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Nouveau cumul emploi-retraiteVraiment plus attractif ?

Le dispositif de transition emploi-retraite, qui permet de retravailler tout en percevant pleinement ses pensions de retraite, est revu et corrigé à compter du 1er septembre 2023. S’il comporte une avancée intéressante, on l’aurait voulue plus conséquente.

C’est une des innovations de la loi portant réforme des retraites et de ses décrets d’application qui viennent de paraître : un retraité qui souhaite retravailler pourra percevoir à la fois toutes ses pensions de retraite calculées en regard de ses 42 ans (bientôt 43 ans) de vie professionnelle, ainsi qu’une seconde pension de retraite calculée, cette fois, selon ses droits issus d’une reprise ou d’une poursuite d’activité.

Autrement dit, et c’est une avancée, les cotisations qui étaient jusqu’alors obligatoirement prélevées sur les nouveaux revenus professionnels (à l’instar de celles prélevées pour n’importe quel actif), mais qui étaient à fonds perdus, vont désormais devenir productrices de nouveaux droits retraite et générer une nouvelle pension.

Réservé au cumul intégral

Pour qu’il en soit ainsi, différentes conditions, identiques à celles qui prévalaient jusqu’à présent pour le cumul emploi-retraite (CER) « déplafonné » ou « intégral », doivent toutefois être réunies. Il faut ainsi :

  • avoir atteint l’âge légal applicable à sa génération (62 ans + 3 mois pour les personnes nées du 01/09/1961 au 31/12/1961 et ainsi de suite jusqu’au déploiement du nouvel âge légal de 64 ans pour les personnes nées en 1968 et après) ;
  • avoir obligatoirement obtenu ses retraites à taux plein, chaque génération devant totaliser un certain nombre de trimestres retraite dont le nombre va croissant avec la réforme (voir notre tableau) : 169 pour la génération née en 1962 par exemple.

À noter que les personnes qui liquident leur pension à 67 ans, âge du taux plein automatique, inchangé avec la réforme, n’ont pas cette condition de trimestres à remplir.

Les modalités du cumul plafonné perdurent

Tant qu’elles n’ont pas atteint l’âge légal applicable à leur génération, les personnes qui bénéficient d’un départ anticipé, au titre d’une carrière longue notamment, sont exclues de ce dispositif. Il en va de même pour les personnes qui font valoir leurs droits à pension à l’âge légal, mais qui, en raison d’une carrière courte ou d’années travaillées à temps partiel par exemple, n’arrivent pas à réunir le nombre de trimestres exigé. Pour ces profils, le CER est « limité », car les revenus générés par une nouvelle activité professionnelle restent, comme auparavant, plafonnés. Pour le régime général par exemple, le total des pensions de retraite et des nouveaux revenus ne peut excéder soit la moyenne mensuelle des trois derniers revenus d’activité soit, si cela est plus avantageux, 160 % du Smic en vigueur au 1er janvier de l’année. Comme auparavant, les cotisations versées ne génèrent aucun nouveau droit à la retraite.

Six mois de délai de carence dans certains cas 

Pour que le CER soit productif de nouveaux droits à la retraite, la « poursuite » d'activité, lorsqu'elle a lieu chez le dernier employeur, doit intervenir au plus tôt 6 mois après la liquidation des pensions. Cette nouveauté, plutôt contraignante, s’applique à de nombreux profils concernés : salariés (secteur privé, secteur agricole et certains régimes spéciaux), fonctionnaires et contractuels de la fonction publique. Elle était jusqu’à présent applicable uniquement aux personnes qui exerçaient un CER limité.

Plus de souplesse pour les indépendants au sens large

Ce délai de carence ne s’applique en revanche pas aux indépendants ou aux professionnels libéraux (avocats compris) qui peuvent poursuivre leur activité comme si de rien n’était. Par ailleurs, une exception temporaire « qui permet de s’affranchir de ce délai de carence a été prévue pour les personnes ayant repris ou poursuivi une activité professionnelle dans les 6 mois qui ont suivi la publication de la loi. Cette exception concerne ceux et celles dont la date d’effet de leurs pensions est fixée au plus tard pour le 1er octobre prochain », explique Marion Chatel, responsable de la veille juridique chez Novelvy Retraite.

Poursuite ou reprise d’activité : des implications différentes 

Lorsqu’il ne s’agit pas d’une « poursuite » d’activité chez le dernier employeur, mais d’une « reprise » d’activité chez un autre employeur ou d’une création d’entreprise (sous la forme d’une micro-entreprise notamment), le délai de carence de 6 mois ne s’applique pas.

Autre point important : « À partir du 1er septembre prochain, les personnes en cumul emploi-retraite intégral depuis le 1er janvier dernier bénéficieront d’une certaine rétroactivité de la loi puisqu’elles pourront solliciter leur dernier régime d’affiliation afin que les cotisations versées depuis cette date soient créatrices de droits », précise Marion Chatel.

Un versement viager 

La nouvelle et seconde pension de retraite dont il sera possible de se prévaloir ne concerne que les régimes de base alignés (Cnav, MSA salariés, SSI), les régimes des fonctionnaires et ceux des professionnels libéraux (CNAVPL, CNBF pour les avocats). Elle ne concerne pas les régimes complémentaires (Agirc-Arrco…) dont les conseils d’administration restent libres de décider ou non d’appliquer une telle mesure dans les prochaines années, malgré le versement de cotisations obligatoires.

Cette seconde pension sera automatiquement calculée à taux plein, sans majorations (est notamment visée la majoration de 10 % accordée aux parents d’au moins 3 enfants), sur la base d’un salaire mensuel moyen dont les contours restent à préciser. Elle sera versée de façon viagère, et non sous forme d’un capital, en une seule fois, y compris si elle est peu élevée.

Un montant plutôt modeste !

Le montant annuel maximum (brut) de cette seconde pension de retraite a été fixé pour tous les régimes concernés à 5 % du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 2 199,60 € par an (5 % x 43 992 € pour 2023) ou 183,30 € par mois.

Pour la CNAVPL qui gère le régime de base de tous les professionnels libéraux, hors avocats, et qui a la particularité de fonctionner non pas en trimestres, mais en points, le calcul d’une éventuelle seconde pension de retraite dans le cadre d’un cumul emploi-retraite nouvelle version est d’ores et déjà possible. Il est surtout fort instructif. En effet, pour obtenir 2 200 € par an environ de nouvelle pension de retraite, il faut au préalable réunir 3 620 points de retraite. Mais, et c’est là que le bât blesse, compte tenu du mode d’acquisition de ces points (550 par an maximum, quel que soit le montant annuel brut du nouveau salaire), atteindre ce cap suppose de retravailler presque… 7 années de plus. Face à cette réalité ‒ qui a tout de même le mérite d’exister ‒ il n’est pas sûr que le nombre des « cumulards », évalué à un peu moins de 500 000 personnes par la Drees (1), augmente significativement dans les prochaines années. Surtout lorsque l’âge légal de départ sera passé, en 2030, à 64 ans !

(1) Les retraités et les retraites, édition 2023, direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des Solidarités et de la Santé.

Roselyne Poznanski

Roselyne Poznanski

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