Fabienne Maleysson
Perturbateurs endocriniensLes approximations dangereuses de la marque Avril
Suite à notre test de vernis à ongles où elle a été classée dernière avec la référence Rouge Vermillon n°33, la marque Avril a réagi sur sa page Facebook et auprès de ses clientes. Avec des arguments que nous sommes obligés de démentir, surtout concernant les perturbateurs endocriniens.
Pour rassurer ses clientes sur la qualité et l’innocuité de ses vernis, Avril commence par préciser sur Facebook que « la benzophenone-1 est utilisée dans les vernis dans le but de préserver le produit de la lumière, sinon la couleur risque de se dégrader. Il ne peut pas être retiré à cause de cette fonction bien spécifique et indispensable. »
Une réponse qui impose une question simple : si ce perturbateur endocrinien est tellement indispensable, pourquoi la moitié des autres vernis à ongles de notre test (soit 8 sur 16) n’en contiennent-ils pas ?
Même raisonnement concernant les composés présents de façon non volontaire en tant que contaminants. Selon Avril, « des impuretés techniquement inévitables sont parfois présentes à l’état de traces dans un produit. » Sauf que les autres marques testées maîtrisent suffisamment bien leur process de fabrication pour ne pas contenir ces impuretés.
Autre point avancé par Avril et qui interroge quant au sérieux de ses analyses : « le résultat n'est pas le même pour les utilisatrices selon que le composant est présent en quantité importante et nocive, ou en quantité infinitésimale à l'état de traces donc sans aucun danger, ce qui est le cas ici. » Cette réponse d’Avril sur les perturbateurs endocriniens que sont la benzophénone, les phtalates et le styrène n’est absolument pas recevable car la particularité toxicologique des perturbateurs endocriniens est double :
- ils peuvent être toxiques à des doses infinitésimales ;
- ils peuvent être plus toxiques à doses très faibles qu’à doses plus élevées.
On le répète régulièrement, les perturbateurs endocriniens sont des composés au comportement totalement imprévisible. Ils doivent donc être tout simplement proscrits de la composition des produits cosmétiques, sans aucune sorte de tolérance.
Afin que notre réponse soit tout à fait complète concernant le vernis à ongles Rouge Vermilllon n°33 de la marque Avril, nous reproduisons ci-dessous le texte qui accompagne les résultats de notre test en laboratoire car ce que nous affirmons concernant ce produit est le fruit d’analyses scientifiques :
Côté composition, Avril fait très fort. Annoncé sans phtalates, c’est le seul vernis de la sélection dans lequel nous en avons trouvé ! Certes, la quantité est faible (20 ppm de DEHP), mais cet ingrédient est interdit et, s’agissant d’un perturbateur endocrinien (PE), un effet hormonal est possible même à très faible dose. Le DEHP est en outre classé reprotoxique de catégorie 1B.
La teneur en DEHP mesurée dans ce produit ne signe pas un ajout intentionnel. À ce niveau de concentration, le rôle technique de plastifiant n’est pas possible. Il s’agit donc plus probablement d’une contamination résultat d’une moins bonne maîtrise du processus de fabrication. Tous les autres concurrents testés parviennent à éviter ou éliminer les traces de phtalates, pas Avril.
À l’analyse, nous avons aussi retrouvé un autre PE, le styrène.
Et enfin, la liste d’ingrédients mentionne aussi la présence de benzophénone-1, un PE supplémentaire. Son annonce « sans formaldéhyde » laisse également perplexe puisqu’il en renferme aussi un peu plus que les autres. Ça commence à faire beaucoup pour un produit à l’image écolo, composé de « 74 % d’ingrédients d’origine naturelle ».
Côté efficacité, ce vernis n’a pas fait preuve de qualités techniques particulières : il n’est ni spécialement couvrant, ni bien résistant (mauvaise tenue aux liquides et sensible à la rayure), et il met longtemps à sécher. En revanche, il est très brillant (obtenant 3 étoiles sur ce critère), c’est peut-être son seul atout.
Franck Attia