Perrine Vennetier
PaxlovidQue vaut ce nouveau traitement contre le Covid ?
Ce médicament antiviral évite les aggravations du Covid-19 chez les personnes à risque, mais son emploi avec d’autres médicaments n’est pas évident. Sa pertinence contre l’Omicron n’est pas complètement établie non plus.
Depuis le 4 février, un nouveau traitement devait être disponible dans les pharmacies françaises. Autorisé depuis la fin janvier, il vient étoffer le maigre arsenal efficace contre le Covid-19. Il s’agit d’une association de molécules antivirales nirmatrelvir + ritonavir commercialisée sous le nom de Paxlovid par les laboratoires Pfizer. Son mode d’action cible directement la réplication du virus. Elle n’empêche donc pas l’infection, mais son aggravation. À ce titre, elle est indiquée pour les personnes à risque de développer des complications telles que les personnes sévèrement immunodéprimées, atteintes de cancer ou de trisomie 21, transplantées ou insuffisantes rénales dialysées ainsi que les personnes de plus de 65 ans présentant un ou plusieurs facteurs de risques (diabète, obésité, BPCO et insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque, hypertension mal contrôlée, etc.), en particulier quand elles ne sont pas vaccinées. Contrairement aux autres traitements déjà sur le marché tels que l’oxygénothérapie et les corticoïdes, le Paxlovid s’adresse aux malades avant qu’ils le soient gravement. Pour être efficace, il doit être administré dans les 5 jours maximum qui suivent le début des symptômes, à prendre sous forme de comprimés, ce qui en facilite l’emploi.
En termes d’efficacité, le médicament a été testé lors d’une étude dont les données n’ont été communiquées que de façon parcellaire. Il ressort néanmoins des résultats communiqués aux autorités de santé pour obtenir leur approbation qu’il est efficace. Le risque d’être hospitalisé ou de décéder du Covid était réduit de 89 % (en valeur relative). Cela correspond à une diminution de 6,3 % dans l’absolu. Pour le traduire en population, cela signifie que dans un groupe de 393 personnes prenant du Paxlovid, 3 ont été hospitalisées et aucune n’est morte, alors que dans un groupe de taille comparable (387 personnes), 27 ont dû être hospitalisées et 7 sont mortes.
L’incertitude Omicron
Ces résultats positifs ont toutefois été obtenus dans un cadre différent de notre réalité : les personnes ayant participé à l’essai n’étaient pas vaccinées et à l’époque, le variant majoritaire n’était pas l’Omicron. Or ce dernier provoque moins de formes graves que ses prédécesseurs, environ 2 fois moins que le Delta, et s’il semble que le Paxlovid garde une certaine efficacité (d’après des tests in vitro et non sur des personnes) contre l’Omicron, on n’en connaît pas l’étendue. L’intérêt de ce produit pourrait en être réduit.
L’usage du Paxlovid pourrait aussi être obéré par les nombreuses contre-indications à son emploi. Ainsi, ce traitement ne doit pas être prescrit aux personnes ayant une insuffisance rénale sévère ou une insuffisance hépatique (du foie) sévère. En cas d’insuffisance rénale modérée, les doses devront être réduites. Les interactions avec les autres médicaments sont nombreuses et potentiellement graves. Le ritonavir, qui est utilisé dans le Paxlovid pour accroître l’effet du nirmatrelvir, peut malheureusement accroître les effets de bien d’autres médicaments courants et donc leurs effets indésirables. Par exemple, il ne devra jamais être administré en même temps que la colchicine (traitement contre la goutte), l’amiodarone, la flécaïnide (traitement des troubles du rythme cardiaque), la lovastatine et la simvastatine (traitement anticholestérol), le clorazépate, le diazépam (des somnifères) et de nombreux autres. La liste des médicaments susceptibles d’interaction moins grave mais nécessitant tout de même des précautions est encore plus longue (1). Or les patients qui pourraient prendre le Paxlovid parce qu’elles sont à risque d’aggravation du Covid sont précisément des personnes déjà atteintes de maladies et donc traitées par de nombreux médicaments ! Les patients à qui ce nouveau traitement sera prescrit devront veiller à faire une revue exhaustive de leurs ordonnances et des compatibilités avec leur médecin et leur pharmacien.
En dépit de cet emploi délicat et d’incertitudes sur l’étendue de son efficacité, le Paxlovid présente l’avantage de fournir une arme de plus contre le Covid, bienvenue dans un contexte où certains traitements précédemment autorisés ont perdu leur efficacité contre l’Omicron.
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(1) On peut les consulter sur ce document édité par la Haute Autorité de santé à l’attention des médecins, mais consultable par tous : https://www.has-sante.fr/plugins/ModuleXitiKLEE/types/FileDocument/doXiti.jsp?id=p_3311034