Élisabeth Chesnais
Pesticides agricolesUne baisse plus que relative
Le ministère de l’Agriculture se félicite de la baisse des ventes de pesticides agricoles observée depuis 2019 et confirmée par les chiffres provisoires des ventes 2021. Son enthousiasme mérite cependant d’être tempéré.
Après presque une décennie de hausse, le ministère de l’Agriculture constate « un volume de produits phytopharmaceutiques de synthèse vendus sur la période 2019-2021 au plus bas depuis 2009 et le début du plan Écophyto ». Un résultat qu’il met sur le compte « du gouvernement pleinement engagé dans la transition agroécologique, notamment à travers le plan national de réduction des produits phytopharmaceutiques, Écophyto II+ ».
S’il est incontestable que les ventes ont diminué, l’indicateur de référence Nodu (nombre de traitements appliqués) ne fait que retrouver son niveau de 2011. Il reste cependant supérieur à celui de 2009, année de l’entrée en vigueur du premier plan Écophyto. Les ventes 2019-2021 sont seulement très inférieures à celles des années 2012-2018, une période qui fut celle d’une augmentation de l’usage des pesticides agricoles en dépit d’Écophyto. Mais en réalité, on dépasse encore le Nodu calculé au démarrage du plan initial. Affirmer comme le fait le ministère que la baisse 2019-2021 est « le résultat concret de la mise en œuvre des plans Écophyto successifs » relève de la méthode Coué !
Autre annonce, la baisse bienvenue, forte et continue, de la vente des substances les plus à risque, celles qui sont, de façon avérée ou probable, cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, avec une réduction de 85 % en 4 ans. Le progrès va même se poursuivre, la réglementation européenne en interdisant à chaque réexamen de dossiers. Là encore, Écophyto n’y est pas pour grand-chose.
Soutien insuffisant au bio
Enfin, l’agriculture biologique s’est fortement développée entre 2015 et 2021, passant de 1,3 à 2,8 millions d’hectares cultivés. Elle occupe ainsi 10,3 % de la surface agricole française, même si son expansion est désormais freinée par une baisse inédite des ventes. Cette situation s’explique notamment par la multiplication de mentions telles que « sans pesticides » ou « haute valeur environnementale » (HVE), qui bénéficient de moyens plus importants en dépit de leur exigence environnementale bien moindre.
En juin dernier, la Cour des comptes a jugé le soutien des pouvoirs publics au bio très insuffisant compte tenu de ses bénéfices, « notamment en termes de santé et d’environnement ». Et ce n’est pas le plan national censé traduire les objectifs de la nouvelle PAC européenne qui va redresser la situation du bio, la Commission de Bruxelles l’ayant épinglé pour son manque d’ambition environnementale, en fustigeant tout particulièrement le label HVE.