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JusticePorter plainte à distance est désormais possible

Alors que la visioplainte était expérimentée depuis quelques mois dans la Sarthe et les Yvelines, le gouvernement a décidé de la généralisation du dispositif sur tout le territoire. Excès de dématérialisation ou réelle avancée ?

À la suite de la publication d’un décret le 23 février 2024, le dépôt de plainte par visioconférence va être généralisé à tous les départements. La visioplainte sera disponible nationalement à partir d’octobre 2024, selon une annonce de Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur. Objectif : faciliter cette lourde formalité en la rendant possible depuis son domicile ou dans un lieu de son choix sans être exposé au regard des autres, ce qui pourrait libérer la parole dans certains cas. L’idée est aussi de simplifier la démarche pour la victime en permettant un gain de temps puisqu’elle n’aura plus à se déplacer. Nul doute, la visioplainte va dans le sens de la modernisation de la justice mais certains avocats pointent aussi le risque de déshumanisation des victimes et invitent à la vigilance. Il ne faudrait pas que cette innovation, qui n’est aujourd’hui pas obligatoire, le devienne à terme pour toutes les plaintes.

Qui peut déposer une visioplainte ?

Toutes les victimes d’infractions pénales ont accès au service qu’il s’agisse d’atteintes contre les biens ou les personnes, de violences et menaces ; de tout type de vols ; d’escroquerie ou d’abus de confiance ; de dégradations volontaires ou de destruction de biens privés ; de discrimination ; de cyberharcèlement, etc. En revanche, le dépôt de plainte par voie de télécommunication audiovisuelle, comme il est officiellement appelé, ne peut pas être imposé à la victime. C’est pourquoi cette dernière est informée par l’officier ou l’agent de police judiciaire en charge du recueil de ses déclarations du caractère facultatif du dépôt de plainte en visio et de la faculté qu’elle conserve de se déplacer pour déposer plainte dans le service de police ou d’une unité de gendarmerie de son choix.

Quel matériel est requis ?

Le téléservice fonctionne indifféremment sur smartphone, tablette ou ordinateur. Il est intégré au site et à l’application MaSécurité, qui centralise les ressources mises à la disposition des citoyens par le ministère de l’Intérieur. L’appareil doit être équipé d’une caméra intégrée ou d’une webcam pour réaliser la visioplainte. Il faut également posséder un identifiant FranceConnect.

Une fois connectée, la victime choisit un créneau de rendez-vous avec un officier ou un agent de police judiciaire puis reçoit une invitation par courriel ou SMS. Le jour et l’heure du rendez-vous, il convient de cliquer sur le lien dans l’invitation et la visioconférence démarre avec l’agent. La visioplainte doit s’effectuer avec du matériel de bonne qualité afin d’assurer une transmission fidèle, loyale et confidentielle des échanges entre la victime et l’officier ou l’agent de police judiciaire recueillant la plainte. De même, la qualité de transmission des images doit permettre de s’assurer de l’identité de la victime. Tout incident technique qui perturbe la transmission est mentionné dans le procès-verbal.

Comment se déroule la visio ?

Lors du rendez-vous, la victime est informée de ses droits, notamment :

  • d’obtenir réparation de son préjudice, de se constituer partie civile, de bénéficier de mesures de protection, etc. ;
  • de la possibilité qu’elle a de bénéficier d’une prise en charge psychologique et médicale si la nature de l’infraction le justifie, notamment pour les infractions de nature sexuelle ;
  • des suites données à sa plainte et notamment des modalités de recours contre une éventuelle décision de classement sans suite, etc.

Il est mis à sa disposition un document énonçant ces différents droits sous un format électronique et imprimable.

À l’issue du recueil de la plainte, et préalablement à sa signature par l’officier ou l’agent de police judiciaire, le procès-verbal de plainte lui est adressé par voie électronique. À réception des documents transmis sous format numérique, elle confirme que ces derniers transcrivent fidèlement ses déclarations et les faits relatés. Elle peut solliciter toute modification qu’elle juge nécessaire. Son accord est mentionné au procès-verbal. Le récépissé et le procès-verbal sont ensuite signés par l’officier ou l’agent de police judiciaire ayant reçu la plainte mais la signature du plaignant n’est pas requise. Le récépissé de plainte est transmis à la victime. En revanche, la copie du procès-verbal de plainte ne lui est adressée dans « les meilleurs délais » que si elle en fait la demande. Il est recommandé de solliciter cette copie.

Une audition ultérieure en présentiel est-elle systématique ?

En cas de plainte portant sur des infractions d’agressions sexuelles ou d’atteintes sexuelles, une audition ultérieure en présence de la victime est systématique. Pour les autres infractions, cette dernière est informée lors de la visioplainte que les enquêteurs pourront procéder à une audition en présentiel si la nature ou la gravité des faits le justifie.​​​​

Qu’est-ce qu’une plainte ?

La plainte est l’acte par lequel une personne qui s’estime victime d’une infraction en informe le procureur de la République directement ou par l’intermédiaire d’un service de police ou de gendarmerie. La plainte peut être classée sans suite. Cela signifie qu’il n’y aura pas de poursuites, pas de procès. À l’inverse, le procureur peut engager des poursuites ce qui peut entraîner une sanction pénale, c’est-à-dire une condamnation de l’auteur des faits. La victime peut aussi se constituer partie civile si elle souhaite obtenir réparation de son préjudice via des dommages et intérêts. À noter que la plainte peut être déposée contre une personne identifiée ou contre X si l’identité de l’auteur des faits est inconnue.

Les 3 autres manières de porter plainte

Avec la généralisation de la visioplainte, il existe désormais 4 façons de porter plainte. Voici les 3 autres.

La plainte au commissariat ou à la gendarmerie

C’est le procédé traditionnel. Il convient de se déplacer et de rapporter les faits constitutifs de l’infraction auprès d’un agent ou d’un officier qui est censé recueillir votre plainte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

La plainte auprès du tribunal

Il peut s’agir d’une plainte simple par courrier adressé directement au procureur de la République ou cela peut être une plainte avec constitution de partie civile adressée par courrier ou déclaration orale auprès d’un juge d’instruction. Attention, cela n’est possible que si les faits constitutifs de l’infraction constituent un crime ou un délit et uniquement si vous avez déjà porté plainte auprès des forces de l’ordre ou du procureur mais que votre plainte a été classée sans suite ou que vous n’avez pas eu de nouvelle du parquet depuis 3 mois.

La plainte en ligne

Si vous êtes victime ou témoin d’une escroquerie sur Internet, une plateforme de signalement et de dépôt de plainte (Thesee) est disponible 24 heures sur 24.

Si vous êtes victime d’une atteinte aux biens, par exemple en cas de vol, de dégradation, etc., et si vous ne connaissez pas l’identité de l’auteur, vous pouvez actuellement déposer une préplainte en ligne. La démarche vise à faire gagner du temps lors de votre présentation au commissariat ou à la gendarmerie car votre déclaration nécessite, pour être enregistrée, une signature sur place dans une unité de gendarmerie ou un service de police.

Prochainement, la préplainte sera remplacée par la plainte en ligne ce qui dématérialisera totalement la démarche. Plus aucun déplacement ne sera nécessaire. Actuellement, une expérimentation est en cours en Gironde, elle devrait être généralisée d’ici cet été, comme l’a annoncé le président de la République lors d’un discours à Bordeaux le 9 février dernier.

Rosine Maiolo

Rosine Maiolo

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