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Pénurie d’huile de tournesolAux consommateurs de chercher les changements de recettes

Face à la pénurie d’huile de tournesol du fait de la guerre en Ukraine, les fabricants sont contraints de modifier les recettes de nombreux produits alimentaires. Les consommateurs devraient en être informés, via des stickers sur les produits, des affichages en magasins, et des avertissements sur les sites Internet.

Conséquence imprévue de la guerre en Ukraine, les consommateurs vont bientôt voir apparaître des stickers sur les produits alimentaires, ainsi que des affichages dans plusieurs rayons des supermarchés, pour les avertir de changements dans les recettes. En effet, les fabricants sont confrontés à une pénurie de produits issus du tournesol (huile, lécithine, graines, tourteaux), qui étaient en grande majorité fournis par l’Ukraine. Ils sont donc contraints de modifier leurs recettes en urgence, en substituant ces produits par d’autres, voire en les supprimant.

Stickers et base de données pour une information « claire et loyale »

Facile, pourrait-on penser. Sauf que les mentions sur les emballages ne seront plus conformes au produit. Or, la pénurie sévit aussi dans le secteur des emballages, et il faut actuellement compter 3 à 6 mois pour en obtenir de nouveaux. Quid alors, de l’information claire et loyale au consommateur ? Le ministère de l’Économie a d’ores et déjà reçu près de 200 demandes de dérogations à l’étiquetage de la part d’industriels de l’agroalimentaire.

Les associations de consommateurs, dont l’UFC-Que Choisir, ont exigé des pouvoirs publics qu’ils encadrent ces dérogations, et surtout que les consommateurs en soient informés. Après un mois de concertations avec les fabricants et les distributeurs, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a décidé une série de mesures, certaines à application immédiate, d’autres disposant d’un délai de 2 mois maximum, annoncées le 26 avril lors d’une conférence de presse.  

Une base de données open source

Première mesure à application immédiate, une base de données en open source, sur le site de la DGCCRF, liste l’ensemble des dérogations. Un moteur de recherche et des filtres permettent de rechercher un produit par son nom, sa marque, sa famille de produits ou son code-barres, et d’avoir accès aux informations détaillées sur les dérogations. Les sites de e-commerce des fabricants et des distributeurs reprendront cette information, assortie d’un avertissement au consommateur pour l’informer du changement de recette.

Un sticker pour les allergènes

La seconde mesure à application immédiate concerne les allergènes (1). Les industriels devront apposer un sticker sur le produit, ou tout autre moyen adapté, comme un marquage à proximité de la liste des ingrédients ou en face avant. S’agissant de risques pour la santé, cette information devra être visible et sans ambiguïté. Il s’agit principalement de la substitution de lécithine de tournesol par de la lécithine de soja ou un autre additif potentiellement allergène, mais il peut aussi s’agir de présence de gluten dans un aliment affiché « sans gluten ».

Sur la loyauté de l’information, tout changement substantiel sera également signalé par sticker. Il peut s’agir d’un aliment certifié AB dans lequel le fabricant est contraint d’incorporer une huile non bio ; d’un produit dont l’emballage mentionne « sans huile de palme » alors qu’il en incorporera ; de l’ajout d’un ingrédient OGM ; d’œufs, de viande ou de produits laitiers pour lesquels il est mentionné « élevé sans OGM », etc.

Un délai plus long pour les autres dérogations

Pour les autres dérogations, par exemple la substitution d’une huile de tournesol par une autre huile végétale, les industriels bénéficieront d’un délai plus long, justifié par l’absence de risque pour la santé. Ils auront 2 mois pour indiquer sur l’emballage que la recette du produit a été modifiée. Cela peut passer par un sticker ou autre marquage, ou une inscription à côté de la date de péremption, par exemple « DEROG » pour « dérogation ».

Entretemps, la seule information à la disposition des consommateurs consistera en un affichage générique en rayon, sans précision sur les produits concernés, ainsi que sur le site de la DGCCRF. L’UFC-Que Choisir déplore une information trop générale, qui ne permettra pas au client d’identifier les produits modifiés lors de ses courses en magasin.

Ces dérogations sont valables pour une durée maximale de 6 mois. Passé ce délai, les fabricants devront disposer d’emballages en conformité.

Une information visible lors de l’achat

Bercy demande instamment aux distributeurs « de faire preuve d’imagination » pour que toutes ces dérogations soient visibles par les consommateurs lors de leurs achats. Il s’agira de placer des affichages dans les rayons concernés, mais aussi aux entrées et aux caisses. L’affichage expliquera que des produits font l’objet de reformulations, indiquera les signes distinctifs permettant de les repérer, sensibilisera les personnes allergiques sur l’importance de vérifier les informations sur les produits. Les distributeurs devront également mentionner l’existence de la base de données de la DGCCRF, avec son URL, et en affichant un QR Code renvoyant vers la page dédiée.

Bouteilles d’huiles, produits frits ou panés, gâteaux et pâtes brisées

« Des milliers de produits seront concernés par des reformulations impliquant des changements d’étiquetage et d’allégations », estime le ministère de l’Économie. Parmi eux, « 90 % concernent une substitution d’huile de tournesol par de l’huile de colza », précise l’Association nationale des industries alimentaires : il s’agit essentiellement d’huiles en bouteilles, de produits frits ou panés, de gâteaux et de pâtes brisées. On pourrait bientôt y trouver aussi les margarines, les sauces, les conserves de poissons et de nombreux plats préparés. Mais aussi des chocolats, glaces et poudres chocolatées quand la lécithine viendra à manquer.

Pour les viandes et produits laitiers, la pénurie touchera indirectement les consommateurs. C’est l’alimentation des animaux qui va évoluer, les éleveurs étant parfois contraints de distribuer des tourteaux de soja ou colza OGM, en lieu et place de tourteaux de tournesol ukrainiens non OGM.

Attention à la fracture numérique

Les associations de consommateurs demandent aux grandes surfaces de tenir compte des clients rencontrant des difficultés avec le numérique. « Il n’est pas question de se satisfaire d’une seule information sur le site Internet, sachant que 14 millions de personnes sont en situation d’illectronisme », a souligné la représentante de Familles rurales. Ces personnes doivent pouvoir s’informer clairement auprès d’interlocuteurs en magasin.

Ces associations voient néanmoins une opportunité à la crise : elle permettra peut-être au consommateur de prendre conscience des listes pléthoriques d’ingrédients composant les aliments qu’ils mettent dans leurs caddies.

(1) Les 14 allergènes prévus par le règlement européen INCO, mais aussi les allergènes émergents identifiés par l’Anses dans son avis de décembre 2018.

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