
Olivier Puren
Le calcul des plus-values réalisées par les loueurs de meublés non professionnels est modifié. Ceux qui amortissent leurs biens pendant la période de location doivent désormais en tenir compte lors de la revente. Cette réforme va alourdir leur gain imposable, mais pas forcément leurs impôts. Explications.
Les pouvoirs publics souhaitent aligner le régime fiscal des locations meublées sur celui – moins intéressant – des locations vides. Ils envisagent même de créer un statut unique du bailleur qui s’appliquerait indifféremment à toutes les locations d’habitation. En attendant, ils suppriment un à un les avantages dont les premières sont assorties. En 2023 et 2024, deux réformes ont été adoptées qui réduisent l’abattement sur les loyers des loueurs de meublés de tourisme soumis au régime d’imposition « micro-BIC ». Entrées en vigueur le 1er janvier, elles vont alourdir sensiblement leur imposition à compter de 2026. La loi de finances adoptée début 2025 réforme également la fiscalité des plus-values réalisées par les loueurs de meublés non professionnels soumis au régime réel des BIC, qu’ils fassent de la location touristique ou à l’année. Entrée en vigueur le 16 février, elle va aussi alourdir leur imposition, mais uniquement en cas de revente avant 30 ans.
La location meublée est une activité commerciale aux yeux du fisc, ce qui autorise les loueurs de meublés à calculer leur résultat (bénéfice ou déficit) dans les mêmes conditions que les commerçants indépendants. Comme eux, ils sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), et ils relèvent du régime réel d’imposition lorsque leurs loyers bruts annuels dépassent certaines limites (ou qu’ils ont exercé une option en ce sens).
Amortissements déductibles. Les loueurs de meublés soumis au régime réel des BIC peuvent déduire de leurs recettes non seulement les charges générées par leurs locations (primes d’assurance, frais d’agence, de procédure, dépenses d’entretien et de réparation, intérêts d’emprunt, taxes foncières, charges de copropriété, etc.), mais aussi une fraction du prix d’acquisition des biens loués et du coût de leurs gros travaux sous forme d’amortissements. Les loueurs de logements vides, eux, ne peuvent pas amortir leur patrimoine locatif lorsqu’ils sont soumis au régime réel des revenus fonciers, ils peuvent uniquement déduire leurs charges de gestion et de propriété et ils sont de ce fait davantage imposés que les loueurs en meublé.
Amortissements réintégrables. Pour réduire cet écart de fiscalité, le législateur a décidé qu’à la revente d’un bien loué en meublé, son propriétaire doit désormais tenir compte des amortissements déduits de ses loyers dans le calcul de sa plus-value. En pratique, ces amortissements doivent être déduits du prix d’acquisition du bien vendu, augmentant d’autant la plus-value constatée. La mesure s’applique aux ventes réalisées depuis le 16 février 2025 par tous les loueurs non professionnels (statut « LMNP »), qu’ils louent à l’année (location à usage de résidence principale) ou en saison (location saisonnière ou touristique), des meublés classés, non classés ou des chambres d’hôtes. Jusqu’à présent, seuls les loueurs de meublés professionnels (statut « LMP ») devaient réintégrer leurs amortissements dans leurs plus-values.
Bon à savoir : par exception, les amortissements déduits au titre des travaux de construction, d’agrandissement et d’amélioration faits dans les biens loués meublés n’ont pas à être réintégrés dans la plus-value. Les amortissements déduits au titre des biens meublés situés dans une résidence-services pour étudiants ou pour personnes âgées ou handicapées non plus.
La réintégration des amortissements va alourdir la plus-value constatée à la revente de vos biens loués meublés, dans des proportions d’autant plus élevées que la location aura duré longtemps. Par exemple, si vous vendez en juin 2025 pour 400 000 € un bien acquis 200 000 € en janvier 2003, loué meublé pendant toute sa durée de détention et amorti à hauteur de 45 % de sa valeur, votre plus-value sera alourdie des 90 000 € d’amortissements que vous avez déduits de vos loyers. Elle sera égale à 290 000 €, soit la différence entre votre prix de vente et votre prix d’acquisition minoré des amortissements. Si vous aviez vendu avant le 16 février 2025, votre gain aurait été limité à 200 000 € (la différence entre votre prix de vente et votre prix d’acquisition).
Jouer la montre. Cela étant, plus vous conserverez vos biens loués longtemps et plus l’abattement pour durée de détention applicable sur votre plus-value sera, lui aussi, élevé. Rappelons que les plus-values immobilières réalisées par les particuliers bénéficient d’un abattement progressif en cas de vente d’un bien détenu depuis plus de 5 ans, qui conduit à une exonération totale d’impôt après 22 ans et de prélèvements sociaux après 30 ans. Ainsi, dans l’exemple précédent, vos 290 000 € de plus-value seront totalement exonérés d’impôt (vous avez acheté il y a plus de 22 ans), et ils ne supporteront que les prélèvements sociaux sur 72 % de leur montant (abattement de 1,65 % de la 6e à la 21e année de détention et de 1,60 % la 22e). Et si vous patientez jusqu’en janvier 2033 pour vendre, votre plus-value sera aussi exonérée en totalité de prélèvements sociaux (abattement de 9 % de la 22e à la 29e année de détention).
Conserver ou transmettre. La réforme sera sans conséquence si vous conservez votre patrimoine locatif pour l’occuper ou le transmettre à vos proches par donation ou par succession. Dans ce cas, la plus-value prise par vos biens loués, augmentée des amortissements déduits de vos loyers, sera effacée par cette transmission à titre gratuit. Elle échappera donc aussi à toute imposition.
Bon à savoir : l’abattement forfaitaire déduit des loyers des loueurs de meublés soumis au régime « micro-BIC » est censé représenter leurs charges déductibles, mais aussi l’amortissement de leurs biens. Le fisc devra préciser s’ils sont également concernés par la réforme du mode de calcul des plus-values. À suivre.
Olivier Puren
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