Anne-Sophie Stamane
Loi anti-cadeauxUrgo lourdement condamné
Pour avoir fourni des cadeaux personnels à des pharmaciens en lieu et place des classiques remises commerciales, le groupe Urgo doit payer une amende de plus de 6 millions d’euros.
C’est un scandale considérable qui vient d’être sanctionné par la justice : pour avoir offert des cadeaux et des avantages en nature à des pharmaciens d’officine, à hauteur de 55 millions d’euros au total sur 6 ans, deux filiales du groupe Urgo connu, entre autres, pour ses gammes de pansements, ont été condamnées par le tribunal judiciaire de Dijon (Côte-d’Or) à une amende de 1,125 million d’euros. 5,4 millions d’euros avaient déjà été confisqués lors de l’enquête.
« Ce système, permettant notamment aux laboratoires Urgo de fidéliser une clientèle [les pharmaciens, ndlr], avec des marges commerciales plus conséquentes, et aux professionnels de santé [toujours les pharmaciens, ndlr] d’obtenir des avantages personnels est en contradiction avec la loi DMOS dite "anti-cadeaux" adoptée en 1993, puis renforcée successivement notamment en 2011 et 2016 », souligne dans son communiqué le procureur de la République de Dijon, Olivier Caracotch.
Faveurs personnelles
8 000 pharmaciens, soit presque un tiers de la profession exerçant en officine, auraient accepté ces faveurs personnelles, accordées en contrepartie de l’abandon des classiques remises commerciales, et ils sont, eux aussi, dans le viseur de la justice et de l’administration, car la loi est claire : « Tout comme le fait d’octroyer un avantage illégal, le fait de l’accepter est passible d’une sanction en application du dispositif anti-cadeaux : la sanction encourue est d'un an d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende […] », note la DGCCRF, qui est à l’origine de l’enquête. Elle rappelle l’objectif de la loi anti-cadeaux, qui « vise à préserver l’indépendance des professionnels de santé. Il s’agit tout d’abord d’un impératif d’ordre sanitaire, seules des considérations de santé publique devant guider les actes de prescription et de délivrance de produits de santé. » En l’occurrence, les pharmaciens ont mis un mouchoir sur leur déontologie en acceptant des cadeaux d’ordre personnel, et Urgo a tout simplement acheté leurs faveurs… Le mot corruption n’est pas prononcé, mais l’affaire y ressemble fortement !