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Justice

L’exécution immédiate des jugements étendue

La mesure est passée assez inaperçue et pourtant elle marque une petite révolution dans le droit français. Pour les procédures introduites depuis le 1er janvier, les jugements qui seront rendus en première instance devront être exécutés même si l’une des parties à l’instance a fait appel.

Voilà une mesure qui fait grincer quelques dents chez les juristes. En application de la loi justice adoptée au printemps dernier, les jugements rendus par les tribunaux civils de première instance deviennent exécutoires de plein droit (art. 514 du code de procédure civile). En d’autres termes, même si l’une des parties fait appel, la décision s’applique. Par exemple, la partie condamnée à verser des dommages-intérêts à son adversaire devra le faire sans délai. La mesure vaut pour les procédures introduites après le 1er janvier 2020.

Auparavant, le juge avait une marge de manœuvre. Il devait spécifier noir sur blanc qu’il ordonnait l’exécution du jugement rendu, ce qui était loin d’être systématique. En dehors de ce cas, faire appel d’une décision avait, en principe, un effet suspensif. Autrement dit, les dispositions du jugement de première instance étaient gelées tant que la cour d’appel ne s’était pas prononcée.

Avec l’exécution provisoire d’office, si la partie qui a perdu en première instance interjette appel et qu’elle gagne, alors elle devra être rétablie dans la situation antérieure. Ainsi, elle pourra réclamer le remboursement des dommages-intérêts versés à la partie qui a remporté la première manche !

Une source de nouveaux contentieux

Certains observateurs mettent en avant les difficultés que cela occasionnera, ce qui aura pour conséquence de créer un nouveau contentieux. Tout l’inverse de l’objectif visé par cette réforme qui est de désengorger les tribunaux saturés. Environ 20 % des décisions de première instance font aujourd’hui l’objet un appel. Et le taux d’infirmation tourne autour de 50 %, ce qui n’est pas rien !

L’exécution provisoire d’office supporte néanmoins quelques exceptions. Certaines sont fixées par la loi. Ainsi, elle ne s’applique pas à certaines décisions statuant sur l’état civil (par exemple, demande de changement de nom ou de prénom), aux décisions du juge des affaires familiales (par exemple, autorité parentale et pension alimentaire) ou liées à l’adoption.

Les exceptions peuvent également être judiciaires. Le juge a la possibilité de renoncer à l’exécution s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire dont il est saisi. Autre cas de figure, s’il y a appel, la partie condamnée peut demander au premier président de la cour d’appel compétente la suspension de l’exécution provisoire. Cela ne sera toutefois pas possible si lors du premier round elle n’avait pas formulé d’observations sur le caractère exécutoire de la procédure.

Arnaud de Blauwe

Arnaud de Blauwe

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