Audrey Vaugrente
Un nouveau traitement autorisé aux USA malgré les doutes
Aux États-Unis, l’agence du médicament a autorisé la mise sur le marché d’un nouveau traitement de la maladie d’Alzheimer du laboratoire Biogen, l’aducanumab (Adulhem). Son coût élevé n’est pas le seul objet des nombreuses critiques à son égard.
Début juin, l’Agence américaine du médicament (FDA) a approuvé la commercialisation de l’aducanumab (Adulhem). Cet anticorps injectable cible les plaques amyloïdes qui s’accumulent dans le cerveau des personnes malades d’Alzheimer. Elles sont soupçonnées de provoquer les symptômes neurodégénératifs. Mais cette apparente bonne nouvelle a suscité un grand nombre de critiques dans la communauté médicale.
De fait, plusieurs laboratoires ont exploré la même piste. À ce jour, aucun n’a réussi à démontrer que détruire les plaques amyloïdes ralentit la progression de la maladie. Biogen ne fait pas exception. Le fabricant de l’aducanumab n’a toujours pas apporté la preuve de l’efficacité de son produit. Ses deux essais cliniques ont même été interrompus en 2019 : un comité indépendant a jugé qu’ils ne produiraient pas les résultats escomptés. C’est sur ces travaux, non publiés, que le dossier s’appuie. Les effets indésirables, eux, sont réels : des microhémorragies cérébrales ou des lésions de la matière blanche ont été observées.
Des questions sans réponses
Pour l’heure, l’aducanumab n’a été testé que sur des formes précoces de la maladie d’Alzheimer. La FDA, dans son avis, l’a d’abord autorisé à tous les malades. Elle a finalement conseillé de ne le donner qu’aux personnes souffrant de formes légères. Cela soulève aussi des inquiétudes, car des questions persistent. Les médecins ignorent, par exemple, quand interrompre le traitement et s’interrogent sur la conduite à tenir si l’état du patient se dégrade.
La procédure accélérée dont a bénéficié le laboratoire Biogen est critiquée. Elle est généralement permise quand les preuves manquent mais que le dossier laisse espérer une utilité du médicament. Ce n’est pas le cas ici. Plus inquiétant, la FDA n’a pas suivi l’avis de son comité indépendant, majoritairement opposé à une commercialisation de l’aducanumab. 10 de ses 11 membres ont jugé le dossier non concluant, le 11e s’est dit « incertain ».
Ce n’est pas la première fois que la FDA va à l’encontre d’un avis défavorable, mais contredire un tel consensus est inédit. À tel point que certains, dont le groupe de défense des consommateurs Public Citizen, s’alarment des liens étroits entre la FDA et Biogen au cours de l’évaluation du dossier (1). Le médicament est annoncé au prix de 46 000 € par an et par patient. La facture laisse, par avance, un goût amer.
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(1) Communiqué de Public Citizen au sujet de l’aducanumab.