Fabienne Maleysson
Mort subite du nourrissonDes images pousse-au-crime
Trop de photos, notamment sur les paquets de couches, sont contraires aux recommandations visant à limiter les cas de mort subite du nourrisson. C’est ce que conclut une équipe de chercheurs européens.
La mort inattendue du nourrisson est la première cause de décès entre 28 jours et 1 an. En France, l’un des pays européens où la prévalence est la plus élevée, 250 à 350 bébés en sont victimes chaque année. Après une diminution considérable du nombre de cas, celui-ci stagne depuis une vingtaine d’années. Or, si des pathologies (génétiques, cardiaques, infectieuses, etc.) sont parfois en jeu, on estime que la moitié de ces décès pourraient être évités en respectant certaines recommandations. Tout comme le tabagisme passif, notamment pendant la grossesse, le mode de couchage inapproprié constitue un facteur de risque important. Il importe de coucher le bébé :
- sur le dos, et non sur le ventre ou sur le côté ;
- sur une surface ferme, avec une turbulette adaptée à sa taille mais sans couverture, couette, oreiller, tour de lit ni autres objets tels que des peluches auprès de lui ;
- seul (le partage du lit des parents multiplie le risque par cinq) ;
- dans une chambre pas trop chauffée (entre 18 et 20 °C).
Appliquer ces recommandations permettrait d’éviter des dizaines de décès chaque année. D’où l’importance qu’elles soient parfaitement connues et que toute la communication concernant les nourrissons, qu’elle émane des acteurs économiques ou des pouvoirs publics, soit en phase avec elles. Or ce n’est pas le cas, si l’on en croit une publication récemment parue dans la revue scientifique The Journal of Pediatrics et signée par des chercheurs de 11 pays européens, dont la France. Selon eux, trop d’images, notamment celles reproduites sur les paquets de couches, iraient à l’encontre de ces recommandations, qu’elles montrent un bébé couché sur le ventre, lové dans une couette ou dormant avec un de ses parents, par exemple. Vérification faite en magasin et sur Internet, ces entorses aux bonnes pratiques, si elles ont pu être fréquentes, se font plus rares aujourd’hui. Ainsi, les images visibles sur les paquets du leader, Pampers, et de ses challengers, les principales marques de distributeurs, sont en général sans reproches. Une exception tout de même : Casino avec sa référence Les Tilapins, qui cumule les messages contre-productifs. Pour le reste, ce sont essentiellement des petites marques peu distribuées qui utilisent des photos non pertinentes, à l’instar de Cotocouche ou Happy.
Plus étonnant, certains organismes publics, alors qu’ils sont censés œuvrer en faveur de la santé de tous, négligent de vérifier la pertinence de leurs visuels. Et si Santé publique France a retiré de son site, à la demande des chercheurs de l’Inserm1 qui ont participé à l’enquête européenne, des illustrations montrant un enfant dormant sur le ventre et un autre avec sa mère, la DGCCRF2 est restée sourde à leurs alertes. Son site comporte une photo montrant un lit de bébé entouré d’un tour de lit et une autre un nourrisson bien emmitouflé dans du textile moelleux propice à l’étouffement. Pire, elles accompagnent des textes portant sur… la sécurité des articles de puériculture. Un comble !
Lire aussi
Puériculture - Aberrations en rayon
Matelas bébé - Nos conseils pour coucher bébé, sans risque de tête plate ou de mort subite
1. Institut national de la santé et de la recherche médicale.
2. Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes.