Arnaud de Blauwe
NotairesTarifs et installation dans le viseur
La loi Macron a touché aux notaires ! Les tarifs appliqués à certains petits actes ont été revus à la baisse et le principe de la liberté d’installation est posé. Le ministère de la Justice va en effet établir une nouvelle carte pour déterminer les zones où ils sont peu nombreux et celles où, au contraire, ils le sont trop ! L’Autorité de la concurrence est saisie pour avis. En juin 2015, la Cour des comptes avait rendu un référé pointant du doigt la rémunération des fonds confiés par les notaires à la Caisse des dépôts et consignation (CDC). Des modifications ont depuis été effectuées.
Les nouveaux tarifs des notaires fixés par la loi Macron sont entrés en vigueur le 1er mai dernier. Ils se traduisent par une baisse des émoluments de 1,4 % et par un plafonnement à 10 % du prix pour les transactions de faible montant. Grincement de dents du côté de la profession : dans un récent sondage, 75 % des notaires estiment que ces mesures vont les contraindre « à revoir le fonctionnement » de leur étude.
Mais la loi Macron touche aussi au principe de la liberté d’installation. Le ministère de la Justice va s’employer à dresser une nouvelle carte afin de déterminer les zones où il est nécessaire de renforcer « l’offre de notaires ». À l’inverse, les possibilités d’installation seront limitées dans les régions où elle est trop importante.
La Chancellerie a sollicité l’avis de l’Autorité de la concurrence pour établir cette répartition géographique. L’UFC-Que Choisir a été consultée. Et il semble que l’Autorité aille au-delà de sa mission initiale et en profite pour faire le point sur les pratiques de la profession notariale.
Celle-ci a d’ailleurs été quelque peu « secouée » par un référé de la Cour des comptes rendu en juin dernier et passé assez inaperçu. En cause : la rémunération des fonds des clients confiés par les notaires à la Caisse des dépôts et des consignations (CDC). Lorsque la Cour des comptes s’est saisie de la question, ces fonds étaient rémunérés à hauteur de 1 %. « Ce taux d’intérêt présente à l’évidence un caractère non économique, fixé non en référence aux conditions de marché mais au regard de considérations liées aux relations entre la Caisse des dépôts et les professions juridiques », estimait la Cour des comptes. Qui ajoutait : « Le taux de 1 % sur la partie revenant aux notaires n’a pas été modifié depuis 1892. Le produit de ce taux est devenu très avantageux, représentant actuellement 17 000 € par an et par notaire, selon le CSN (Conseil supérieur du notariat). […] Rien ne justifie […] que la rémunération […] soit intégralement proportionnelle aux sommes déposées ».
Des critiques, la Cour des comptes en formulait aussi à l’égard de la conservation des fonds des tiers remis aux notaires. Citant des chiffres de la profession issus des inspections internes effectuées en 2012, 38 % des offices étaient en infraction : ils avaient conservé au-delà du délai de trois mois ces sommes sur leur compte de disponibilités courantes. Or, en principe, une fois cette période écoulée, les fonds doivent être transmis sur des comptes obligataires, ouverts à la CDC. Ce qui permet par conséquent à leurs propriétaires d’en percevoir les intérêts.
Dans ses recommandations, la Cour demandait une révision du système. Des mesures ont été prises depuis. Le 1er janvier dernier, le taux de rémunération des comptes est passé de 1 % à 0,75 % (taux applicable aux notaires comme aux propriétaires des fonds). « En outre, pour remédier aux retards, nous avons mis en place un processus de transfert direct au bout de trois mois vers les comptes clients », précise Me Marie-Hélène Kraft-Faugère, membre du CSN. Un bémol cependant : ce dispositif de transfert direct existait déjà au moment du référé de la Cour des comptes. Cette dernière déplorait alors qu’il était possible d’en suspendre manuellement le fonctionnement. Réponse de Me Kraft-Faugère : « Il faut bien comprendre que certains dossiers (par exemple, ceux avec hypothèques) mettent plus de temps que d’autres avant d’être clôturés, ce qui peut justifier des retards dans les transferts. »