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Panneaux photovoltaïquesLes conséquences de la diminution des tarifs de rachat et des aides

Le gouvernement vient de publier un arrêté actant les nouveaux tarifs d’achat du surplus d’électricité ainsi que les nouveaux montants de la prime à l’autoconsommation. Avec, à chaque fois, des baisses drastiques. Mais l’impact est à nuancer.

Un moratoire sur les installations photovoltaïques en France ? C’est en tout cas la lecture qu’ont faite les associations de promotion des énergies renouvelables des manœuvres du gouvernement pour réduire les niveaux de soutien aux installations solaires en France. Du moins celles d’une puissance inférieure à 500 kilowatts-crêtes (kWc), appelée « segment 21 » (S 21).

Sur ce segment qui concerne les particuliers – les installations photovoltaïques résidentielles ne dépassant généralement pas une puissance de 9 kWc –, les projets solaires bénéficient, sous certaines conditions, d’une obligation d’achat de l’électricité produite. En clair, l’État, via sa filiale EDF OA ou un autre opérateur agréé, achète votre électricité solaire. Soit la totalité, soit le surplus que vous n’êtes pas parvenu à autoconsommer, l’option la plus intéressante aujourd’hui.

Un tarif d’achat divisé par 3

Un arrêté tarifaire fixe le tarif auquel est achetée cette électricité solaire, mais aussi le montant de la prime à l’investissement dont bénéficient les particuliers et entreprises qui ont opté pour l’autoconsommation de leur électricité solaire (avec vente du surplus). Cette aide de l’État est versée en une fois, 1 an après l’installation des panneaux. Ce sont ces montants que le gouvernement vient de raboter dans un nouvel arrêté tarifaire publié ce jeudi.

Le segment 0-9 kWc, qui concerne surtout les particuliers, n’échappe pas aux coupes budgétaires. Le tarif d’achat du surplus d’électricité passe de 12,7 centimes d’euro le kilowattheure (kWh) à 4 centimes d’euro, soit une division par 3. Quant à la prime à l’autoconsommation, elle a déjà baissé de 40 % l’an dernier, s’établissant à 220 € pour les installations d’une puissance inférieure ou égale à 3 kWc et à 160 € pour celles inférieures ou égales à 9 kWc. Ces montants sont de nouveau réduits dans le nouvel arrêté tarifaire publié ce jeudi 27 mars, puisque cette prime à l’autoconsommation passe désormais à 80 € le kilowatt-crête.

Une baisse de la TVA en contrepartie

Richard Loyen, délégué général d’Énerplan, comme Sylvain Guérin, qui pilote le groupe de travail autoconsommation du Syndicat des énergies renouvelables (SER), nuancent tout de même l’impact de ces baisses. Car en parallèle, à partir du 1er octobre, la TVA sur l’installation de panneaux photovoltaïques de moins de 9 kWc passera à 5,5 % (elle était jusque-là de 10 % pour les installations en dessous de 3 kWc et de 20 % pour celles au-dessus).

Cette baisse compense la réduction de la prime à l’autoconsommation. Le plus souvent même, le particulier est gagnant. Cette harmonisation, quelle que soit la puissance, a aussi du bon : « Jusqu’à présent, les particuliers avaient tendance à brider la puissance de leurs centrales solaires à 3 kWc pour ne pas passer à une TVA à 20 %, explique Sylvain Guerin. Résultat : les installations résidentielles en France sont en moyenne d’une puissance de 4,5 kWc en France contre le double en Allemagne, ce qui correspond bien plus au besoin en électricité d’une maison. »

Reste la baisse du tarif d’achat du surplus d’électricité solaire. Mais à 12,69 centimes d’euro le kilowattheure, il était déjà nettement en dessous du prix du kilowattheure d’électricité consommée facturée aux Français, c’est-à-dire 20,16 centimes d’euros le kilowattheure en option de base au tarif réglementé de vente d’électricité, encadré par les pouvoirs publics (les tarifs « bleus » d’EDF). Dans ce contexte, les producteurs d’électricité solaire avaient déjà tout intérêt à consommer leur électricité pour réduire leur facture plutôt qu’à la vendre.

L’impératif d’autoconsommer son électricité

Cette baisse du tarif d’achat à 4 centimes d’euro accentue encore un peu cet impératif. « En passant de 30 % d’autoconsommation, la moyenne en France, à 50 %, vous faites plus que compenser la baisse du tarif d’achat », assure Sylvain Guérin. Tout l’enjeu est d’inciter les foyers équipés d’installations photovoltaïques à mieux piloter leur consommation électrique pour la faire coïncider avec le moment où leurs panneaux produisent de l’électricité. Dans ce domaine, la marge de progression est grande en France. Seulement 32 % des possesseurs de voitures électriques pilotent la recharge de leur véhicule en choisissant le moment où elle se déclenche, notait par exemple Enedis dans une étude parue en septembre. Le constat vaut aussi pour le remplissage d’un ballon d’eau chaude, autre appareil électrique aisément programmable. « Cette nouvelle donne nous poussera aussi à nous intéresser aux solutions de stockage de l’électricité », anticipe par ailleurs Richard Loyen. De quoi booster le marché des batteries domestiques encore balbutiant en France.

Trou de 7 mois

Au final, sur le solaire résidentiel, les réclamations du SER et d’Énerplan portent surtout sur le calendrier d’application de ces nouvelles conditions tarifaires. La baisse de la TVA à 5,5 % n’entrera en vigueur qu’au 1er octobre. En revanche, le nouveau tarif d’achat et la nouvelle prime à l’autoconsommation s’appliquent immédiatement à la publication de cet arrêté. Bref, il y a un trou de sept mois pendant lesquels Énerplan craint un arrêt brutal des investissements de particuliers dans les installations photovoltaïques. Énerplan et le SER ont demandé que le gouvernement revoie sa copie sur ce point et fasse concorder ces deux baisses, sans succès. « Cette chute des ventes à craindre va faire mal à la filière solaire, réagit Richard Loyen. On va voir comment elle s’organise pour y faire face et inciter les particuliers à ne pas attendre octobre pour investir. »

Par ailleurs, il reste encore une zone de flou. Elle concerne les conditions à remplir pour obtenir ce taux de TVA à 5,5 %, qui seront précisées ultérieurement, dans un décret. Mais il faut d’ores et déjà s’attendre à ce que ce rabais ne soit accordé qu’aux installations photovoltaïques permettant le pilotage de l’électricité produite, voire liée à des solutions de stockage. Sans doute aussi une condition « made in UE » s’ajoutera-t-elle dans un second temps, une fois les premières « gigafactories » ouvertes en Europe. Plusieurs projets sont en cours en France, dans les Bouches-du-Rhône ou en Moselle notamment.

Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

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