Cyril Brosset
Le désarroi des clients
Le 24 mai dernier, le tribunal de commerce du Havre prononçait la liquidation judiciaire de la chaîne de magasins de meubles Interior’s. Depuis, des centaines de victimes se battent pour qu’on leur rende l’argent qu’elles ont versé ou récupérer leur commande. Rares sont celles qui y sont parvenues pour le moment. La faute à une procédure défavorable aux consommateurs.
Six mois seulement après Habitat, une autre enseigne de meubles était placée en liquidation judiciaire. Le 24 mai dernier, Interior’s baissait le rideau, laissant sur le carreau des centaines de victimes en attente de leur commande. Dans la foulée, son site Internet et sa trentaine de magasins étaient fermés. Le groupe Facebook des clients victimes de la liquidation d’Interior’s compte aujourd’hui plus de 1 600 membres. Certains d’entre eux avaient versé un acompte ou opté pour un règlement en plusieurs fois alors que d’autres avaient payé la totalité du montant de leur commande, qui atteint parfois plusieurs milliers d’euros.
Comme la procédure l’exige, la plupart d’entre eux ont déclaré leur créance auprès du liquidateur judiciaire. Toutefois, leurs chances de récupérer leur argent par ce biais sont quasi nulles, le mandataire ayant d’ores et déjà annoncé des dettes trop importantes pour qu’ils puissent espérer être indemnisés. Face à cette situation, chacun tente de trouver des solutions alternatives.
Se faire rembourser ou récupérer sa commande, un parcours du combattant
Ceux qui ont réglé par Paypal sont les plus chanceux. Le système de paiement en ligne a remboursé sans sourciller ceux qui l’avaient utilisé. Pour les autres, les résultats sont nettement plus mitigés. Une poignée est parvenue à faire jouer la garantie liée à leur carte bancaire (le plus souvent un modèle haut de gamme). Quelques autres, qui avaient opté pour un paiement en 3 ou 4 fois sans frais, ont réussi à faire annuler les mensualités. Tant mieux pour eux car, dans la très grande majorité des cas, les organismes de crédit qui gèrent ces facilités de paiement ont refusé les demandes de remboursement. D’autres encore ont eu la chance de pouvoir récupérer leurs meubles. Le transporteur français qui les avait en sa possession a accepté de leur livrer en échange du paiement de frais de livraison supplémentaires. Un moindre mal. Ces cas restent toutefois marginaux.
Les autres ne baissent pas pour autant les bras, à l’image d’Axelle, l’une des membres les plus actives du groupe Facebook. « Depuis que nous avons appris que le transporteur international d’Interior’s retenait 20 containers remplis de meubles, beaucoup d’entre nous ont lancé des actions en revendication afin de signaler au liquidateur et au commissaire-priseur que les biens que nous avions commandés nous appartenaient et ne devaient pas être revendus, explique la jeune femme, qui espère toujours récupérer les 5 meubles qu’elle avait achetés pour un montant de 3 000 €. Pour l’heure, nous n’avons pas de retour, mais nous croisons les doigts. » Le groupe réfléchit par ailleurs à déposer une plainte au pénal contre les dirigeants d’Interior’s.
Les clients, dernière roue du carrosse
Comme lors de chaque liquidation judiciaire, les clients lésés se retrouvent face à un mur. En tant que créanciers chirographaires, ils ne sont indemnisés qu’une fois les salaires, les services de l’État et les fournisseurs payés, à condition qu’il reste suffisamment d’argent dans les caisses, ce qui est rarement le cas. Les chances pour eux de récupérer leur argent sont donc infimes. Encore faut-il être au courant de la procédure. Dans le cas d’Interior’s, la plupart des victimes ont appris la nouvelle par la presse ou en se rendant sur le site Internet ou dans leur magasin. D’autres, dont la livraison est prévue entre août et décembre, pourraient ne pas encore avoir conscience de la décision de justice et ne pas pouvoir déclarer leur créance, la date limite étant dépassée. Face à cette situation, des membres du collectif ont lancé une pétition en ligne pour faire changer la loi, et faire en sorte que les consommateurs ne soient plus laissés sur le bas-côté.