rejets industriels dans l’eau lancée par le ministère de la Transition écologique.

Ces derniers mois, plusieurs études, y compris celle de Que Choisir avec Générations futures, ont montré une pollution importante des eaux françaises (jusqu’à celles délivrées au robinet) au TFA, un PFAS qui provient en partie de la dégradation dans l’environnement de pesticides utilisés en agriculture (dans le jargon, on parle de métabolite). Mais le TFA n’est pas dans la liste des 20 polluants éternels qu’une directive européenne demande aux États membres de surveiller systématiquement dans les eaux destinées à la consommation humaine (dont l’eau du robinet) au plus tard en 2026. Il est donc à ce jour non réglementé et la crainte est que BASF fasse du lobbying pour sortir ce PFAS de la redevance instaurée par la loi du 28 février dernier. « Le TFA étant le PFAS le plus répandu dans l’environnement et l’eau, ce serait trahir l’esprit de la loi de faire porter sur les citoyens le coût d’une pollution locale dont les seuls responsables sont les grands groupes de la chimie », lâche, dans les colonnes du Monde, le député écologiste Nicolas Thierry, à l’origine de cette loi contre les PFAS.

Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

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